La militante des droits des femmes Mursal Sayas raconte son exil d’Afghanistan, trois ans après le retour des talibans

Le 15 août 2021, les talibans entrent à Kaboul, en Afghanistan, sans résistance. L’activiste Mursal Sayas témoigne sur franceinfo.

Il y a trois ans jour pour jour, le 15 août 2021, les talibans revenaient au pouvoir en Afghanistan, un anniversaire célébré en grande pompe mercredi par un défilé militaire. Une fois à la tête du pays, ils n’ont pas tardé à appliquer la loi islamique de manière ultra-rigoriste, multipliant les mesures liberticides à l’encontre des femmes. Elles sont désormais totalement isolées et exclues de l’espace public. Après l’arrivée des talibans, des centaines de milliers de personnes ont quitté le pays. C’est le cas de Mursal Sayas, militante des droits humains, réfugiée en France où elle vit à Paris depuis trois ans.

Mursal Sayas a un visage radieux, mais un regard triste. Quitter l’Afghanistan a été le choix le plus difficile de sa vie, mais nécessaire pour cette militante des droits des femmes. « Aujourd’hui, c’est tellement dur pour les femmes, elles ne peuvent pas sortir. Les talibans les forcent à se marier : des filles, des adolescentes, des veuves. Les femmes divorcées doivent retourner vivre avec leurs ex-maris violents.se souvient Mursal Sayas. Pour moi, il était essentiel de vivre libre, de ne pas être arrêtée ou torturée par ce gouvernement qui applique l’apartheid de genre. »

Divorcée, la militante de 29 ans laisse derrière elle son fils de 8 ans et sa fille de 5 ans, la loi leur interdisant de quitter leur père et leur pays. Mursal, qui leur parle tous les jours via WhatsApp, ne peut s’empêcher de constater les inégalités entre ses deux enfants. « Ce que mon fils apprend à l’école est tellement misogyne, elle s’indigneMa fille n’a que 5 ans Elle a 10 ans et sait déjà qu’elle ne pourra plus aller à l’école dans quelques années si les talibans sont toujours là. Elle me dit : « Je suis une fille, je n’ai pas le droit »,
et cela me brise le cœur. C’est la génération future et c’est ainsi qu’ils vivent en Afghanistan.

La journaliste et écrivaine Mursal Sayas continue de militer depuis la France pour les droits des femmes en Afghanistan. Mais trois ans après son départ, elle perd patience : « Je suis en colère contre la communauté internationale qui voit ce qui se passe en Afghanistan et ne fait rien. Ils disent qu’ils soutiennent les femmes afghanes, mais ils rencontrent les talibans au sommet de l’ONU à Doha. Qui entendra nos cris ? demande Mursal Sayas dans son livre, qui donne la parole à dix femmes afghanes. « Ne nous oubliez pas »elle insiste.