La science-fiction française décolle avec « Pendant ce temps-là sur Terre »
Il n’est jamais facile de réaliser un deuxième film après un énorme succès. Jérémy Clapin avait été couvert de récompenses (Grand Prix de la Semaine de la Critique, Cristal à Annecy, nomination aux César et aux Oscars) pour le film d’animation J’ai perdu mon corps (2020). Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas choisi la solution de facilité Pendant ce temps sur Terredécouvert en juin dernier au Festival d’Annecy.
Le réalisateur propose un film de science-fiction atypique et personnel en racontant le drame d’une jeune femme inconsolable après la mort de son grand frère astronaute perdu dans l’espace depuis trois ans. Jérémy Clapin mêle prises de vues réelles avec l’étonnante Megan Northam (vue notamment dans la série de Cédric Klapisch) salade grecque) à des passages animés relatant ses aventures spatiales. Cette infirmière est en effet contactée par des extraterrestres qui lui proposent un terrible marché en échange du retour de son frère qu’ils prétendent détenir.
Une sorte de casse-cou
« L’animation offre des possibilités narratives et visuelles infinies. Mais ce qui m’intéresse avant tout, avant le médium, c’est le cinéma et une certaine approche du fantastique », explique Jérémy Clapin. Il se lance alors dans l’aventure de la science-fiction, où il suit les traces d’autres grands noms de l’animation comme René Laloux, dont La planète sauvage est sorti en salles récemment ou Mars Express de Jérémie Perin, qui a connu un grand succès public. Les passages vivants de Pendant ce temps sur Terre confirmer sa maîtrise dans ce domaine.
La science-fiction en France a connu des hauts et des bas. Si LLe Cinquième Élément par Luc Besson a triomphé dans le monde entier, il n’en a pas été de même pour Valériane. Quant aux ambitieux Dernier voyage de Romain Quirot, il n’a pas vraiment trouvé son public non plus. Ce qui fait se demander si les spectateurs français n’ont pas un problème avec ce genre lorsqu’il est porté par l’un de leurs concitoyens, surtout lorsqu’ils tentent de sortir des sentiers battus.
Sortez de votre zone de confort
Le mélange de techniques de Pendant ce temps sur Terre déroute mais force le respect car le réalisateur a décidé de sortir de sa zone de confort. « Je crois que je suis allé chercher une matière à explorer que je ne trouvais pas dans l’animation : un aspect brut, de la nature, quelque chose de plus viscéral et organique », dit-il pour expliquer son envie de s’essayer au live action. Son appétit pour la mise en scène et son travail sur la bande-son soutenu par de belles compositions de Dan Levy rendent ce deuxième film extrêmement attachant à défaut d’être complètement abouti.
Il y a une émotion brute dans la description de la douleur d’un chagrin inacceptable et un charme venimeux dans la personnalité d’une héroïne confrontée à des choix douloureux. Pendant ce temps sur Terre ne cherche à aucun moment à copier le cinéma américain. Cette œuvre singulière cherche à tâtons sa propre identité, ce qui la rend fragile mais passionnante. On attend avec impatience la suite de la carrière de Jérémy Clapin.