Pour les enquêteurs de la PJ, « c’est toujours le sujet numéro un, la priorité absolue ». Deux mois se sont écoulés depuis l’évasion ultra-violente de Mohamed Amra. Les policiers de l’Oclco (Office central de lutte contre le crime organisé) sont « pleinement mobilisés » pour retrouver le récidiviste et les membres du commando lourdement armé qui ont ouvert le feu sur le convoi pénitentiaire au péage d’Incarville (Eure), tuant au passage deux agents.
Les pistes ne manquent pas. Mais selon une source proche du dossier, la police est, à ce stade, « dans le brouillard ». « Pour l’instant, nous ne parvenons pas à le localiser. Nous ne savons pas s’il est en France ou à l’étranger. Mais nous allons l’arrêter, j’en suis sûr. »
Sous pression, la police judiciaire a lancé mercredi un appel à témoins pour identifier les voitures utilisées par « la Mouche » et ses complices qui ont incendié une Audi S5 blanche et une BMW Série 4 noire à quelques dizaines de kilomètres du lieu de l’attaque. « Nous y réfléchissions depuis longtemps pour vérifier que nous n’avions pas raté un témoignage important », poursuit notre source.
«Ils vont faire des erreurs.»
Ces informations permettraient aux enquêteurs de la BNRF (Brigade nationale de recherche des fugitifs) et de la BNRDT (Brigade nationale de répression du banditisme et des trafics), chargés des investigations, de suivre une nouvelle piste et de recoller les fils en exploitant les images des téléphones et des caméras de surveillance.
Les policiers ont travaillé sur « l’entourage élargi » de Mohamed Amra, interrogé ses parents et sa compagne, et procédé à quelques perquisitions. Ils ont également tenté d’identifier les membres de l’équipe qui l’ont aidé à s’échapper. Selon nos informations, les policiers excluent désormais l’implication de malfaiteurs marseillais dans l’opération. Il s’agit de « personnes issues de son environnement normand, qui sont dans son domaine de compétence », souligne notre source. Et cette dernière d’ajouter : « Ils feront des erreurs à un moment donné et nous les localiserons. Pour l’instant, ce n’est pas vraiment le cas ».
« La routine crée un fossé »
Ancien chef de la police judiciaire de Versailles, Jean-Marc Bloch estime lui aussi que le fugitif et ses complices commettront, un jour ou l’autre, une erreur qui entraînera leur chute. « Au début, c’est vraiment verrouillé, c’est sûr. Le type qui est en cavale, il ne bouge pas d’oreille, tout le monde autour de lui est très prudent. Mais il faut qu’ils communiquent. Ils sont extrêmement prudents et utilisent des téléphones dédiés. Et puis au bout d’un moment, comme dans toute entreprise humaine, l’attention se relâche. L’habitude prend le dessus sur la prudence, et des erreurs sont commises. On téléphone avec le mauvais téléphone, on se parle », raconte-t-il. 20 minutes cet ancien policier expérimenté qui a notamment dirigé la BRB et la BRI à Paris.
C’est « la routine qui crée une faille », poursuit cet ancien flic aguerri. Selon lui, Mohamed Amra pourrait aussi être dénoncé car « dans le milieu de la drogue, il y a beaucoup d’informateurs, la concurrence est rude ». Mais, selon son expérience, « le point faible » des criminels en fuite reste les femmes, qu’ils sont tentés de revoir à un moment ou à un autre. « Presque à chaque fois, c’est en surveillant des jeunes femmes qu’on a retrouvé les fugitifs », rappelle-t-il.
La méthode a souvent porté ses fruits par le passé. Comme nous l’a indiqué une source policière, un fugitif marseillais a été interpellé parce que sa femme avait pris rendez-vous chez une esthéticienne. Un signe, pour les enquêteurs qui la surveillaient, qu’elle allait avoir un rendez-vous galant.