La galaxie Grand Frais, un système implacable de limitation des droits des salariés
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La galaxie Grand Frais, un système implacable de limitation des droits des salariés

La galaxie Grand Frais, un système implacable de limitation des droits des salariés
Dans un supermarché Grand Frais aux Sables-d'Olonne, en Vendée, le 24 avril 2024.

« La cadence, la cadence, la cadence. Tout est mesuré au millimètre près. » En commençant sa journée de travail trois heures avant l’ouverture de l’un des 316 supermarchés Grand Frais de France, Antoine – son nom a été changé par crainte de représailles –, employé dans le secteur des fruits et légumes, sait déjà à quoi s’attendre. Le trentenaire aux cheveux courts commence toujours par « Triez à nouveau, coupez toutes les croûtes noircies des salades, retirez les premières feuilles des choux… »avant de placer l’arrivée du matin sur les étagères « selon une technique bien précise qu’il faut respecter ».

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Pas question de « retourner les caisses pour les vider dans l’allée »ni de « mettre les pommes d’or, trop fragiles, sur deux étages », il doit « placer les bottes de radis une à une »aligner les concombres les uns après les autres « dans un arrangement décalé »… A défaut, il risque de voir sa facture mensuelle baisser – résultat à la fois de son travail et de son comportement – ​​ce qui améliore ses revenus mensuels d’un bonus pouvant aller jusqu’à 150 euros brut.

Avant que les premiers clients entrent dans le supermarché, tout doit être « soigneusement rangé à plat pour un impact visuel maximal »dit-il. Mais aussi après, quand les étagères sont vides. Entre toutes ses « Aller-retour avec la réserve »porter parfois « Paquet de bananes de 20 kilos » pour réajuster les stands au fur et à mesure que les ventes augmentent, Antoine marche « entre 8 et 9 kilomètres par jour ». Ce rythme lui a d’ailleurs déclenché il y a quelques mois des maux de dos, qu’il a soulagés grâce à des antibiotiques, alors que certains de ses collègues portent discrètement des ceintures lombaires sous leurs vêtements.

Bienvenue chez Grand Frais, une enseigne en pleine croissance (130 magasins il y a dix ans, 316 aujourd’hui), mais aussi un système implacable, à l’apparence séduisante et au fonctionnement complexe. D’un côté, des magasins inspirés des halles alimentaires parisiennes, avec des étals de fruits et légumes qui brillent comme s’ils venaient d’être récoltés et disposés aussi esthétiquement que sur une photo postée sur Instagram, qui donnent envie aux clients de tout acheter, et aux concurrents de les imiter. De l’autre, une galaxie composée de plusieurs centaines d’entreprises et d’un savant découpage de micro-entreprises qui étouffe tout dialogue social.

Trois marques

Fondée en 1992 à Givors, dans la région lyonnaise, par Denis Dumont, grossiste et fils de grossiste – quatorzième personnalité française la plus riche de Suisse en 2022, selon le magazine Bilan –, le concept Grand Frais se décline avec trois enseignes : les supermarchés Grand Frais, dont 316et ouvert le 3 juillet à Marseille, et ses points de vente de près de 1 000 mètres carrés en zones commerciales ; l’enseigne Fresh, au logo vert et blanc, et ses 52 supermarchés de moins de 500 mètres carrés qui se développent depuis 2017 dans les petites villes de province ou leur périphérie ; et, enfin, Mon-marché.fr, service de commande en ligne à Paris et sa proche banlieue, lancé en mars 2020, dont le premier magasin a ouvert le 27 mars à Paris.

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