La Russie a envoyé un sous-marin de classe Kilo en mer d’Irlande au moins deux fois depuis 2022
D’une superficie d’environ 46 000 km² et d’une profondeur variant de 80 à 275 mètres, la mer d’Irlande est reliée à l’océan Atlantique par le chenal du Nord, situé non loin de la base navale de Faslane (Écosse), qui abrite les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la Royal Navy. Au sud, elle communique avec la mer Celtique par le chenal Saint-Georges, qui mène au port irlandais de Cork. Par ailleurs, elle entoure l’île de Man, qui, propriété du roi d’Angleterre, se situe au nord d’une ligne reliant Dublin à Liverpool. D’où son intérêt éminemment stratégique.
En effet, la mer d’Irlande abrite non seulement une vingtaine de câbles de télécommunications sous-marins mais aussi des interconnexions électriques et des gazoducs qui relient la République d’Irlande au Royaume-Uni.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, des informations font état d’activités navales russes « suspectes » dans la zone économique exclusive (ZEE) irlandaise. La mer d’Irlande n’a cependant pas été mentionnée. Or, selon les informations de l’agence Bloomberg, qui s’appuie sur trois sources « proches du dossier », il s’avère que la Russie y a également envoyé au moins deux fois un sous-marin diesel-électrique de classe Kilo.
Cette « mesure sans précédent du Kremlin a conduit Londres à prendre des mesures pour protéger les eaux britanniques et irlandaises », a déclaré Bloomberg.
La première incursion d’un sous-marin de classe Kilo dans la mer d’Irlande a eu lieu il y a environ dix-huit mois (soit en août 2022).
Le deuxième incident s’est produit « plus récemment ». Il est possible qu’il soit lié à un « incident » rapporté par la presse irlandaise en décembre dernier, lorsqu’un sous-marin russe a été repéré « juste à l’entrée du port de Cork », non loin du canal de Saint-Georges.
Cela dit, l’intérêt de la marine russe pour la mer d’Irlande remonte à un peu avant le début des hostilités en Ukraine. En effet, en mai 2021, le ministre britannique de la Défense (MoD) de l’époque, Ben Wallace avait confié qu’un sous-marin appartenant apparemment à la classe Kilo y avait été repéré quelques mois plus tôt. « Cela n’était pas arrivé depuis très longtemps », avait-il souligné, sans entrer dans les détails.
« L’ampleur des mouvements des sous-marins (russes) dépasse ce que les responsables britanniques avaient observé jusqu’à présent », ont indiqué les sources de l’agence de presse. Deux d’entre elles ont précisé que les autorités américaines avaient été informées.
Comme d’habitude, le ministère de la Défense a déclaré qu’il ne ferait « aucun commentaire » sur ces opérations. Il en va de même du côté américain.
Pour rappel, avec un déplacement de 3 950 tonnes en immersion, un sous-marin de type Kilo est notamment équipé de 4 missiles de croisière Kalibr (code OTAN : SS-N-27 Sizzler), de 18 torpilles de 533 mm et de 24 mines. Doté d’une autonomie de 45 jours, il peut naviguer à une vitesse de 20 nœuds en immersion. De plus, il est réputé très silencieux, au point d’être surnommé le « trou noir » par l’US Navy. En 2017, l’un d’entre eux, le B-265 Krasnodar, lui a donné du fil à retordre en Méditerranée…
Deux ans plus tard, le journal The Telegraph faisait écho aux inquiétudes exprimées par les responsables de la Royal Navy. « On craint que les nouveaux sous-marins russes Kilo puissent menacer la sécurité du Royaume-Uni en traquant la flotte britannique sans être détectés dans l’Atlantique Nord ou en espionnant les câbles de communication sous-marins », résumait-il.