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La Serbie veut acheter des Rafale mais la France pose des conditions géopolitiques

La France compte recevoir des confirmations sur l’évolution politique du pays avant de finaliser la vente, qui pourrait rapporter trois milliards d’euros.

La Serbie aura-t-elle bientôt des avions Rafale ? C’est ce qu’a assuré son président, en visite à Paris cette semaine. Aleksandar Vucic multiplie les achats d’armes, qu’elles soient européennes, chinoises ou russes : en dix ans, le budget militaire serbe a triplé.

«Nous avons conclu, me semble-t-il, des accords concrets concernant l’achat du Rafale. J’attends la signature du contrat dans les deux prochains mois, en présence du président français, ce qui est extrêmement important pour notre pays », a-t-il déclaré depuis Paris.

Dassault Aviation refuse pour l’instant de discuter d’une éventuelle vente d’avions à la Serbie. L’opération, qui porterait sur une douzaine d’avions, pourrait rapporter trois milliards d’euros mais la France entend avoir des confirmations sur l’évolution politique du pays avant de finaliser l’acquisition.

Les dépenses militaires en hausse

« Tous les pays européens s’arment et nous devons faire de même », déclarait Aleksandar Vucic en mars. « Bien plus encore que les autres, pour rester intact et pouvoir dissuader d’éventuels agresseurs. (…) Je ne suis jamais pleinement satisfait, mais nos capacités militaires d’il y a dix ans sont incomparables à celles d’aujourd’hui.»

La Serbie consacre 2% de son PIB à ses dépenses militaires. Les investissements n’ont cessé d’augmenter ces dernières années. De 2012 à 2023, le budget militaire serbe a triplé, pour atteindre 1,4 milliard d’euros. Plus que les budgets combinés des cinq autres pays des Balkans.

Entre 2014 et 2023, la Serbie a dépensé 2,67 milliards d’euros en achats d’armes – notamment pour acquérir le système anti-aérien chinois FK-3, les hélicoptères russes Mi-17 et Mi-35, ainsi que le système de défense aérienne russe. Défense aérienne Pantsir.

La proximité de la Russie

Le dossier Rafale est cependant plus complexe. La proximité du chef de l’Etat serbe avec son homologue russe Vladimir Poutine pose problème à Paris. Même si la Serbie a condamné l’agression russe en Ukraine, elle ne s’est pas alignée sur les sanctions occidentales.

Fin mars, le ministre serbe des Affaires étrangères, Ivica Dacic, s’est rendu à Moscou, une occasion selon la diplomatie serbe d’améliorer « les liens traditionnellement amicaux entre la Serbie et la Russie ».

Surtout, les achats en provenance de Russie et de Chine n’ont cessé depuis l’invasion de l’Ukraine en 2022. En février, le président serbe présentait fièrement ses dernières acquisitions : des répulsifs russes, un système anti-drone, ainsi que des drones chinois. Il a également promis de mettre en production d’ici fin 2024 un drone explosif fabriqué en Serbie.

« La République de Serbie acquiert des armes et du matériel militaire à l’Est et à l’Ouest », expliquait en mars le ministère serbe de la Défense en réponse à une question de l’AFP sur ses achats à la Russie et à la Chine, « en choisissant ceux dont les caractéristiques seront les plus pertinentes ». améliorer les capacités des forces armées serbes ».

Une potentielle vente « ridicule »

La France s’est engagée depuis un certain temps à intensifier sa collaboration en matière de défense avec la Serbie. Un accord bilatéral de coopération en matière de défense est en place depuis 2011 et a été relancé à partir de 2019. Une coopération qui n’est pas du goût de tout le monde.

«Il serait ridicule que Paris, d’une part, évoque l’envoi de troupes en Ukraine et, d’autre part, vende une arme extrêmement sophistiquée à l’un des plus proches alliés de la Russie», estime Jasmin. Mujanovic, chercheur en sciences politiques.

La vente du Rafale à cet allié de Moscou « serait inquiétante car elle permettrait des fuites d’informations vers la Chine et la Russie », estime-t-il.

Les yeux de la Serbie sont tournés vers le Kosovo

Selon le livre blanc de la Défense serbe, publié en 2023, « le plus grand défi sécuritaire » pour Belgrade se situe de l’autre côté de la frontière avec le Kosovo, ancienne province devenue indépendante au terme d’une guerre sanglante – 13 000 morts. Parmi les conditions demandées, le président français a également évoqué la nécessité d’apaiser les tensions dans les relations avec le Kosovo.

Cependant, si la vente du Rafale se concrétise, « on pourrait voir des avions de combat français utilisés pour intimider le Kosovo. Ces avions pourraient être utilisés contre les pays voisins », prévient Jasmin Mujanovic.

L’avion, entré en service en 2004 et destiné à voler jusque dans les années 2060, est le fer de lance à l’exportation de l’industrie de défense française. Sept pays possèdent des Rafale ou ont conclu des accords commerciaux pour en acquérir : l’Egypte, le Qatar, l’Inde, la Grèce, l’Indonésie, les Émirats arabes unis et la Croatie.

Théodore Laurent avec l’AFP

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Eleon Lass

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