Santé

« La nuit, j’avais l’impression que j’allais mourir à force de ne pas dormir » : Océane raconte sa dépression post-partum

Quelques mois après la naissance de sa fille, Océane a souffert d’une dépression post-partum qui a duré deux ans. Avant de parvenir à mettre des mots sur ce qui lui arrivait, et à se remettre sur les rails, il lui a fallu du temps et un bon accompagnement.

La dépression post-partum peut affecter 16,7% de femmes selon l’enquête nationale périnatale 2021. Mais cette maladie est encore parfois sous-diagnostiquée, et il n’est pas toujours facile d’obtenir l’accompagnement et les traitements nécessaires pour en guérir. Comment sortir de la dépression post-partum ? Océane* témoigne.


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Une histoire, mais aucun signe avant-coureur

Océane a vécu un très long épisode dépressif durant son adolescence, traité seulement l’année de ses 18 ans. J’ai suivi un traitement pendant 3 ans, puis j’ai continué la psychothérapie pendant encore plusieurs années. Ma dépression a été traitée, j’avais une santé mentale stable, quelques problèmes d’anxiété mais j’allais bien. » Soulagée d’avoir suivi une thérapie en profondeur, Océane aborde sereinement la maternité lorsqu’elle tombe enceinte.

J’ai eu une super grossesse, je me sentais bien. J’ai été arrêtée peu avant mon congé de maternité parce que j’étais harcelée au travail. Normalement j’aurais énervé mon patron, là j’étais un peu plus fragile mais ce n’était pas un signal d’alarme, j’étais calme.

Dans les premiers mois qui ont suivi la naissance de sa fille, malgré la fatigue et les souvenirs vifs d’un accouchement compliqué, Océane n’a ressenti aucun syndrome dépressif.  » Mon partenaire et moi sommes restés à la maison pendant cinq mois, il avait pris un congé parental et j’étais entre deux emplois. Je pense que si nous n’avions pas eu ces conditions, j’aurais coulé beaucoup plus tôt. »


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L’arrivée des phobies impulsionnelles

 » Je pensais constamment à ma naissance et j’avais beaucoup de phobies impulsives. » se souvient Océane, évoquant ces pensées intrusives dans lesquelles on se voit faire du mal aux autres, ou à soi-même, sans en avoir l’intention. « Je savais que ça existait donc je n’étais pas inquiet. Lorsque je suis revenue au travail, alors que ma fille avait 6 mois, la situation s’est dégradée. J’étais épuisée, j’allaite la nuit, je ne dormais pas bien et elle ne s’endormait pas seule, ça me rendait folle ! J’ai commencé à avoir de plus en plus de phobies impulsionnelles, et elles ont pris une nouvelle tournure : ce sont des phobies impulsionnelles incestueuses.. »

La jeune maman se demande alors si elle ne devient pas folle, et ressent le besoin de demander de l’aide. Plusieurs autres signes avant-coureurs l’alertent : des pleurs dès le réveil, des insomnies, une anxiété accrue et des crises d’angoisse la nuit.

 » Je ne supportais plus de me réveiller la nuit, c’était très dur. La nuit, j’avais l’impression que j’allais mourir faute de dormir. Mais je ne voulais pas mettre le mot dépression sur mon état, ça me faisait peur. Pourtant, avec le recul, j’avais raison. »


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L’appel à l’aide

« J’ai consulté un psychologue spécialisé en périnatalité avec qui j’ai commencé une thérapie. Elle m’a aidé à gérer mon anxiété la nuit, sans résoudre le problème, mais cela a réduit mes phobies impulsives. Je pensais constamment au sommeil, c’était devenu un sujet central de discussion avec mon partenaire. »

Un an plus tard, Océane attrape le Covid et traverse deux épisodes de décompensation psychologique déclenchés par cette infection.  » Il s’agissait de deux épisodes dépressifs ultra violents, mais aussi ultra courts, d’une durée d’environ six heures, avec des idées suicidaires.. » Ces événements ont poussé la jeune femme à consulter son médecin, qui lui a prescrit des anxiolytiques et des antidépresseurs à petites doses.  » La question du sommeil de ma fille restait très délicate, j’avais encore pas mal d’instabilité émotionnelle, avec beaucoup de pleurs. Dans mon cas, la thérapie n’était pas suffisante. »


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Remonter la pente

« Mon médecin m’a expliqué que le manque de sommeil était un facteur de dépression et que j’avais également une mauvaise gestion de la sérotonine. Lorsqu’on a déjà eu des problèmes de santé mentale, on est plus à risque de souffrir de dépression post-partum. Et le manque de sommeil fait tout exploser. » Il lui explique également qu’elle souffre d’un trouble dépressif récurrent, qui se manifestera à nouveau à d’autres occasions, par exemple lors de la périménopause.

Après trois semaines de traitement, Océane se sent à nouveau vivante.  » Je me demandais pourquoi je ne l’avais pas pris avant. Pendant deux ans, j’ai vécu sur un fil, en équilibre, et soudain j’ai eu l’impression de marcher à plat sur la route. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé que j’étais déprimé depuis que ma fille avait 6 mois.. J’aurais aimé être diagnostiqué plus tôt. Je ne voulais pas que cela m’arrive à nouveau au point d’en être dans le déni.

Savoir que le problème était chimique, que mon cerveau ne fonctionne pas bien et a besoin d’un traitement a été un immense soulagement, je me suis senti moins coupable, c’est comme lorsqu’un autre organe fonctionne mal et a besoin d’un traitement. ‘un traitement. »

La prise d’antidépresseurs, combinée à la poursuite de sa psychothérapie pour traiter la dépression en profondeur, a aidé Océane à s’en sortir progressivement.  » Avec le traitement, j’ai découvert que je pouvais m’occuper de ma fille la nuit sans m’énerver, sans perdre patience, ce fut un changement radical. »

Sortir de la dépression post-partum

Aujourd’hui, Océane dit avoir surmonté la dépression post-partum. Mais sa fille se réveille encore la nuit, la situation reste fragile et elle continue son traitement antidépresseur.  » Au printemps dernier, elle a recommencé à avoir de sérieux problèmes de sommeil et nous avons dû augmenter ma dose de traitement pour y faire face. Je suis en train de la refuser, et j’aimerais arrêter quand elle dort très bien, même si cela prend encore des années. »

En plus d’un soutien médical et psychologique, Océane a trouvé de l’aide auprès de l’association Maman Blues, qui propose un espace d’échange avec des mamans en souffrance.  » J’ai eu une visioconférence qui m’a vraiment libéré, notamment au sujet des phobies impulsionnelles. Avant même que j’en parle, un membre de l’association a évoqué l’existence de phobies pulsionnelles de l’inceste, et une autre mère a dit en avoir aussi. je me suis dit  » Je ne suis pas fou, je ne mets pas ma fille en danger en la gardant avec moi ! » C’est une phobie impulsionnelle comme une autre, elle est souvent le symptôme d’un trouble anxieux ou dépressif, il ne faut pas hésiter à consulter ! »

Ce contact avec l’association a été une première étape pour Océane, dès les premiers signaux d’alarme ressentis, et a légitimé sa décision de consulter un psychologue.  » Il ne faut pas non plus minimiser le rôle du manque de sommeil et ses effets chimiques, même si comme moi nous avons l’impression d’être blindés en termes de travail sur nous-mêmes. Ce n’est pas pour cela que nous ne risquons pas de connaître un épisode dépressif. »

Si vous vous reconnaissez dans ce témoignage, n’hésitez pas à en parler avec votre médecin.

*Le prénom a été modifié

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Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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