La gratuité est-elle l’avenir des transports urbains ?

A Clermont-Ferrand, sa mise en place le week-end est un succès avec une fréquentation en hausse de 36%, et notamment par les familles populaires.
La gratuité des transports urbains est la clé sociale, écologique et urbaine pour révolutionner notre mobilité. Pour permettre à chacun d’accéder à toute la ville quels que soient ses revenus, assurer à chacun le droit fondamental de se déplacer, répondre à l’angoisse de la fin du mois et à celle de la fin du monde, la gratuité des transports répond à de nombreux enjeux de notre temps.
Il donne du pouvoir d’achat aux familles, mais il permet aussi à ceux qui ne demandent pas de tarifs sociaux, les 30 % de personnes qui renoncent aux allocations de solidarité auxquelles ils ont droit, de pouvoir utiliser les transports en commun sans démarche et sans stigmatisation.
De plus, les familles populaires sont les premiers nouveaux utilisateurs des transports gratuits, comme le constatent les chauffeurs de bus. A Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), la mise en place, en décembre 2021, de la gratuité des transports le week-end est un succès avec une fréquentation en hausse de 36 %.
Contrairement à ceux qui soutiennent que ce qui est gratuit n’a aucune valeur, un chauffeur de bus clermontois estime, pour sa part, que la gratuité ajoute de la valeur aux transports en commun en les rendant accessibles à tous.
En France, avec 31 % des émissions de gaz à effet de serre, les transports sont la première cause du changement climatique, devant le bâtiment, l’agriculture et l’industrie. En luttant contre les embouteillages et la pollution, la gratuité des transports est un outil de plus en plus pertinent et nécessaire pour permettre la transition écologique de nos villes : elle est au cœur d’une politique de mobilité égalitaire et écologique.
Elle doit donc s’accompagner d’investissements en faveur du développement des transports publics et de mesures sur le stationnement. La gratuité des transports ouvre la possibilité d’une profonde transformation de nos villes pour les adapter aux défis du XXIe siècle. e siècle et les faire sortir de leur conception automobile du boom d’après-guerre.
Disposer d’un réseau de transport performant, pertinent et gratuit, c’est se donner les moyens de limiter la place de la voiture sans réduire les possibilités de déplacements ; c’est aussi gagner de l’espace pour développer nos villes autrement : avec plus d’espace pour les piétons en élargissant les trottoirs, pour les cyclistes en développant des pistes cyclables sécurisées, pour de nouveaux espaces verts.
La gratuité des transports change des vies, ici et maintenant. C’est le mouvement réel qui abolit l’état actuel des choses comme disait Karl Marx. La gratuité des transports donne la priorité aux personnes et à la planète.
La création de richesse doit répondre aux besoins humains et aux défis environnementaux. La gratuité est l’avenir des transports urbains et l’avenir de nos villes.
Le 21ème siècle verra l’émergence d’un nouveau droit : pouvoir voyager sans payer. La mobilité interroge les fondements de notre pacte républicain.
Pour réussir une véritable révolution de la mobilité, il faut de l’audace. L’équipe que j’ai l’honneur de diriger à Montpellier est en train, par la force et le courage de ses décisions, d’écrire une page magnifique de l’action publique locale.
Inspirés par des exemples étrangers (Tallinn en Estonie) et français (Dunkerque), nous avons soutenu avec conviction, souvent envers et contre tout, l’idée de la gratuité des transports lors de la dernière campagne municipale. Alors que nous sommes aux manettes depuis près de mille jours, nous nous apprêtons à concrétiser, selon le calendrier annoncé, cette belle idée.
Le 21 décembre 2023, les transports en commun deviendront ainsi gratuits pour tous les habitants de la Métropole de Montpellier. Par cette mesure emblématique, unique en Europe pour une agglomération de cette taille, nous voulons relever les défis de notre siècle, ceux de l’urgence sociale et écologique auxquels ne répond plus notre rapport actuel à la mobilité.
La gratuité représente une opportunité unique pour nos collectivités de concilier les exigences environnementales et la question du pouvoir d’achat. Notre volontarisme est une arme. Le XIXe siècle est, dans l’histoire de la fonction publique française, le siècle de l’école et de la gratuité. Le XXe siècle est celui de la sécurité sociale et de l’accès aux soins. De plus en plus de collectivités locales l’affirment : le 21e siècle sera celui de la mobilité et de la gratuité des transports publics.
Celle de l’émergence d’un nouveau droit : pouvoir se déplacer sans payer. Non par dogmatisme ou que chaque siècle a besoin de sa gratuité, mais parce que la mobilité questionne les fondements mêmes de notre pacte républicain. Liberté et égalité, bien sûr, quand le coût des déplacements (prix de l’essence) comme l’isolement de certains territoires divisent notre pays. La fraternité aussi, car quoi de mieux que les transports en commun, dans lesquels nous sommes ensemble, pour réapprendre à vivre dans le respect et la solidarité ?
La gratuité soulève des questions, c’est un fait. Certains postulent par principe que rien n’est gratuit. Et pourtant, l’usage des routes est bon, grâce à la taxe. D’autres soupçonnent dans les années à venir une mauvaise gestion budgétaire, un déclassement et une perte de valeur de nos transports urbains.
A Montpellier, nous avons fait le choix d’investir massivement pour renforcer l’offre et la qualité de service, en rénovant le réseau, en achetant de nouvelles rames (appel d’offres le plus important du pays), en construisant de nouvelles lignes de tramways et de bus, en améliorant la l’accessibilité des espaces publics, en créant des « pistes cyclables » ou en octroyant des subventions pour l’achat d’un vélo électrique.
Autour de la gratuité des déplacements, tout un système de mobilité se met en marche pour offrir une alternative à la voiture individuelle. Donner à nos enfants une meilleure qualité de l’air et espérer que nous pourrons arrêter le réchauffement climatique et envisager à nouveau un avenir radieux pour notre planète.
Grb2