La Marine nationale veut réduire le « coût par tir » pour épuiser l’adversaire
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La Marine nationale veut réduire le « coût par tir » pour épuiser l’adversaire

La Marine nationale veut réduire le « coût par tir » pour épuiser l’adversaire

Au début de cette année, la marine française a dû justifier l’utilisation de missiles sol-air Aster (15 et 30) pour abattre des drones bon marché lancés depuis le Yémen par les rebelles Houthis contre le trafic maritime en mer Rouge. Et d’expliquer que le coût à prendre en compte n’était pas forcément celui des munitions utilisées mais celui du navire qu’elles contribuaient à protéger.

Cependant, et comme l’a suggéré le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées (CEMA), lors d’une conférence à l’Institut Montaigne, une telle approche n’est pas tenable à long terme. « Si nous voulons gagner la guerre, nous devrons développer des armes d’usure peu coûteuses, aux côtés d’armes de haute technologie qui permettent de gagner la décision », a-t-il expliqué, selon des propos rapportés par l’AFP.

Le chef d’état-major de la Marine nationale (CEMM), l’amiral Nicolas Vaujour, avait exprimé un point de vue similaire lors d’une audition au Sénat en novembre 2023. « L’exemple est le drone qui ne coûte presque rien, mais qui sature et « use » la flotte. la défense aérienne de l’adversaire. Si la question nous était posée, il faudrait réfléchir à notre capacité à durer et à épuiser un adversaire », a-t-il déclaré. Mais « aujourd’hui, nous nous sommes essentiellement appuyés sur des armes de décision », a-t-il souligné.

Ainsi, par exemple, le programme franco-britannique (bientôt rejoint par l’Italie) de Futur missile anti-navire / Futur missile de croisière (FMAN/FMC), qui permettra à terme de remplacer à la fois les Exocet et les Missiles de croisière navals (MdCN). . Par ailleurs, pour ses sous-marins nucléaires, la Marine nationale a exprimé la nécessité de remplacer le missile antinavire à moyen changement SM39 d’ici 2040.

Or, devant les sénateurs, l’amiral Vaujour avait estimé que la « vraie question » était « aussi de disposer d’armes d’usure capables d’épuiser un adversaire (…) afin de déployer (ces) armes de décision au moment opportun pour remporter la victoire. Il s’agit évidemment de fatiguer l’ennemi avant de porter le coup. « Usure et décision : l’une ne va pas sans l’autre. Il y a probablement un nouvel équilibre à trouver de ce point de vue », a-t-il déclaré.

Épuiser l’adversaire nécessite de disposer d’un nombre important de munitions à tirer. Ce qui pose aussi la question de leur stockage, la « Sainte-Barbe » d’une frégate n’étant pas extensible, ainsi que celle de leur coût. La Marine nationale a en tout cas engagé des discussions à ce sujet, comme l’indique le dernier numéro de Cols Bleus.

« La Marine étudie des options avec un « coût par tir » réduit pour augmenter le nombre de munitions tirées. Les travaux portent sur les munitions téléopérées (drones, ndlr), le canon électromagnétique et, à plus long terme, le laser offensif », précise les Cols Bleus.

Concernant les armes laser, la Marine nationale a déjà testé avec succès le système Helma-P de la frégate de défense aérienne Forbin (FDA). Mais s’il suffit à abattre un drone, sa puissance est sans doute encore trop faible pour en faire un « laser offensif ». A moins que Cols Bleus fasse référence au projet BLOOMLASE, qui vise à développer une capacité à aveugler les satellites d’observation depuis le sol.

Quant au canon électromagnétique, dont le principe a visiblement été abandonné par l’US Navy, son développement est en cours au sein de l’Institut de recherche franco-allemand de Saint-Louis (ISL). Mais plusieurs défis technologiques doivent encore être relevés.

« Plusieurs variantes du canon électromagnétique peuvent être envisagées. Celui qui permettrait d’envoyer un projectile sur plusieurs centaines de kilomètres avec une accélération de 100 000 G serait plutôt placé sur une plateforme navale » car « quand on a besoin de tout un mur de condensateurs pour pouvoir stocker et libérer une grande quantité de l’énergie de manière quasi instantanée – comme c’est généralement le cas pour les armes à énergie dirigée, qu’il s’agisse de lasers ou de systèmes électromagnétiques – cela nécessite des infrastructures adaptées », avait expliqué Emmanuel Chiva, le délégué général à l’armement (DGA).

Cependant, réduire le « coût par tir » grâce au laser ou au canon électromagnétique nécessite un investissement initial important. Et on ne parle même pas des dépenses inhérentes au Maintien en Condition Opérationnelle (MCO).

Aussi, à court terme, une des solutions passe par la droneisation. « L’utilisation de drones aériens, de surface et sous-marins dans la Marine est un enjeu crucial pour les années à venir. L’accent est mis sur ces nouvelles capacités pérennes et économiques, capables d’opérer en milieu hostile », note le magazine Cols Bleus, avant de préciser que « des solutions impliquant des drones de combat sont à l’étude ».

Et d’ajouter : « Après avoir donné la priorité à la protection, la Marine envisage désormais, en complémentarité des moyens actuels, de nouvelles capacités offensives basées autour de l’autonomie du drone et de ses capteurs, et d’une capacité létale. sous la surveillance des marins.

Cependant, et comme le confiait récemment l’amiral Vaujour dans les pages du Figaro, aucun programme « majeur » n’a encore été lancé pour l’instant. « Il reste encore beaucoup de domaines à explorer » et « compte tenu de la rapidité des évolutions, une grande agilité d’acquisition est nécessaire pour bénéficier rapidement des innovations », explique-t-il.

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