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La France est en effet moins endettée que la Grèce et l’Italie, et bénéficie d’une meilleure confiance de la part de ses créanciers. Il figure toujours parmi les 10 pays au monde ayant la dette publique la plus élevée.
Les Républicains s’attaquent à la situation budgétaire dégradée de la France. Mardi 9 avril, lors de la « Nuit de l’Économie » organisée dans le cadre des États généraux de la droite, les responsables du parti ont évoqué la situation. « catastrophique », selon eux, des finances du pays. Le lendemain, l’exécutif annonçait pour l’année 2024 un déficit public supérieur à 5% du produit intérieur brut (PIB) – un chiffre supérieur aux 4,4% initialement prévus.
« Le moment de vérité est arrivé : nous suivons le même chemin que la Grèce »avait prévenu le patron des Républicains Eric Ciotti, dans un entretien au journal Les échos publié le 20 mars. « Mille milliards, ce sera la facture d’Emmanuel Macron d’ici deux cinq ans. En termes de dette, nous faisons juste pire que la Grèce et l’Italie (…) Cela veut dire que la situation est catastrophique », a fustigé le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau. Comment se porte réellement la dette publique française ? Sommes-nous dans une situation pire que la Grèce et l’Italie ? Franceinfo s’est penchée sur les chiffres.
La France, troisième État le plus endetté d’Europe
La France est l’un des pays les plus endettés d’Europe. Au deuxième trimestre 2017, à l’arrivée d’Emmanuel Macron, la dette publique française (c’est-à-dire l’ensemble des dettes contractées par les administrations publiques) était de 2 231,7 milliards d’euros, selon l’Insee. Fin 2023, il s’élève à 3 101,2 milliards d’euros, selon cette même source. Cela représente un différentiel de 870 milliards d’euros, un chiffre un peu inférieur au « 1 000 milliards » avancée par Bruno Retailleau.
Contrairement à ce qu’affirme le sénateur, la France reste cependant moins endettée que la Grèce ou l’Italie, par rapport à son PIB. Au troisième trimestre 2023, la dette publique française s’élève à 111,9% du PIB, contre 165,5% pour la Grèce et 140,6% pour l’Italie, selon les derniers chiffres d’Eurostat. (PDF), l’Office statistique de l’Union européenne. En comparaison, ce taux s’élève à 89,9% pour la zone euro et à 82,6% pour l’ensemble de l’UE.
La dette n’est en tout cas pas le seul critère pertinent pour juger de la santé financière d’un pays. Tout dépend de la confiance des créanciers dans le pays emprunteur. « Ceux qui prêtent de l’argent à la France n’ont aucun doute. Ils prêtent à des taux d’intérêt nettement inférieurs à ceux de la Grèce ou de l’Italie. »observe auprès de franceinfo Eric Heyer, directeur du département Analyse et prévision à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). « Les taux d’intérêt sont plus bas en Allemagne qu’en France, mais cet écart ne s’accroît que très marginalement »observe le docteur en économie.
Une dette publique « bien notée »
Aussi, la France, la Grèce et l’Italie n’obtiennent pas la même notation de la part des principales agences de notation financière, qui évaluent la capacité d’un emprunteur – un État par exemple – à rembourser sa dette. Pour ce faire, les agences s’intéressent aux actifs détenus par l’État. « Si vous possédez trois châteaux et deux Ferrari, la banque vous prêtera de l’argent plus facilement. La France est l’un des pays qui possède le plus d’atouts en Europe »illustre Eric Heyer. « Non seulement l’Italie et la Grèce ont moins d’actifs, mais elles ont des perspectives de croissance plus faibles que la France », souligne l’économiste. Un critère également pris en compte par les agences de notation.
L’Agence France Trésor rappelle que la France a obtenu une notation AA- de Fitch, Aa2 de Moody’s et AA de Standard and Poor’s en 2023. Autrement dit, ces trois agences considèrent que la valeur du crédit français est de haute qualité et que le risque que elle ne remboursera pas son crédit est très faible. « C’est l’équivalent d’un 18 sur 20. La Grèce est notée l’équivalent de 9/20 et l’Italie, de 11/20 »illustre Eric Heyer.
« Quand on regarde sereinement les chiffres, on voit que la situation s’est dégradée, mais qu’elle reste soutenable. »
Éric Heyeréconomiste chez OFCE
Au niveau mondial, les disparités entre les pays en matière d’endettement sont importantes. Selon un classement du Fonds monétaire international (FMI) publié en 2023, le Japon est l’État le plus endetté au monde (261,29 %), devant la Grèce, le Venezuela, l’Italie, les États-Unis, le Portugal et l’Espagne. La France arrive à la 8ème place (111,67%). Toutefois, un taux d’endettement élevé n’est pas nécessairement le signe d’une économie en crise. « Il n’y a pas de niveau de dette publique au-dessus duquel il y a une catastrophe »assure Eric Heyer. « Les Japonais ont une dette supérieure à 260 points de PIB mais ils ont en revanche beaucoup d’actifs. L’Argentine, qui a une dette d’environ 80 points de PIB, est en faillite.»note le chercheur.
Un déficit creusé par les différentes crises mondiales
Covid, guerre en Ukraine, crise énergétique, toutes ces crises ont contribué à creuser les déficits publics dans le monde. La France ne fait pas exception. Pour Eric Heyer, il convient encore d’examiner la nature du dérapage de nos finances : « SSi la dette est utilisée pour accumuler des actifs, comme investir dans les hôpitaux ou dans l’environnement afin que les générations futures puissent en bénéficier, il n’y a aucun problème. Mais récemment, la France s’est endettée à cause d’une politique du « quoi qu’il en coûte » et pour un bouclier énergétique. « Ce n’est pas une bonne dette d’un point de vue comptable » juge l’économiste. « Nous devons maintenant élaborer un plan pour rembourser cette dette collective. Un plan qui implique tout le monde et qui est échelonné, pour ne pas perturber la croissance. »