la nuit où Kendji Girac a frôlé la mort après un tir par arme à feu
Dans son titre Marie, MarieKendji Girac demande à une compagne de fiction ce qu’elle « veut faire dans le noir ». Derrière les portes closes d’une caravane, garée dans un camp de Voyageurs à Biscarrosse (Landes), la réalité a soudain pris le dessus sur ses propos. Sur fond de dispute conjugale, de consommation d’alcool et de drogue, le chanteur, vainqueur de « The Voice » en 2014, a été retrouvé grièvement blessé dans la nuit du dimanche 21 avril au lundi 22 avril.
Cinq jours après cette blessure par balle, la suite des événements commence à se préciser. Transporté à l’hôpital après l’intervention des secours lundi matin, le chanteur et guitariste a d’abord qualifié d’accidentel le coup de feu qui lui a perforé la poitrine, avant d’évoquer une mise en scène de tentative de suicide. L’enquête ouverte par le procureur de Mont-de-Marsan, Olivier Janson, pour « tentative d’homicide volontaire », a fait la lumière sur ses agissements.
Une douzaine de verres d’alcool
Selon le récit d’Olivier Janson, qui a longuement détaillé devant la presse les événements qui se sont déroulés jeudi, Kendji Girac était attablé avec son épouse Soraya Miranda et leur fille de 3 ans, en compagnie d’amis, dimanche, à Arcachon (Gironde) , pendant le déjeuner. « Dès le début de la journée, il était très excité et j’ai vu qu’il avait envie de boire », raconte sa compagne aux enquêteurs. Bières, apéritif anisé, rosé, vin rouge, poire… Au total, le chanteur consomme « près d’une douzaine de verres » pendant ce repas tardif.
« La réalité est qu’il a beaucoup bu toute la journée de dimanche. »
Olivier Janson, procureur de Mont-de-Marsanlors d’une conférence de presse
Ce jour de« Alcoolisme massif »estimé à plus de 2,5 grammes d’alcool par litre de sang au moment de la fusillade, se poursuit par une soirée couscous, encore une fois édulcorée, au camp. « C’était les vacances, j’ai tout laissé tomber », a reconnu Kendji Girac mercredi devant les enquêteurs. L’auteur de Couleur Gitano Et Andalou cache en fait une addiction à l’alcool décrite comme « naissant » par le procureur. « Ses combats étaient de plus en plus nombreux et plus longs et pouvaient durer jusqu’à 48 heures », rapporte Olivier Janson. Ils donnent également lieu à « de grandes tensions dans le couple ». Pour éviter une nouvelle dispute, Soraya Miranda quitte la soirée, invoquant la fatigue de leur petite fille. Elle rentre à la caravane à 20h30 tandis que Kendji Girac, passionné de blackjack, va rejoindre un groupe de jeunes au casino de Biscarrosse.
Le chanteur a voulu « faire peur » à sa compagne
Aucune nouvelle n’a été échangée par le couple jusqu’au retour du chanteur au camp, vers 2h35 du matin. Si aucun incident n’est signalé lors de ce déplacement, Kendji Girac avoue avoir consommé « deux petites traces de cocaïne »drogue qu’il prend « une fois ou deux fois par semaine », selon le procureur, citant Soraya Miranda. Pendant que la jeune femme et sa fille s’endorment dans la caravane, dans le même lit, et non dans celui de l’enfant placé dans la partie salon du véhicule, le chanteur continue la nuit dans le camp, auprès de ses proches, avec qui il partage quelques chansons. L’alcool coule à nouveau. Il retourne ensuite à la caravane, « ivre », à 2h35. Cette entrée bruyante réveille l’enfant du couple. Une dispute éclate, au cours de laquelle Soraya Miranda lui reproche son ivresse. Le chanteur se réfugie alors dans son SUV, à quelques mètres, puis met la musique « très fort » pour écouter des hymnes. Exaspéré par le bruit, son partenaire lui demande d’arrêter.
