Elle s’est endormie en cours. Un classique chez les ados qui passent la moitié de la nuit sur leur téléphone portable. Sauf que pendant le confinement, elle a en réalité dormi deux jours entiers, sans manger. Puis sont arrivés les troubles de la cataplexie : « Quand je ris, comme si j’éclatais de rire, j’ai la tête qui lâche et je dois me tenir à quelque chose pour ne pas m’effondrer… » raconte Mathilde, 23 ans, patiente à la clinique du sommeil du CHU de Bordeaux. A ce stade des symptômes, la jeune fille a consulté au 13e étage de l’hôpital Pellegrin, ce service spécialisé dirigé par le professeur Pierre Philip, l’un des cinq centres de référence de la narcolepsie en France. Anna s’est retrouvée là parce qu’elle a fait une recherche sur internet et a constaté qu’elle remplissait tous les critères de la narcolepsie. « J’ai été testée et le diagnostic a été posé : narcoleptique de type 1, avec cataplexie. Cette maladie a des répercussions dans ma vie professionnelle et personnelle. Mais le fait que ma maladie soit reconnue m’a permis d’arrêter de me sentir coupable de m’endormir. J’ai beaucoup douté. Mais quand on s’endort sur son vélo au feu rouge…
Des endormissements répétés, en public, en classe, en réunion. Plusieurs fois par semaine. Comme Mathilde à Bordeaux, près de 20 000 personnes en France souffrent de narcolepsie, une maladie qui apparaît généralement entre 15 et 20 ans. Si la somnolence est associée à d’autres symptômes, prise de poids, hallucinations, paralysie du sommeil et cataplexie, c’est-à-dire une perte de force musculaire liée à des émotions fortes, la colère ou le rire, alors la maladie sera classée dans le type 1. « La narcolepsie, explique le professeur Pierre Philip, est une maladie auto-immune d’origine génétique et environnementale dont les symptômes sont causés par la destruction d’une catégorie particulière de neurones, ceux qui synthétisent l’orexine, autrement appelée hypocrétine, un neurotransmetteur dont le rôle principal est de stimuler l’éveil. »
Espoir d’un essai thérapeutique
À Montpellier, l’autre Centre de référence pour la narcolepsie et l’hypersomnie rares (Inserm/Université/CHU de Montpellier) dirigé par le neurologue Yves Dauvilliers, des travaux de recherche sur cette maladie ont abouti à une étude prometteuse, avec le laboratoire Takeda. Les résultats de cette étude ont été publiés l’an dernier dans le New England Journal of Medicine car un médicament a été développé qui pourrait réellement guérir les patients. Il s’agit d’un agoniste (une substance qui a les mêmes effets) des récepteurs de l’orexine 2. « Ce nouveau traitement est une vraie opportunité, car il booste la production d’orexine et améliore voire fait disparaître tous les symptômes de la maladie, assure le professeur Pierre Philip à Bordeaux. Nous avons la possibilité d’intégrer quelques patients dans un essai thérapeutique, qui débutera en octobre. En attendant que le médicament passe tous les filtres des autorisations de mise sur le marché, c’est une opportunité, car les patients inclus dans l’étude pourront bénéficier d’une prescription de ce nouveau médicament pendant deux ans.
Pour participer à l’étude, contactez la clinique du sommeil du CHU de Bordeaux au 05 56 79 56 79