Aussi improbable que cela puisse paraître, l’architecture de l’environnement en milieu urbain pourrait bien jouer un rôle dans la santé de ses habitants.
Tours d’immeubles, façades grisâtres, lignes de chemin de fer, autoroutes… Ces éléments font partie intégrante du quotidien de certains habitants en milieu urbain et pourraient être la cause d’un grand nombre de pathologies.
Car oui, aucune ville n’a véritablement été aménagée en fonction de la santé mentale de ses habitants, notamment pour des raisons économiques. Ainsi, les Docks de Liverpool (Royaume-Uni), les usines d’Osaka (Japon), les anciens bastions industriels de Saint-Etienne (Loire) et Roubaix (Nord), ou Le Havre (Seine-Maritime) avec sa reconstruction d’après-guerre, font partie des endroits qui s’attirent des réputations peu flatteuses sur l’esthétisme de leur architecture.
Mais au-delà de l’esthétisme, nos confrères du média Slate et du magazine américain Wired mettent en évidence l’impact des centres urbains, construits autour du commerce, des industries et des voitures, sur la santé. Ils notent particulièrement une montée alarmante de cancers, diabètes et dépressions chez les personnes vivant dans cet environnement.
Des études menées depuis 1960
Pour vérifier scientifiquement cet impact et le lien de cause à effet des aménagements «laids» des centres urbains, il faut s’appuyer sur la «neuroarchitecture». Cette dernière permet, grâce à des études comportementales et des cartographies cérébrales, de mesurer la réaction de notre corps face à l’urbanisme.
Pour effectuer ces recherches, nos confrères des médias Slate et Wired mentionnent Colin Ellard, directeur du Laboratoire des réalités urbaines à l’université de Waterloo (Canada). Ce dernier mène, depuis quelques mois, une étude internationale axée sur les réponses psychologiques aux façades des bâtiments.
En parallèle, une autre étude, qui se déroule à l’université de Cambridge (Royaume-Uni), se concentre sur la neuroinflammation. Cette dernière pourrait être une conséquence directe de l’architecture des bâtiments sur la santé.
Les études sur l’impact de l’architecture souvent «laide» des villes sur notre santé ne datent pas d’aujourd’hui. Dans les années 1960 et 1970 déjà, l’inadéquation entre l’humain et son habitat était dénoncée par l’autrice et activiste américaine Jane Jacobs et l’architecte danois Jan Gehl. Selon eux, l’urbanisme des villes, son architecture, ou encore les voies rapides, avaient tout d’inhumain. Mais à l’époque, ils manquaient des preuves des effets de l’urbanisme sur la santé.
Un village inspiré du Moyen Âge
Mais aujourd’hui, les conséquences d’un urbanisme morose commencent à faire tache d’huile. Et plusieurs projets commencent à émerger. C’est le cas du projet eMOTIONAL Cities, financé par l’Union européenne.
Ce dernier met au point des cartes sensorielles de Lisbonne (Portugal), Copenhague (Danemark), et Londres (Royaume-Uni), par exemple. L’association Human Architecture and Planning Institute, elle, analyse les villes de New York et Washington, afin d’améliorer l’expérience humaine dans son environnement.
Outre ces études scientifiques, certains sont déjà passés à l’action. C’est le cas d’un «village d’Alzheimer», situé à Dax, dans les Landes, où tout est fait pour contribuer à la santé mentale des habitants. Cet établissement de soins a pour particularité de comporter plusieurs maisons, inspirées des villes bastides, répandues au Moyen Âge. Alors, un retour dans le passé serait-il envisageable pour améliorer la santé des citadins ? C’est en tout cas ce qui pourrait se profiler.