Pendant longtemps, les montages financiers opaques transitant par les paradis fiscaux ont été le cauchemar de la justice française et des services d’enquête spécialisés. Cette complexité tend désormais à se retourner contre ses auteurs, grâce à la montée, depuis 2014, d’une présomption de blanchiment qui renverse la charge de la preuve. Elle impose aux bénéficiaires de montages acrobatiques de justifier de l’origine de l’argent, sous peine d’être poursuivis pour blanchiment.
La saisie, en septembre, de villas de luxe sur la Côte d’Azur appartenant à deux hommes d’affaires d’origine russe en est la parfaite illustration. Elle intervient dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte en mars à l’initiative des gendarmes de la section de recherche de Paris pour « actes présumés de blanchiment aggravé »qui repose sur la découverte d’actifs immobiliers financés par des sociétés situées dans des paradis fiscaux. « La procédure concerne les modalités d’acquisition de biens immobiliers, grâce au recours à des prêts accordés par des sociétés privées, domiciliées à Chypre ou dans les Îles Vierges britanniques »précise le parquet de Paris, sans citer l’identité des personnes impliquées.
Au coeur de l’été, les gendarmes ont effectué, pendant une semaine, « une première salve d’opérations » en présence de deux magistrats financiers de la juridiction de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) du parquet de Paris. Des recherches ont été effectuées « tant dans les études notariales qu’au domicile des accusés » Du côté de la Côte d’Azur, côté français et monégasque, selon une source judiciaire.
Passeports chypriotes
A l’issue de ces opérations, la section financière de Junalco a demandé et obtenu la saisie d’un domaine de 22,5 hectares à Grasse (Alpes-Maritimes), de villas à Saint-Raphaël et Grimaud (Var) et de voitures de luxe. Selon les informations de Mondecet héritage appartient à Ruslan Goryukhin et Mikhail Opengeym, deux hommes d’affaires d’origine russe, titulaires de passeports chypriotes.
M. Goryukhin a longtemps travaillé dans le secteur énergétique russe, à la tête d’entreprises qui ont bénéficié de la manne du géant gazier russe Gazprom. Il dirigeait notamment SGM, une société appartenant à Arkadi Rotenberg, un oligarque russe proche du président russe Vladimir Poutine. L’homme d’affaires « ne fera (…) aucune déclaration et ne fournira aucune information permettant de confirmer ou d’infirmer » informations de Monderépond son avocat Christian Roth, qui précise que son client « réserve ses déclarations » à la justice.
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