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La nuit traîne : critique d’une course folle

La nuit lui appartient

Mady (Jonathan Feltre, immédiatement charmant) est étudiant le jour et serrurier la nuit. En quelques minutes, Michiel Blanchart laisse entrevoir la bonhomie évidente de son protagoniste, fan de Petula Clark, résiliente face à un quotidien qu’on imagine difficile. D’un naturel bon enfant, le jeune homme accepte un soir de dépanner une femme, mais la porte qu’il ouvre n’est pas la sienne. L’inconnu en profite pour lui voler un sac rempli d’argent avant de s’enfuir, et Mady se retrouve mêlé aux affaires d’un gang. mené par un certain Yannick (Romain Duris, brillant et dérangeant).

S’il ne trouve pas l’argent avant le lever du soleil, c’est lui qui aura des ennuis. Simple, carré et surtout diablement efficace, La nuit s’éternise trouve dans son compte à rebours la source d’adrénaline idéale pour sa série d’aventures, transformant pour l’occasion les rues de Bruxelles en un labyrinthe captivant. Si un plan drone choisit de retourner la ville sur elle-même pour la plonger dans une pure dimension de film de genre, Blanchart ne se livre pas à cette déclaration d’intention un peu facile.

Une offre qu’il ne peut pas refuser

À coup sûr, Son premier long métrage impressionne par son stylequi ne recule devant aucune prise de risque spectaculaire. Soutenu par le soutien à la production de Gaumont, La nuit s’éternise tire de ses courses-poursuites une véritable chorégraphie, et s’offre quelques jolis moments de bravoure devant la caméra, comme ce plan séquence qui suit Mady sur son vélo alors qu’elle fonce dans une station de métro.

Le réalisateur évite cependant le piège récurrent des premières œuvres et leur côté show-off qui catalogue leurs références et leurs prouesses. Blanchart assume ses inspirations (un peu de Fincher ici, pas mal de Après les heures de Scorsese), et les digère du mieux qu’il peut pour garder en vue la tension de son concept.

Si ses effets les plus explicites traduisent une ambition enivrante, la sobriété générale de sa mise en scène est portée par une sobriété et une économie au service du rythme. En plus d’exploiter avec grand soin la topographie de ses décors, Le film dépouille son montage au maximumpour faire de chaque séquence un coup de poing en attendant la suivante.

C’est à ce moment-là que Jackson a su… qu’il avait tout gâché.

Course des vies noires

On pourrait penser que ce sentiment d’urgence et de panique serait le strict minimum dans la plupart des thrillers de ce type. Mais le succès de La nuit s’éternise met en évidence ce qui manque à beaucoup de ses concurrents : empathie envers son personnage principal. Trop gentille mais lucide, Mady est soudain obligée de réagir à toute cette agitation qui lui tombe sur le visage. Plus la situation est désespérée, plus sa manière d’être révèle sa véritable personnalité, et les conséquences de ses choix.

Michiel Blanchart est aussi conscient que son récit dépend d’un pivot précis. Alors qu’il se sait pris au piège par cette histoire de banditisme, son héros a la possibilité d’appeler la police. Mais il se retient, au dernier moment, par peur du traitement qu’il pourrait subir en tant qu’homme noir que tout accuse.

A cela s’ajoute le contexte que le réalisateur choisit comme toile de fond de sa course-poursuite effrénée : une manifestation antiraciste, en réponse à une bavure policière. Mady, jusque-là cachée derrière les écrans de télévision ou les stations de radio qui relaient cette information, se retrouve propulsée dans cette réalité hyper violente. On le voit venir, mais il est difficile de ne pas se réjouir lorsque Blanchart convoque cette foule en colère au cœur de cette fuite en avant.

Rappelons-le : les jeunes énervent le RN

Au-delà du renouvellement de la scénographie, la séquence voit Mady se laisser emporter dans un flow, image d’une société qui a toujours discrédité et écrasé cette jeunesse racialisée. Le constat est d’autant plus dur quand on voit à quel point les rues de Bruxelles sont vides le reste du temps. Sans personne pour l’aider, le personnage est poussé à l’action, comme jamais auparavant.

En fait, ce glissement n’empêche pas un léger point faible à mi-parcours, aisément pardonnable compte tenu de l’efficacité globale du scénario. Plutôt que d’alourdir son thriller d’un discours indigné sur le racisme systémique et cruel, Michiel Blanchart met cette brutalité en pratique dans cette nuit d’horreur.qui vaut mille mots.

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.

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