Alice au pays des hauts plateaux. Tel pourrait être le titre du 3.000 mètres steeple olympique organisé, mardi 6 août, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), au Stade de France. La Française Alice Finot a franchi la ligne, comme perdue, comme une intruse, au milieu de cinq athlètes venus d’Afrique de l’Est. Elle est arrivée quatrième, derrière Winfred Yavi, une Bahreïnienne née au Kenya (8 m 52 s 76, un nouveau record olympique), l’Ougandaise Peruth Chemutai et la Kényane Faith Cherotich mais devant une Ethiopienne et une autre Kényane.
Peut-on mesurer l’exploit ou l’arrogance de la Montbéliardaise qui a ainsi pu se mêler à ce groupe qui règne sans partage ou presque sur la longue distance mondiale depuis des décennies ? Avec à la clé un record d’Europe (8 m 58 s 67) qui lui permet de passer pour la première fois sous la barre des 9 minutes, ce qui signe définitivement son entrée dans l’aristocratie de sa distance. A 33 ans.
Un moment étonnant où cette femme au corps longiligne d’1,72 m s’est retrouvée mêlée à ces athlètes africains aux visages d’enfants plantés sur des corps de poche, miraculeusement légers et puissants.
Ce 3 000 m steeple n’était pas une course mais une fable. Huit athlètes des hauts plateaux s’élançaient à une vitesse folle depuis le début de la course. La Française les a lâchés, sûre de courir vers l’asphyxie en essayant de les suivre. Elle avait écrit sur sa paume : « Jouez votre propre partition »Et c’est comme si elle avait déclenché un métronome dans sa tête. Elle consultait son chronomètre pour surveiller ses temps de passage, laissant un gouffre la séparant du peloton de tête. Puis, dans un dernier tour fabuleux, elle rattrapait ou plutôt avalait les concurrentes africaines qui craquaient les unes après les autres, dans un stade d’abord incrédule puis rendu fou par ce crime de lèse-majesté.
Après la course, Alice Finot s’est rendue dans la partie du stade où se trouvaient ses proches. Elle s’est agenouillée et a demandé son compagnon en mariage. En guise d’alliance, elle lui a remis une broche qu’elle avait portée en course, sur laquelle était écrit : « L’amour est à Paris »C’est lui qui, alors que le couple voyageait en Thaïlande en 2015, il y a neuf ans, avait poussé sa future épouse à s’inscrire à un marathon. Alice Finot avait alors abandonné, définitivement semblait-il, l’athlétisme qu’elle pratiquait depuis l’âge de 13 ans. Le malheur d’être une élève brillante, une école d’ingénieur à Paris avait eu raison d’une carrière sportive à ses débuts. Soirées entre amis, voyages à travers le monde, études. Rien de bon dans un mode de vie aussi sain.
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