L’ancien président accuse le candidat démocrate d’avoir utilisé l’intelligence artificielle pour organiser un meeting. Ces accusations sont toutefois sans fondement.
Une tricherie à l’aéroport ? Dans une série de messages publiés sur son réseau Truth Social dimanche 11 août, Donald Trump, candidat républicain à l’élection présidentielle américaine, a accusé sa rivale démocrate Kamala Harris d’avoir « triché ».
« Est-ce que quelqu’un a remarqué que Kamala Harris a triché à l’aéroport ? », s’interroge l’ancien président. Une référence à une photo partagée par l’équipe de Kamala Harris lors d’un meeting de la vice-présidente de son colistier Tim Walz le 7 août à Détroit (Michigan), qui aurait réuni 15 000 personnes selon les organisateurs.
« C’est une tricheuse »
« Il n’y avait personne dans l’avion. Elle a utilisé l’IA pour générer une foule massive de soi-disant partisans, MAIS ILS N’EXISTAIENT PAS ! (…) C’est une tricheuse. C’est ainsi que les démocrates gagnent les élections, en trichant. (…) Elle devrait être disqualifiée, car créer une fausse image est une ingérence électorale. »
Selon l’ancien président, Kamala Harris aurait utilisé l’intelligence artificielle (IA) pour rassembler une foule lors d’un de ses meetings, afin de faire croire qu’il y avait un fort engouement pour la campagne électorale. Il avance plusieurs arguments : le reflet dans l’avion ne montrerait pas la foule présente au meeting et les téléphones n’afficheraient pas d’images du meeting.
Ces accusations semblent toutefois infondées. En effet, de nombreuses images prises sur place, diffusées par divers médias locaux (dont l’AFP) et internationaux, ainsi que diverses vidéos amateurs, indiquent que l’événement a bel et bien réuni un grand nombre de militants. Ces photos montrent le rassemblement sous plusieurs angles, attestant de la présence d’une foule massive.
Certaines des personnes présentes sur la photo originale se retrouvent également sur d’autres photos et vidéos partagées sur les réseaux sociaux. C’est le cas par exemple de l’homme au T-shirt bleu qui tient une pancarte et d’un adolescent, également en bleu, avec un T-shirt à motif rectangulaire dans le dos. On peut également identifier une femme avec un T-shirt rose et des tresses qui se retrouvent à la fois sur l’image soupçonnée d’avoir été trafiquée et sur d’autres prises par différentes sources.
« Aucune preuve de manipulation »
L’un des principaux arguments utilisés par Donald Trump est l’absence de reflet de la foule dans la coque de l’avion. Un phénomène qui s’explique par la distance entre l’avion et le public et l’angle de prise de vue. « La foule semble être à une distance assez importante de l’avion », explique Matthew Stamm, professeur à l’université Drexel également spécialisé dans la détection des fake news.
« En raison de l’angle de prise de vue et du fait que la coque de l’avion est courbée, les reflets visibles sur la coque et les moteurs de l’avion peuvent uniquement montrer le sol directement devant l’avion. »
Hany Farid, professeur à l’Université de Californie à Berkeley, spécialisé dans la désinformation numérique interviewé par l’AFPL’équipe de recherche a analysé la photo à l’aide de deux modèles entraînés à détecter des modèles d’IA génératrice. Elle n’a trouvé « aucune preuve de manipulation ». Elle a déclaré que la photo n’avait subi « qu’une seule modification, qui consistait en un simple éclaircissement/renforcement du contraste et éventuellement un renforcement de la netteté ».
L’équipe Vérifier de la BBCchargé de détecter les fausses nouvelles, a également analysé les métadonnées de l’image, qui confirment qu’elle a été prise le 7 août à 18h28 heure locale, peu après l’arrivée de Kamala Harris dans le Michigan, avec un iPhone 12 Pro Max.
Les démocrates se moquent
De son côté, l’équipe de campagne de Kamala Harris affirme que la photo en question a été prise par Ben Sarle, directeur numérique de la campagne de Kamala Harris dans l’État décisif du Michigan. Elle n’aurait pas été modifiée à l’aide de l’IA.
Certains démocrates n’ont pas hésité à tourner en dérision cette fausse information partagée par Donald Trump.
« Cette foule d’IA était vraiment bruyante, mes oreilles ont arrêté de bourdonner à cause de leurs acclamations imaginaires », a plaisanté la présidente du Parti démocrate du Michigan, Lavora Barnes, sur X (ex-Twitter).
Donald Trump lui-même n’a pas hésité à détourner une image pour gonfler ses foules. Ce fut le cas en mai 2024. Le candidat républicain avait alors réutilisé une image d’un concert des Rolling Stones afin de faire croire qu’il y avait un grand rassemblement en sa faveur.