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Fraude massive au VietnamLe patron d’un géant de l’immobilier condamné à mort
Après un procès XXL qui a duré environ un mois, la sentence est tombée jeudi pour Truong My Lan, considéré comme le cerveau de l’escroquerie estimée à près de 25 milliards de francs.
Le directeur d’un géant de l’immobilier a été condamné à la peine de mort dans une affaire d’escroquerie dont le préjudice a été estimé par le parquet à 25 milliards d’euros (environ 24,5 milliards de francs) au total, le plus grand scandale financier que le Vietnam ait jamais connu.
Les agissements de Truong My Lan, patron du conglomérat Van Thinh Phat, accusé d’avoir fraudé les fonds de la Saigon Commercial Bank (SCB) pendant une décennie, « ont érodé la confiance de la population dans la direction du Parti (communiste) et de l’État », a déclaré le jury, selon les médias officiels, lors du procès qui s’est tenu devant un tribunal de Ho Chi Minh Ville (sud).
Mme Truong a été reconnue coupable de corruption, de détournement de fonds et de violation de la loi bancaire. La femme d’affaires a nié son rôle et a rejeté la faute sur ses subordonnés. Au cours d’un procès massif qui a duré environ un mois, Mme Truong et 85 autres accusés ont semblé répondre aux questions et à la colère de milliers d’épargnants lésés qui ont perdu leurs fonds presque du jour au lendemain.
La liste des accusés comprenait d’anciens responsables de la banque centrale, d’anciens membres du gouvernement ainsi que des dirigeants de la banque impliquée dans le stratagème frauduleux, la Saigon Commercial Bank (SCB), sur fond d’épuration anti-corruption orchestrée pour plusieurs années par le pouvoir communiste ciblant les plus hautes sphères politiques et économiques. La peine de mort avait seulement été demandée par le procureur contre Mme Truong, considérée comme le cerveau de l’opération.
« Peu de connaissances »
Lors de sa dernière prise de parole publique, lors des audiences, elle a avoué avoir pensé au suicide. « Dans mon désespoir, j’ai pensé à la mort », a-t-elle déclaré, dans des propos rapportés par Tuoi Tre, un journal d’État.
« Je suis tellement en colère d’avoir été assez stupide pour m’impliquer dans un secteur si difficile (le secteur bancaire) que je connaissais peu », a-t-elle déclaré.
Truong My Lan est reconnue coupable d’avoir fraudé environ 42 000 personnes entre 2012 et 2022, via un montage obligataire transitant par la SCB, détenue à plus de 90 % par son groupe, avec la complicité de responsables de la surveillance du secteur bancaire. .
Elle a été arrêtée en octobre, accusée d’avoir détourné 304 000 milliards de dong, soit 11,5 milliards d’euros, qui auraient alimenté son style de vie luxueux et auraient été utilisés à des fins de corruption. Mais le parquet a affirmé jeudi que le préjudice total causé par l’escroquerie s’élève désormais à 27 milliards de dollars (25 milliards d’euros), soit l’équivalent de 6% du PIB du pays en 2023.
Le procès a révélé certaines stratagèmes, comme un pot-de-vin d’environ cinq millions d’euros en espèces cachés dans des boîtes de polystyrène, un isolant thermique habituellement utilisé pour le transport de fruits ou de fruits de mer.
La destinataire, une ancienne responsable de l’inspection au sein de la banque centrale, a assuré avoir refusé le colis, remis par l’ancien président de la SCB. Ce dernier a de son côté affirmé ne pas l’avoir repris après l’avoir donné, selon les médias d’État. Les procureurs ont également signalé que plus d’un millier de propriétés avaient été confisquées à Mme Truong.
Appareil de police
L’ampleur du scandale a poussé des centaines de personnes à manifester dans la capitale Hanoï et Hô Chi Minh-Ville, expression inhabituelle de colère collective tolérée dans le pays communiste. Mercredi, un important dispositif policier a été déployé devant le siège de la banque centrale à Hanoï, lieu de précédents rassemblements.
Faute de transparence et de régulation efficace, le système bancaire vietnamien laisse la porte ouverte à de puissants acteurs privés qui peuvent imposer leurs intérêts au détriment des épargnants.
Ces dernières années, le régime communiste a accéléré sa campagne anti-corruption. Au nom de cette politique, plus de 4 400 personnes, dont d’anciennes stars du monde des affaires et des ministres déchus, ont été poursuivies dans plus de 1 700 dossiers depuis 2021.
Le recours à la peine de mort est courant au Vietnam pour les affaires de drogue, mais reste rare pour les délits ou crimes économiques. Les statistiques sur son application sont classées secret d’État, mais Amnesty International estime que de « nombreuses » exécutions ont lieu chaque année, de l’ordre de plusieurs dizaines par an.
(AFP)