Plutôt que de l’écouter, le chanteur prend le volant. Averti par la compagne de Kendji Girac, le père du chanteur retrouve son fils sans même sortir du camp et le convainc d’aller dormir. D’autant plus qu’il doit partir en Suisse le lendemain et qu’il a un avion « à 7 heures du matin ». A 3h30, l’artiste réapparaît dans la caravane. Son compagnon le retrouve, en sous-vêtements, au chevet de sa fille, en lui disant qu’il l’aime. En fumant une cigarette, Soraya Miranda entend Kendji Girac pleurer. Mais l’État « agité » du chanteur, qui empêche sa fille de dormir, provoque un nouveau conflit. « Ma femme n’était pas très contente »l’artiste rapporte aux enquêteurs.
« Elle lui a expliqué que, dans ces conditions, elle avait décidé de partir et qu’elle devait choisir, que ce serait elle ou lui, mais que l’un des deux devrait partir. »
Olivier Janson, procureur de Mont-de-Marsanlors d’une conférence de presse
C’est alors que Kendji Girac, « qui n’a jamais été violent envers sa compagne ou sa fille », selon les mots de son compagnon, change de ton. Il se met en colère, commence à frapper les murs. Avec sa fille, Soraya Miranda est rentrée dans la chambre, la porte n’étant pas complètement fermée. Elle entend alors le musicien, seul dans le salon, ouvrir et fermer les placards. Il est 5h30 du matin. Un coup de feu retentit. Paniquée, Soraya Miranda quitte la pièce et retrouve son compagnon « un genou à terre, en gémissant » avec un « arme terrestre ». UN « odeur de fer » envahit l’espace. Elle court immédiatement dehors, se dirige vers la caravane voisine et demande de l’aide pour qu’on l’appelle.
Selon l’expertise balistique réalisée, un trou d’entrée de la balle à l’intérieur d’un canapé a été identifié, ainsi qu’un trou de sortie à l’extérieur de l’habitacle de la caravane. Kendji Girac se lève « à proximité immédiate » de ce mur au moment du tir. Il évoque « une forme d’impulsion » qui consiste à « vouloir effrayer ta femme » en simulant une tentative de suicide, « l’impressionner ». Ce chantage n’est pas nouveau puisqu’il « avait dit dans le passé qu’il allait se tirer une balle ou se trancher la gorge lors d’une dispute »selon Soraya Miranda.
« Désolé seigneur, que s’est-il passé? »
Selon lui, avant de tirer, Kendji Girac n’a pas vérifié si le chargeur contenait des munitions. Il le croit « vide », avant de prendre l’arme. Il pointe le canon sur sa poitrine et tire. « Je voulais faire sonner la gâchette, j’ai perdu le contrôle », avouera-t-il plus tard, lors de son audition. À bout portant, la balle a perforé sa poitrine, pénétrant par son mamelon gauche. Elle ressort dans son dos, entre la neuvième et la dixième côte, selon l’expertise du médecin légiste, rapportée par le procureur. Un voyage « miraculeux »car si son poumon est perforé, sa rate et son diaphragme touchés, son cœur est épargné.
« Personne n’a été témoin de la fusillade. Tout le monde a dit avoir été réveillé, certains par le bruit de la fusillade, d’autres par les cris de la petite fille de Kendji Girac., explique le procureur. Kendji Girac a été retrouvé prostré et silencieux sur une chaise, peu avant 6 heures du matin, par les pompiers arrivés sur place. « Personne ne peut expliquer qui l’a amené sur cette chaise ni s’il a réussi à y arriver tout seul », ajoute le procureur. Un membre de la communauté entend le chanteur dire : « Désolé seigneur, que s’est-il passé? »
Le pistolet, initialement disparu, a finalement été retrouvé dans un buisson à proximité de la caravane de Kendji Girac. Cinq jours après cette nuit encore trouble, Kendji Girac est tiré d’affaire. Aujourd’hui, il dit qu’il suppose « ce qu’il a fait en le regrettant beaucoup », constate Olivier Janson. L’information judiciaire n’est pas terminée, mais n’a pas vocation à se poursuivre, selon le procureur. Parce que, « Ni un suicide simulé qui a mal tourné, ni une véritable tentative de suicide ne constituent une infraction pénale. » Sauf nouveaux développements, les poursuites judiciaires pourraient être « très bientôt » arrêté.