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La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme

Dans un rapport, les magistrats financiers dressent un bilan inquiétant des comptes publics, malmenés par les crises sanitaire et inflationniste et risquant de pâtir de l’incertitude post-législative.

Après « une très mauvaise année » en 2023, les finances publiques françaises sont dans « une situation préoccupante » et la trajectoire fixée par le gouvernement sortant pour les assainir d’ici 2027 repose sur des « objectifs irréalistes », alerte la Cour des comptes. Dans un épais rapport, présenté lundi matin, les magistrats financiers dressent un bilan inquiétant des comptes publics, malmenés par les crises sanitaire et inflationniste et risquant de pâtir de l’incertitude post-législative.

Ils jugent aussi sévèrement les prévisions à moyen terme du gouvernement macroniste, détaillées en avril à la Commission européenne dans le programme de stabilité (« PSTAB ») : il prévoit un retour en 2027 sous les 3 % du PIB du déficit public, malgré un dérapage à 5,5 % en 2023 (au lieu de 4,9 % anticipé). Ce document vise un déficit de 5,1 % en 2024, qui diminuerait progressivement jusqu’à 2,9 % en 2027. La dette serait de 112 % en 2027 – soit plus qu’en 2023 (109,9 % selon l’Insee). « Cette trajectoire, peu ambitieuse dans ses objectifs de déficit et de dette, (…), pose une question de crédibilité », écrit la Cour des comptes, sans préjuger de la construction du budget 2025 par le futur gouvernement.

Ces « objectifs irréalistes » reposent sur des hypothèses de croissance « trop ​​optimistes » et supposent des économies de dépenses « sans précédent » ainsi que des « augmentations importantes de prélèvements obligatoires qui ne sont pas précisées », souligne-t-elle.

« Les scénarios alternatifs testés par la Cour des comptes montrent que tout écart par rapport aux prévisions de croissance, de dépenses ou de recettes suffirait à faire dérailler la trajectoire et à manquer les objectifs de déficit et de dette pour 2027 », prévient la juridiction financière administrative.

Incertitude sur le projet d’impôt sur le revenu

Par ailleurs, les prévisions à moyen terme du gouvernement n’intègrent pas « pleinement » les enjeux liés au réchauffement climatique et à la transition énergétique. « Or, que ce soit en termes de croissance, d’investissements ou d’érosion de la fiscalité, cette transition a un coût qui pèsera nécessairement sur les finances publiques », relève la Cour. Dès 2024, « des risques importants » pèsent sur l’atteinte de ces objectifs, notamment celui d’un dérapage des dépenses alors que la crise des agriculteurs, celle de Nouvelle-Calédonie ou l’organisation des Jeux olympiques ont nécessité de desserrer les cordons de la bourse.

Pour 2024, l’Insee anticipe toutefois une croissance de 1,1% du PIB, soit un peu plus que la prévision du gouvernement (1%). A ce stade, le gouvernement prévoit 25 milliards d’économies cette année, et davantage en 2025. La Cour pointe aussi les incertitudes autour du projet de taxe sur les rentes, censé rapporter 3 milliards d’euros.

« Cette situation française contraste avec celle de nos partenaires européens, qui ont commencé à réduire leurs déficits et leurs dettes. Ce n’est ni satisfaisant ni acceptable », a déclaré Pierre Moscovici dans un entretien aux Echos.

La deuxième économie de la zone euro est critiquée par la Commission européenne pour déficit excessif – la procédure devrait être formellement ouverte cette semaine – et pourrait subir une nouvelle dégradation de sa note souveraine par une agence de notation, après celle décidée par S&P fin mai.

Bercy conteste certaines conclusions

En conclusion, le rapport juge « indispensable d’engager résolument l’effort de réduction du déficit public pour inscrire la dette sur une trajectoire descendante », d’autant que le poids de la dette va augmenter, pour atteindre 72,3 milliards d’euros en 2027, selon les prévisions du gouvernement, soit plus que le budget de l’Éducation nationale. « Réduire notre dette est une obligation brûlante », quel que soit le gouvernement qui sera finalement formé à l’issue des législatives anticipées, a déclaré aux Echos le premier président de la Cour des comptes. « Il y a plusieurs moyens d’y parvenir, c’est la démocratie, mais cet impératif doit être partagé », insiste-t-il.

Dans une réponse jointe au rapport, le ministère de l’Economie et des Finances conteste certaines de ses conclusions. Il rappelle qu’il a beaucoup dépensé pour protéger les ménages et les entreprises des crises survenues ces dernières années et que, sans cela, « la France n’aurait pas été parmi les premiers pays européens à retrouver un niveau de PIB antérieur à la crise du Covid ».

« La crédibilité de notre gestion budgétaire est attestée par le maintien de la note française par la majorité des agences de notation (…) et par la stabilité » de l’écart de taux d’intérêt avec l’Allemagne « jusqu’à la récente annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale », ajoute-t-il.

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Ray Richard

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