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la grande fumée des prix réglementés

Le débat fait rage : faut-il maintenir les tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRV) ? A ce jour, 59 % des foyers français y sont abonnés – soit 20,6 millions de foyers – et 35 % des petits professionnels. Preuve que la question divise, deux rapports publiés successivement mercredi, de l’Autorité de la concurrence, puis de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), ont livré des recommandations opposées. Pour les premiers, il faut déjà préparer leur disparition. Quant aux seconds, elle plaide pour leur maintien.

A priori, le gouvernement, qui doit soumettre sa décision à l’exécutif bruxellois d’ici la fin de l’année, choisira la deuxième option. La ministre déléguée à l’Énergie, Olga Givernet, a rappelé « l’attachement des Français  » Et  » de la représentation nationale » à ces prix.

Et pourtant, celles-ci n’ont pas protégé les Français de la flambée des prix de l’énergie en 2022 et 2023. Depuis plusieurs mois, elles représentent même un manque à gagner de plusieurs milliards d’euros pour les Français ayant souscrit, la plupart des offres concurrentes affichant des tarifs bien plus attractifs. Pire : leur mode de calcul changera à partir de 2026, de manière à les indexer à 100 % sur le marché, sans aucune régulation de la part de l’Etat (sauf cas extrêmes).

Principe de contestabilité

Pour comprendre cela, il faut regarder le fonctionnement de cet abonnement. La TRV est mise à jour deux fois par an, en février et en août, sur la base d’un calcul de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Objectif : éviter les fluctuations constantes des factures. Elle comprend trois tranches de coûts : les taxes et le tarif d’utilisation du réseau – comme pour toutes les offres en France -, la fourniture d’électricité sur les marchés, ainsi qu’une partie encadrée par l’État, qu’on appelle l’ARENH (accès réglementé à l’électricité). électricité nucléaire historique) et qui donne accès aux concurrents d’EDF à 100 térawattheures (TWh) à bas prix, à 42 euros/MWh.

Concrètement, cette structure permet à EDF de répliquer à tout moment les conditions d’approvisionnement de ses concurrents, comme TotalEnergies, Octopus Energy, Alpiq ou encore labellenergie, afin qu’ils puissent proposer le même type de tarif à leurs propres clients.

Et c’est là toute l’hypocrisie : en vertu d’un principe dit de « contestabilité » inscrit dans le droit européen, EDF n’a pas le droit d’avoir un avantage sur les fournisseurs alternatifs, même si elle produit la grande majorité de l’électricité consommée en France. En effet, le TRV est construit de telle manière que toute entreprise de fourniture, qu’elle dispose ou non d’infrastructures de production, est en mesure de rivaliser. Rien à voir donc avec un tarif qui refléterait les coûts de production d’EDF, puisque c’est la concurrence qui prévaut sur ce marché.

Depuis plus d’un an, EDF commercialise donc le TRV à un prix très supérieur à son propre prix de revient. C’est aussi pour cette raison que l’opérateur historique a bénéficié d’un énorme effet d’aubaine en 2023. Comme ses concurrents ont dû s’approvisionner à des prix élevés sur des marchés devenus fous, le TRV s’est ajusté dans ces conditions exceptionnelles. Cela a généré quelque 20 milliards d’euros supplémentaires sur l’année pour EDF, comme nous l’écrivions l’année dernière.

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Pas de mauvaises surprises en cours de route

Résultat : ce n’est pas le TRV qui a protégé les Français pendant la crise. Car pour la raison évoquée précédemment, la CRE a dû proposer une augmentation de la TRV de 35% en février 2022… et environ +100% en février 2023 et août 2023. Si les mensualités n’ont pas explosé jusqu’ici, c’est car l’Etat a mis en place un bouclier tarifaire très coûteux pour les finances publiques. Mais, en vertu, toujours, du principe de contestabilité, ce système d’aides ne concernait pas que la TRV, puisque d’autres fournisseurs étaient également subventionnés pour endiguer l’envolée des factures de leurs clients.

Il n’en demeure pas moins que certains d’entre eux ont encore augmenté drastiquement leurs tarifs, et la plupart ont même clôturé l’abonnement de nouveaux clients, entraînant un afflux sans précédent chez EDF. C’est d’ailleurs l’un des seuls avantages de la TRV : EDF n’a pas le droit de la modifier en cours de cours ni d’empêcher un consommateur d’y souscrire, et doit adhérer au calcul semestriel. de la CRE ainsi qu’avec l’accord de l’Etat.

« En fait, c’est une protection symbolique : les petits consommateurs ont le sentiment qu’elle les protège des mauvaises surprises », note l’économiste Jacques Percebois, directeur de Centre de recherche en économie et droit de l’énergie (CREDEN).

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De quel VTR parle-t-on ?

Mais ce cadre a une contrepartie : la TRV n’étant revue que deux fois par an afin d’éviter les chocs, elle est lissée sur la base, entre autres, des prix de marché des deux années précédentes. Celui qui s’applique actuellement (jusqu’en février prochain) reflète donc en partie les prix spot de l’électricité en 2022 et 2023… soit les pires années de la crise, avec des prix plus de deux fois supérieurs à ceux d’aujourd’hui.

Alors que les marchés se sont calmés, les fournisseurs alternatifs, qui bénéficiaient pourtant du même bouclier tarifaire pendant la crise, n’ont pas cette contrainte et peuvent donc désormais proposer des offres jusqu’à 30 % moins chères.

« LLes Français en TRV perdent environ 300 euros sur l’année par rapport à une offre concurrente. Au total, cela représente près de 5 milliards d’euros de manque à gagner. », calcule Fabien Chonéancien patron de Direct Energies et ex-président de l’Association nationale des opérateurs de vente au détail d’énergie (ANODE).

Enfin, tout cela devrait empirer à partir de 2026 : l’ARENH tirera alors sa révérence, de sorte que la TRV ne dépendra plus que des taxes, des tarifs de réseau et des prix de l’électricité sur les bourses. Sans aucune régulation des prix ex anteDONC.  » Demain, il ne s’agira plus que d’une offre de marché validée par la CRE, puis par la ministère. Moins d’ARENH, le consommateur sera donc beaucoup plus exposé aux crises », affirme Jacques Percebois. La question du maintien ou non des VTR se superpose donc à une autre : de quelle VTR parle-t-on ?

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