Le territoire français du Pacifique a connu ces derniers jours une forte mobilisation contre une réforme constitutionnelle examinée ce lundi à l’Assemblée, à laquelle s’opposent les indépendantistes.
« Je ne veux pas qu’il y ait de morts ici ». Le représentant de l’Etat français en Nouvelle-Calédonie a haussé le ton ce lundi, à la télévision publique locale. Alors que des manifestations secouent depuis plusieurs jours ce territoire français de l’océan Pacifique, le Haut-commissaire de la République, Louis Le Franc, équivalent du préfet dans les départements, a dénoncé les nombreuses violences et dégâts sur l’archipel dans la nuit de dimanche à Lundi.
« Des armes automatiques, des armes de poing, des fusils de chasse, des fusils de gros calibre sont utilisés par ces jeunes », a-t-il indiqué, ajoutant que plusieurs dizaines de voitures avaient été incendiées et que 25 personnes avaient été interpellées, dont 10 lundi. Plusieurs supermarchés ont été pillés à Nouméa. De nombreux incendies se sont déclarés dans la ville, notamment dans une importante usine spécialisée dans l’embouteillage, entièrement ravagée par les flammes dimanche vers 22 heures. D’autres incendies se sont déclarés dans les quartiers voisins.
Depuis la nuit, gendarmes et policiers mobiles affrontent de jeunes manifestants masqués ou cagoulés, qui ont investi plusieurs ronds-points. Des incendies ont été allumés sur la route pour gêner la circulation tandis que des tirs de lance-balles défensifs et de grenades de désencerclement ont été entendus dans toute la ville.
Dégel de l’électorat
Ce lundi, l’Assemblée nationale examine un projet de réforme constitutionnelle déjà validé par le Sénat. Celui-ci prévoit d’ouvrir les élections provinciales aux résidents résidant depuis au moins dix ans. Instauré en 1998 par l’Accord de Nouméa, le corps électoral est en effet gelé, ce qui a pour conséquence, 25 ans plus tard, de priver du droit de vote près d’un électeur sur cinq.
Les indépendantistes s’opposent à ce texte de loi accusé de « minimiser encore davantage le peuple autochtone kanak », et appelé, à travers la Cellule de coordination des actions sur le terrain (CCAT), à l’intensification de la mobilisation en cas d’adoption du projet de loi, sans toutefois préciser de calendrier ni la nature des actions futures. Dans la journée, le Congrès de Nouvelle-Calédonie a manifesté son opposition au projet en adoptant une résolution exigeant le retrait de la réforme.
Le GIGN engagé
«Je vais engager le GIGN»a également annoncé Louis Le Franc. « S’ils se trouvent dans une situation où des coups de feu sont tirés contre eux, ce qui constitue une réaction de légitime défense… alors je préviens (les jeunes manifestants)Je ne veux pas avoir de morts ici », a-t-il déclaré, signalant également que des renforts de la gendarmerie mobile étaient attendus sur place. Dans un précédent communiqué, Louis Le Franc avait également annoncé une interdiction de vente d’alcool à compter de mardi.
Mutinerie dans une prison
Selon Le premier, une mutinerie a eu lieu à la prison de Camp-Est, entraînant l’évacuation d’un lycée voisin et de l’université de Nouville. Un acte de vandalisme a également provoqué une coupure de courant, privant de courant 39 foyers entre 4h30 et 10h du matin au Mont-Dore.
Outre les blocages sauvages mis en place par les manifestants sur plusieurs routes du territoire, un aérodrome a été bloqué sur l’île des Pins. « Ces mesures, bien que sévères et exceptionnelles, sont cruciales pour faire entendre notre voix dans la défense de notre peuple et de notre souveraineté. » ont déclaré les bloqueurs, annonçant qu’ils poursuivraient leur action mardi. Plusieurs événements sportifs et culturels ont été annulés sur l’archipel.
Des manifestants se sont également rassemblés devant le tribunal correctionnel de Nouméa où huit membres du CCAT devaient être présentés en comparution immédiate pour entrave à la circulation et dégradations. L’audience a finalement été reportée dans la journée, au 6 août.