la découverte des restes d’Émile laisse le président des chasseurs du Vernet incrédule
ENTRETIEN – Stéphane Chevrier est président de la société de chasse du Vernet (Alpes-de-Haute-Provence). Il ne peut pas imaginer que tout le monde ait pu passer à côté du corps de l’enfant, dont le crâne et les dents ont été retrouvés samedi dernier par un randonneur.
LE FIGARO. – Selon le procureur de la République d’Aix-en-Provence, le crâne du petit Émile n’aurait pas été enterré , remettant la trace de l’accident sur la table. Le corps du garçon aurait-il pu rester plus de huit mois dans la nature près du Haut-Vernet sans que personne ne l’ait découvert auparavant ?
Stéphane CHEVRIER. – Cela me surprend beaucoup. Ce sont des territoires que fréquentent régulièrement les chasseurs, tout comme les cueilleurs. Nous sommes habitués à la végétation et nous faisons attention aux pattes, c’est-à-dire aux empreintes et traces des animaux. Nous avons un regard légèrement plus informé sur l’environnement que le randonneur moyen ! On s’écarte des sentiers, on suit nos chiens dans les traces, on traverse les bois pour atteindre des poteaux, etc. Aussi, je reste étonné que personne n’ait croisé le corps ou du moins quelques traces durant tous ces mois, si c’était bien le cas. là. Sans doute le serai-je encore davantage lorsqu’on nous dira où précisément les restes ont été retrouvés.
Pouvez-vous nous décrire la zone où les ossements ont été déterrés samedi dernier par un randonneur ?
Je ne sais pas exactement où cela se situe. Nous avons d’abord évoqué Les Quatre Chemins, un secteur relativement plat, avec des prairies, où la visibilité est bonne. Nous avons ensuite parlé de la vallée d’Auches sur sa partie supérieure, dans un endroit plus escarpé à la végétation plus dense.
Selon nos informations, ce serait dans ce secteur dit « des Auches », à proximité d’un torrent qui porte le même nom, non loin d’un chemin forestier. Le lieu serait situé à la limite entre propriété municipale et domaniale, à 1,5 kilomètres du Haut-Vernet…
À cette époque, c’était une zone où il y avait beaucoup d’eau. Les pentes sous l’Ubac sont importantes, avec un dénivelé important, et les ravines d’eau s’accumulent au fond et forment ces fameux torrents. Cet endroit peut aussi être décrit comme escarpé et étroit. Il n’en reste pas moins qu’il est toujours alimenté par une piste où circulent des 4×4, puis par un petit chemin qui permet de rejoindre le Haut-Vernet. En dehors du sentier, le biotope est constitué de mousses, de marnes noires, d’épines, de ronces, de buissons… Il est, par endroits, très peuplé de creux de quatre à cinq mètres de hauteur.
Est-ce un endroit populaire ?
Le chemin est fréquenté par les promeneurs, oui. Ensuite, que ce soit les chasseurs ou les cueilleurs de champignons qui sillonnent également les environs, ils ne restent pas sur le chemin. Ceux qui connaissent leurs « coins » aux morilles au printemps et aux girolles en automne n’ont pas besoin de sentiers. Celui-ci est capable d’aller partout, même dans les endroits les plus inaccessibles et les plus reculés.
On peut imaginer une chute de l’un d’eux, peut-être mortelle, et dire que si l’endroit n’avait pas été fouillé, il aurait pu abriter le corps avant que les eaux ne le déplacent plus tard.
Stéphane Chevrier, président de la société de chasse Vernet
L’été dernier, cette végétation était-elle très différente ?
En mai et juin derniers, il avait déjà beaucoup plu, donc l’eau était au rendez-vous et les torrents aussi. Durant l’été, la vallée d’Auches était très humide avec une végétation assez haute qui ne s’installait qu’avec la neige. Et encore une fois, il a peu neigé !
Assez haut pour cacher le corps d’un enfant de deux ans et demi, par exemple ?
Comme je vous l’ai dit, il existe des creux importants dans la partie haute du Vallon. On peut imaginer une chute de l’un d’eux, peut-être mortelle, et dire que si l’endroit n’avait pas été fouillé, il aurait pu abriter le corps avant que les eaux ne le déplacent plus tard.
Quant à la faune locale, quelles espèces retrouve-t-on ici ?
Tous types d’animaux. Du chevreuil au cerf élaphe en passant par le chamois. Renards, blaireaux et rongeurs… Des sangliers bien sûr, mais aussi des loups. Notre département des Alpes-de-Haute-Provence est l’un de ceux où la population de loups recensée est la plus importante. Il m’est arrivé d’en voir. Début septembre encore, le lieutenant de la louveterie en prend quelques-uns, suite à des attaques contre des vaches et des moutons, près de la montagne du Vernet, à quelques kilomètres de là.
Croyez-vous un loup capable d’attaquer le petit Émile, surtout s’il était seul et perdu, en pleine nuit ?
Attaque, je ne pense pas. En tout cas, il ne faut pas tuer. Je ne suis pas un expert en la matière mais cela me semble hors de question. En revanche, il est possible qu’un loup se nourrisse d’un cadavre et le déplace. Mais comme les autres animaux.
Lors de sa conférence de presse mardi soir, le procureur a expliqué que chiens de piste utilisées lors des chasses de juillet dernier pourraient avoir été perturbées par la forte chaleur de l’été. Qu’en penses-tu ?
Je ne suis pas un expert pour répondre à cette question. Mais il est vrai qu’en période de chasse, quand il fait chaud, les chiens ont du mal. On sait qu’ils seront moins performants dans la quête du gibier. D’ailleurs, sur la commune du Haut-Vernet, on ne commence jamais à chasser avant la mi-septembre. Nous n’avons jamais fait de chasse auparavant, sauf en cas de dégâts de sangliers. Et même à cette heure-là, on s’arrête généralement vers 9h30 ou 10h du matin à cause des températures.