La NASA et Boeing poursuivis en justice
jePartis dans l’espace pour quelques jours de vol, les voilà coincés dans la Station spatiale internationale (ISS) depuis plus de deux mois. Mercredi 7 août, la Nasa est sortie du déni et a publiquement admis que ses deux astronautes, Barry Wilmore et Sunita Williams, étaient coincés dans la station orbitale. La faute à leur vaisseau, le tout nouveau Starliner de Boeing, à bord duquel ils assuraient le premier vol habité.
Le 6 juin, le duo d’astronautes a dû tenter à deux reprises de l’arrimer à l’ISS, en raison de la défaillance de cinq des vingt-huit propulseurs qui contrôlent la trajectoire du Starliner. Quatre de ces appareils ont redémarré, mais leur panne a suscité des soupçons. Et s’ils tombaient à nouveau en panne lors de la délicate manœuvre de désamarrage, la capsule ne risquerait-elle pas de heurter la station et de mettre en danger ses occupants ? Et si ces propulseurs ne répondaient pas aux ordres de désorbitation et de poussée vers la Terre, qu’arriverait-il à Wilmore et Williams ?
Une humiliation pour l’avionneur américain
Ce qui n’est pour l’instant qu’un incident met en lumière deux points. D’abord, que l’espace habité, malgré ses apparences routinières, reste un domaine à haut risque où rien ne doit être laissé au hasard. Ensuite, que Boeing, déjà mis en cause dans plusieurs enquêtes du régulateur de l’aviation aux Etats-Unis pour les défaillances de ses appareils, a définitivement un problème de fiabilité, y compris dans le secteur spatial. Ce premier vol habité arrive avec sept ans de retard sur le programme initial alors que le constructeur a accumulé les problèmes techniques, notamment lors du premier vol d’essai à vide du Starliner en 2019, au cours duquel la capsule n’avait même pas pu s’arrimer à l’ISS.
Les ennuis de Boeing sont aussi ceux de la Nasa, sponsor du Starliner, dont les premières missions ont été payées 4,2 milliards de dollars (3,8 milliards d’euros). Depuis plusieurs années, l’agence spatiale américaine confie en effet au secteur privé la conception des vaisseaux chargés d’acheminer humains et équipements vers la Station spatiale internationale. À la fois pour se concentrer sur des destinations plus lointaines (comme la Lune ou Mars), pour faire des économies et pour donner un coup de pouce aux industriels américains. Notamment aux start-up du « New Space », les nouveaux acteurs de l’industrie spatiale dont la figure de proue est la société d’Elon Musk, SpaceX, qui profite à plein de ce changement de politique.
Une politique dont la NASA connaît aujourd’hui les limites. Autant elle est sponsor, autant l’agence spatiale a placé ses programmes entre les mains de fournisseurs dont elle achète les services clés en main mais qu’elle ne peut plus contrôler comme elle le faisait autrefois. Pour ces mêmes raisons, le retour des Américains sur la Lune, initialement prévu en 2025, déjà repoussé à 2026, pourrait bien n’avoir lieu qu’en 2028.
Pour l’heure, pour « libérer » Barry Wilmore et Sunita Williams, la Nasa envisage sérieusement de faire appel au grand concurrent de Boeing, SpaceX, et à sa capsule Crew Dragon, qui n’a connu aucun problème depuis sa mise en service en 2020. Cette solution serait à la fois une humiliation pour l’avionneur américain et une consécration pour l’entreprise d’Elon Musk. Le milliardaire multiplie depuis peu ses interventions d’extrême droite via son réseau social X. Il pourrait alors se vanter à juste titre d’avoir participé au sauvetage des deux astronautes naufragés.