Depuis des années, le monde ne parvient pas à réduire la faim, et pire, elle augmente. Le dernier rapport des agences des Nations Unies sur l’insécurité alimentaire dans le monde, publié mercredi 24 juillet, le confirme : la faim stagne en 2023 à un niveau très élevé, touchant 9,1 % de la population mondiale, sans aucun progrès depuis deux ans.
Au total, 733,4 millions de personnes souffrent de sous-alimentation chronique, soit 36 % de plus qu’il y a dix ans, selon cette nouvelle estimation du rapport SOFI (État de l’insécurité alimentaire), basé sur les travaux de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), du Programme alimentaire mondial, du Fonds international de développement agricole (FIDA), de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’UNICEF. Il s’agit d’un signal d’alarme, sachant que l’éradication de la faim est le deuxième des Objectifs de développement durable que la communauté internationale s’est fixé pour 2030. « Les objectifs de la « faim zéro » ne seront pas atteints. C’est un terrible constat d’échec. »déplore Pauline Verrière, responsable des systèmes alimentaires à l’ONG Action Contre la Faim.
L’indicateur d’insécurité alimentaire, un concept plus large et qualitatif que la sous-alimentation, qui inclut le fait de ne pas pouvoir se nourrir correctement, montre lui aussi que les efforts stagnent : l’insécurité alimentaire modérée et sévère touche 2,3 milliards de personnes dans le monde, soit 28,9 % de la population mondiale. Une part qui reste quasiment inchangée depuis trois ans. De même, 2,8 milliards d’individus, soit un tiers de la population mondiale, n’ont pas les moyens de payer le minimum nécessaire à une alimentation saine et nutritive.
La répartition des données par grandes régions révèle cependant un tableau contrasté : alors que l’insécurité alimentaire n’a guère changé en Asie – qui compte, en termes absolus, le plus grand nombre de personnes touchées –, elle continue d’augmenter en Afrique, tandis que, pour la deuxième année consécutive, l’Amérique latine et les Caraïbes ont vu leurs indicateurs s’améliorer. « Après la pandémie de Covid-19, la reprise économique a été inégale à travers le mondecommente David Laborde, économiste à la FAO. Toutes les économies n’ont pas redémarré à la même vitesse, notamment les économies africaines. Et même si l’inflation a ralenti, cela ne signifie pas que le pouvoir d’achat des ménages a augmenté.
L’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest font partie des régions où la situation s’est le plus détériorée, avec respectivement la plus forte et la deuxième plus forte augmentation de la faim enregistrée en 2023. « Ce sont des régions qui concentrent des pays structurellement fragiles, en proie à des conflits et à l’insécurité, avec 14 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays sur l’ensemble de la zone, explique Bernard Hien, directeur régional du FIDA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. De plus, avec la pandémie, ils ont concentré leurs efforts sur la réponse sanitaire d’urgence et ont chroniquement sous-investi dans leur agriculture. Dans l’ensemble de la région, l’inflation a atteint en moyenne 12 % en 2023, atteignant 25 % au Nigéria, 38 % au Ghana et 47 % en Sierra Leone.
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