Le ministre des Armées Sébastien Lecornu s’est entretenu jeudi pendant une heure avec son homologue russe Sergueï Choïgu.
Le coup de fil pourrait passer pour une reprise de contact. Ce n’est pas le cas officiellement. Toutefois, le ministre des Armées Sébastien Lecornu s’est entretenu jeudi pendant une heure avec son homologue russe Sergueï Choïgu. Les deux hommes ont évoqué l’attentat qui a ravagé Moscou le 22 mars et qui a été revendiqué par l’Etat islamique au Khorasan. Depuis, la Russie cherche à incriminer l’Ukraine, dans le cadre de sa guerre déclenchée en février 2022. »La menace de l’Etat islamique contre la Russie est réelle», confirme au contraire un spécialiste du renseignement européen.
Après avoir condamné cet attentat qui a touché le peuple russe, le chef de l’Etat Emmanuel Macron a rappelé que la France était toujours disposée à partager des informations avec la Russie dans le cadre de la lutte commune contre la menace terroriste. Jeudi, Sébastien Lecornu »a confirmé que la France ne disposait d’aucune information permettant d’établir un lien entre cette attaque et l’Ukraine« . « Il a appelé la Russie à mettre un terme à toute exploitation», a ajouté le ministère dans un communiqué froid et factuel. Pas question de donner le sentiment de soutenir le régime du Kremlin qui cherche à exploiter l’attaque pour accroître son offensive contre Kiev.
Une menace évolutive
Les services de renseignement français sont toujours mobilisés dans la lutte contre le terrorisme, alors que la menace continue d’évoluer. Mais les échanges entre pays, indispensables pour anticiper la menace, sont perturbés par le conflit mené par la Russie contre l’Ukraine. Les services américains avaient néanmoins prévenu leurs homologues russes de la possibilité d’une attaque. Jeudi, le ministre Sébastien Lecornu a rappelé que la France était disposée à continuer de partager des renseignements avec la Russie en matière de lutte contre le terrorisme.
Le débat ne s’est pas limité au terrorisme. On parlait aussi de la guerre en Ukraine sans connaître les détails de l’échange. Le ministre « a rappelé que la France continuera à soutenir l’Ukraine aussi longtemps et aussi intensément que nécessaire dans son combat pour la liberté et la souveraineté, afin d’apporter la paix et la sécurité sur le continent européen», a indiqué le ministère dans son communiqué. Depuis le début de l’année, la France a changé de ton à l’égard de la Russie, n’excluant plus aucun scénario, au nom de l’ambiguïté stratégique.
Lire aussiAprès ses premiers échecs, le commandement russe a tiré les leçons de la guerre en Ukraine
La dernière conversation entre Sébastien Lecornu et Sergueï Choïgou date du 23 octobre 2022. Elle a eu lieu »à la demande de ce dernier« . Les Occidentaux craignaient alors une escalade nucléaire. Sergueï Choïgu avait « dit qu’il craint une grève de bombe sale par les Ukrainiens sur leur territoire pour rejeter la faute sur la Russie », a expliqué le ministère des Armées, sans croire les affirmations de Moscou. Le dialogue était devenu impossible.
L’appel de jeudi indique que Paris n’a pas complètement renoncé à maintenir un lien avec Moscou. A quelques mois des Jeux olympiques, la France ne veut négliger aucune source potentielle d’information pour prévenir d’éventuels risques pesant sur l’événement. Reste à savoir si la France et la Russie sauront dissocier tous les sujets.