A partir du mercredi 11 décembre, il ne sera plus possible d’acheter sans ordonnance huit fameux traitements contre le rhume, jugés dangereux. C’est ce qu’a annoncé lundi soir l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qui a estimé que« compte tenu des nombreuses contre-indications, précautions d’emploi et effets indésirables connus de la pseudoéphédrine d’une part et du caractère bénin du rhume d’autre part,La possibilité d’obtenir ces médicaments sans avis médical présente un risque trop important pour les patients « .
Tous les médicaments contenant de la pseudoéphédrine (un décongestionnant) ne seront disponibles que sur prescription médicale. Sont concernés : Actifed Rhume, Actifed Rhume jour et nuit, Dolirhume Paracétamol et Pseudoéphédrine, Dolirhumepro Paracétamol Pseudoéphédrine et Doxylamine, Humex Rhume, Nurofen Rhume, Rhinadvil Rhume, Ibuprofène/Pseudoéphédrine et Rhinadvilcaps Rhume Ibuprofène/Pseudoéphédrinelà.
L’ANSM précise dans son communiqué : « Nous demandons aux médecins prescripteurs d’évaluer soigneusement la balance bénéfice-risque pour chaque patient avant de prescrire l’un de ces médicaments. « .
L’agence avait déjà déconseillé leur utilisation en 2023, mettant en garde contre des abus et des effets secondaires graves apparaissant chez des patients sans antécédents médicaux. Parmi les risques, on retrouve les accidents vasculaires cérébraux, les infarctus du myocarde et, plus récemment, les risques neurologiques confirmés par l’Agence européenne des médicaments (EMA). Les pharmaciens et autres laboratoires fournissant ces médicaments n’ont donc pas été très surpris par cette décision, mais regrettent tout de même le timing de son annonce, à l’approche de l’hiver.
Une décision mitigée
» Nous avions été prévenus que cela arriverait, mais nous n’avions pas de date précise « , expliquer Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO).
Résultat : de nombreux pharmaciens avaient commandé leurs stocks de médicaments en grande quantité cet été afin de faire face à l’afflux de rhumes hivernaux dans les mois à venir. Le président du principal syndicat des pharmaciens d’officine juge cette décision de l’ANSM « Soit trop dur, soit pas assez dur. On a l’impression de quelque chose de timide.» Pierre-Olivier Variot regrette ainsi que l’ANSM retire constamment des molécules de vente en pharmacie, mais ne permette pas l’accès à de nouvelles substances pour soigner les patients.
Il souligne également que la prescription ne garantit pas toujours un meilleur usage des médicaments :« La codéine, aujourd’hui sur ordonnance, est l’un des médicaments dont les prescriptions font le plus l’objet d’un trafic. » Le directeur médical de l’ANSM a indiqué à l’AFP que sur les 2.600 prescriptions falsifiées, 457 concernaient du tramadol et 416 de la codéine.
D’autres consultations médicales ?
De son côté, le lobby des laboratoires pharmaceutiques spécialisés dans les produits de santé sans ordonnanceNéreS, a demandé mardi aux autorités sanitaires françaises dans un communiqué de « reconsidérer » leur décision.
Cette mesure risque, selon NéreS, « de surcharger inutilement les pratiques médicales, aggravant ainsi les délais d’accès aux soins pour les patients souffrant de pathologies plus graves ».
Il rappelle ensuite que 6 à 8 millions de Français vivent dans des déserts médicaux, où l’accès à un médecin généraliste est déjà très compliqué et qu’il faut entre 4 à 7 jours pour attendre un rendez-vous médical dans la majorité des départements métropolitains.
Mais ce sont surtout les laboratoires qui risquent de grincer des dents. Si les ventes de ces médicaments étaient en chute libre ces dernières années, passant de 16 millions de boîtes en 2013 à 4 millions par an l’an dernier, elles devraient diminuer encore plus fortement après cette mesure. En 2024, ces 8 soins représentent 2,9 millions de boîtes vendues et pèsent 18,7 millions d’euros, précise la fédération NéreS. Contactés, ils n’ont pas encore réagi à cette nouvelle.