La France construit le supercalculateur classifié dédié à l’IA le plus puissant d’Europe
Les choses se précisent en France en matière d’IA militaire. Le ministère des Armées a choisi le tandem Hewlett-Packard Enterprise/Orange pour fabriquer un supercalculateur de pointe. Celui-ci doit disposer de la plus grande capacité de calcul classifié dédiée à l’intelligence artificielle en Europe.
Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, soulignait ce printemps : la France ne doit pas « ne dépend pas d’autres pouvoirs » pour accéder à certaines technologies avancées avec des perspectives militaires. Cela inclut le calcul haute performance réalisé par les superordinateurs et l’intelligence artificielle (IA), qui est en plein essor.
Opérationnel fin 2025
Il était alors question de commander un supercalculateur pour une livraison en 2025. La machine, indiquait-on alors, serait capable de traiter des données classifiées (secrets de défense) et de l’IA militaire. Mais pour des raisons de sécurité nationale, les caractéristiques exactes du projet restent confidentielles.
Si les contours restent encore globalement flous, le ministère des Armées en a dit un peu plus le 24 octobre. Il a d’abord confirmé le calendrier de mise en place de ce supercalculateur, qui débutera ses travaux à l’automne 2025, et sera pleinement opérationnel avant 2026. Quant à son constructeur, il s’agira du couple Hewlett Packard Enterprise/Orange.
Surtout, on sait désormais que cette future machine a l’ambition d’être « le supercalculateur classé le plus puissant dédié à l’IA en Europe « . Un podium que revendique l’appareil, même si le domaine dans lequel il opère est par nature opaque. Les supercalculateurs de ce type sont également entourés de secret, ce qui limite les comparaisons.
Actuellement, le supercalculateur le plus puissant d’Europe se trouve en Finlande – du moins la machine la plus puissante dont les spécifications sont publiques. Il fait partie du top 5 mondial et compte plus de 2,7 millions de cœurs. Le plus puissant des sommets atteint environ quatre fois sa puissance réelle maximale.
Une machine qui sera toujours hors ligne
Compte tenu de la sensibilité de l’installation, il est prévu de ne jamais la connecter à Internet, afin d’éviter tout risque de compromission à distance, via une opération de piratage. Il est également prévu d’autoriser uniquement les citoyens français habilités au secret de défense nationale à en assurer le maintien, là encore pour éviter des compromissions internes.
Une fois en place, l’armée française pourra y accéder afin de traiter les données confidentielles de manière souveraine. Il est également prévu que les entreprises de défense puissent y accéder. On imagine que des groupes spécialisés comme MBDA, Thales, Naval Group, Safran et Dassault Aviation seraient intéressés par ces équipements.
Le succès de Hewlett Packard Enterprise/Orange laisse cependant une victime : Atos. Le géant français des services informatiques, qui traverse une grave crise depuis plusieurs années, était également en lice pour ce marché. Mais, en une phrase, et sans le citer nommément, M. Lecornu a laissé entendre que sa proposition était « anormalement faible « .
Reste enfin une dernière réalité : si le tandem HPE/Orange implique au moins une entreprise française, pour un projet de souveraineté, les composants clés qui seront dans ce supercalculateur seront américains. Il est prévu d’équiper l’appareil de puces Nvidia. Un cruel rappel que dans certains secteurs critiques, l’Europe n’est pas là.