La France n’a aucun moyen de protéger sa population en cas d’attaque nucléaire
Avec le tir d’essai de son missile balistique à portée intermédiaire « Orechnik » jeudi dernier au-dessus de l’Ukraine, la Russie a montré qu’elle était capable de frapper n’importe quel pays européen. Si Vladimir Poutine voulait charger une telle arme d’une tête nucléaire et l’envoyer en France, il n’y aurait pas grand-chose d’autre à faire que de regarder notre fin arriver. Crier « tous à l’abri » ne servirait à rien, nous n’en avons pas.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’attaquant russe ne cesse de brandir la menace nucléaire. Jeudi, Vladimir Poutine a surpris tout le monde en prouvant qu’il avait les capacités techniques pour frapper à peu près n’importe qui dans le monde avec ses missiles balistiques à portée intermédiaire (IRBM). Mais il n’en fallait pas plus pour qu’on s’inquiète du danger, notamment au Sénat où, déjà en février 2023, le Républicain Olivier Paccaud interpellait le ministre des Armées « sur les faibles capacités des abris souterrains destinés à protéger la population ». en cas de conflit armé nucléaire.
« Nous misons tout sur la dissuasion nucléaire »
« En 2017, la France comptait à peine un millier d’abris sur son sol, la plupart construits dans les années 1980. Six cents de ces structures étaient à caractère militaire et environ 400 autres étaient des abris civils privés », précise le sénateur. . Il a comparé ce chiffre dérisoire à celui de l’Allemagne, de la Norvège, de la Finlande et de la Suisse, qui disposent de refuges pour 40 à 104 % de la population. « En France nous n’avons pas, nous n’avons jamais eu et nous n’aurons jamais de politique de protection de la population en cas d’attentat de ce type comme on peut le faire ailleurs », reconnaît Jean-Marie. Collin, expert contre la prolifération nucléaire et directeur de l’Ican.
C’est en gros la réponse donnée au sénateur par la Première ministre de l’époque, Élisabeth Borne, en des termes plus politiques. « La dissuasion nucléaire protège en permanence la France de toute menace d’agression d’origine étatique contre ses intérêts vitaux », a promis l’ancien chef du gouvernement. « Depuis soixante ans, nous avons tout axé sur la dissuasion, en espérant que cela n’arrive pas. Parce que nous n’avons pas de plan B», déplore Jean-Marie Collin.
Selon l’expert, la France n’a de toute façon pas les moyens financiers de construire des abris pour 70 millions de personnes. Et même alors, cela ne servirait pas à grand-chose : « imaginez qu’une arme nucléaire dix ou 20 fois plus puissante qu’Hiroshima arrive sur l’Etat français, peu importe où vous êtes, vous en subirez les conséquences », dit-il. Car aujourd’hui, « personne au gouvernement n’est en mesure de dire ce qu’il se passera si une arme nucléaire explose en France », ajoute le directeur de l’Ican.
Un bunker privé ne vous sauvera pas
Les privilégiés qui pourraient se réfugier dans les abris, situés notamment sous l’Elysée, la Gare de l’Est ou la Maison de la Radio, auront une chance de survivre à l’explosion. Idem pour les civils paranoïaques aux portefeuilles bien garnis qui auraient fait construire un bunker privé. Sauf que les suites de l’explosion ne sont pas encourageantes, d’abord parce que les survivants devront faire face à « la destruction totale de la structure même de notre société », insiste l’expert.
Ensuite, parce que « le caractère persistant de la radioactivité ruine les espoirs de survie de ceux qui ont pu se mettre à l’abri », assure le Journal des femmes Abraham Behar, président de l’association des médecins français pour la prévention de la guerre nucléaire.
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A moins de rester enfermés dans votre bunker pendant des mois avec un stock suffisant de nourriture et d’eau, une solution qui ne concerne que « une poignée de personnes », prévient Abraham Behar. Donc le mieux, c’est que cela n’arrive pas. Et comme personne ne peut dire « si la dissuasion fonctionne ou non », le meilleur moyen d’éviter une guerre nucléaire « est le désarmement nucléaire », insiste le directeur de l’ICAN.