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« La hausse des frais de notaire, le dernier clou dans le cercueil de l’immobilier »

« La hausse des frais de notaire, le dernier clou dans le cercueil de l’immobilier »

FIGAROVOX/TRIBUNE – Lors de la réunion des Départements de France à Angers, Michel Barnier a annoncé une augmentation des frais de notaire en 2025. Préjudiciable à l’investissement immobilisé, cette mesure contribue à mettre à mal ce qui fait l’identité française, déplore le professeur de droit fiscal Frédéric Douet.

Frédéric Douet est professeur de droit fiscal à l’Université de Rouen-Normandie.


30 à 40 départements sur 103 seraient en situation de quasi-faillite. Cette situation alarmante résulte d’une forte augmentation de leurs dépenses de fonctionnement et, dans le même temps, d’une réduction des mal nommés « frais de notaire ». Cette appellation laisse en effet entendre qu’il s’agirait de la rémunération de l’officier public et ministériel chargé de la vente. En réalité, les « frais de notaire » sont constitués à 80 % d’impôts répartis entre la commune, le département et l’État (taxe communale de 1,2 %, taux départemental jusqu’à 4,5 %, dont 2,37 % sont reversés directement à l’État), 10% de frais supplémentaires (frais de dossier, cadastre, etc.) et 10% d’honoraires au profit de l’étude notariale. Au total, ces coûts représentent entre 7 et 8 % du prix des logements anciens et 2 à 3 % des logements neufs.

Depuis 2018, l’exécutif et le législateur n’ont cessé de s’en prendre à l’immobilier au motif qu’il symbolise la « rente immobilière » par opposition à « l’économie réelle ». Ces coups ont fini par porter leurs fruits sans que le reste de l’économie ne s’en sorte mieux. Au premier trimestre 2024, le nombre de ventes immobilières a chuté de 23 % sur un an. Seuls 822 000 actes ont été enregistrés durant cette période. Il s’agit du volume le plus faible depuis 2016. En conséquence, les départements ont vu diminuer leur part des droits de mutation à titre onéreux. Celles-ci devraient passer de 16,4 milliards d’euros en 2022 à 10,7 milliards d’euros en 2024.

Ce qui a amené le Premier ministre Michel Barnier à annoncer une augmentation de 0,5% des frais de notaire pour une durée de trois ans, sans tenir compte d’un éventuel retour de la taxe d’habitation déguisé en « contribution liée à la vie en ville ou en village« . Pour un achat immobilier de 200 000 euros, cette augmentation devrait se traduire par 1000 euros de droits supplémentaires. Hormis le fait qu’en matière fiscale, le temporaire a une très fâcheuse tendance à devenir permanent, c’est en réalité une augmentation de 0,5 point qui Cela représente un bond de 11,11% (4,5 à 5%). Conscient de cela, le Premier ministre a laissé entendre qu’il accorderait une concession aux jeunes acheteurs qui auraient été fortement pénalisés par cette hausse. Les « petits hommes gris » n’apprennent jamais de leurs erreurs En matière d’impôts, il ne faut jamais oublier que 1 + 1 ne fait pas toujours 2.


Derrière toutes les attaques contre l’immobilier se cache une idéologie déconstructrice. Tout ce qui constitue l’ADN des Français (famille, immobilier, réserve héréditaire) est vu comme un obstacle dans un monde où tout devrait pouvoir être marchandisé.

Frédéric Douet

Doubler le taux d’un prélèvement n’implique pas nécessairement que son produit soit multiplié par deux. Une pression fiscale trop forte incite les contribuables à reporter leurs transactions, à mettre en œuvre des stratégies d’évasion et de contournement fiscaux, voire à se soustraire à l’impôt. « En toute chose, l’excès est un vice » (Sénèque). Michel Barnier risque donc d’enfoncer le dernier clou dans le cercueil de l’immobilier en augmentant les droits de mutation à titre onéreux. Cela n’est pas sans rappeler les restaurateurs qui, sans se remettre en question, augmentent leurs prix à mesure que leurs clients disparaissent. De nombreux candidats à l’immobilier reporteront ou abandonneront probablement leur projet, en particulier les jeunes actifs déjà accablés par les dépenses. Ce raisonnement est symptomatique d’une technostructure incapable de remettre en cause le modèle qu’elle a construit.

Dans un pays déjà champion mondial des cotisations obligatoires, la vraie question n’est pas de les augmenter encore mais de réduire les dépenses pour mettre un véritable frein au gaspillage de l’argent public. L’argent magique et les services publics gratuits n’existent pas. Derrière chaque euro dépensé par une personne publique se cache un impôt ou une dette. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la vente des biens nationaux a permis aux Français d’accéder à la propriété immobilière. Ceci est ancré dans leurs gènes depuis la révolution de 1789. L’article 17 de la Déclaration de 1789 proclame le caractère inviolable et sacré de la propriété. Louis XVIII l’a bien compris en ne remettant pas en cause la vente des biens nationaux afin d’éviter une contre-révolution.

Derrière toutes les attaques contre l’immobilier se cache une idéologie déconstructrice. Tout ce qui constitue l’ADN des Français (famille, immobilier, réserve héréditaire, etc.) est vu comme un obstacle dans un monde ouvert où tout devrait pouvoir être marchandisé, y compris l’homme lui-même. Tout le monde se souvient du déchaînement de l’indescriptible Pierre Bergé : «Louer son ventre pour avoir un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine, quelle est la différence ? ?« . Les Français savent garder la raison. Ils ne sont pas sensibles à cette idéologie meurtrière pour leur modèle sociétal. Leur investissement favori reste et restera l’immobilier. Il serait donc plus avantageux de baisser les droits de mutation à payer afin de dynamiser ce secteur.

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