Un président de la République qui semble de plus en plus déconnecté de la réalité, mélangeant causes et conséquences, incapable de reconnaître son double échec et celui de ses troupes (aux élections européennes puis aux législatives). Un président de la République qui temporise, décrète des trêves qu’il invente et qui lui conviennent – ce serait tellement cool d’avoir des Jeux olympiques qui dureraient au moins jusqu’en 2027 –, qui consulte sans fin sans que l’on sache vraiment dans quel but, et qui semble incapable de faire le deuil d’un pouvoir qu’il a largement perdu.
Des ministres qui s’agitent, qui continuent de parler dans les médias alors qu’ils sont censés avoir démissionné, qui siègent en même temps – tiens, un gadget macroniste – sur les bancs de l’Assemblée nationale sans que l’on sache si c’est constitutionnel ou pas, et qui reçoivent des lettres de cadrage budgétaire envoyées par le premier d’entre eux alors qu’ils n’ont plus d’autre légitimité que celle de « traiter des affaires courantes », c’est-à-dire de couper des rubans d’investiture. Comme dans un univers parallèle. Et un parti du président dont personne ne connaît plus le nom – la Renaissance en marche ? – tant il a changé de nom et que l’on ne sait ni à quoi il sert ni quel est son programme.
Le vaudeville du NFP
Une gauche incarnée par le NFP qui joue la farce et le théâtre d’ombres. Qui cherche depuis des semaines un Premier ministre à proposer, pour sortir du chapeau de la mairie de Paris un illustre inconnu – peut-être très compétent – qui avait surtout prévu de partir en vacances en août. Une gauche incarnée par le NFP dont les composantes ne s’accordent sur presque rien, mais qui font semblant, certaines pour sauver leur place comme Olivier Faure, d’autres comme Jean-Luc Mélenchon avec pour seul objectif de déclencher une élection présidentielle, quitte à évoquer un processus d’impeachment qui relève du fantasme ou de la science-fiction. Une gauche incarnée par le NFP qui nous laisse avec cette question lancinante : fait-elle tout pour gouverner ou au contraire pour ne absolument pas gouverner ?
Des LR qui ne savent plus sur quel pied danser, ni à quel président de parti se vouer, entre Éric Ciotti, apparemment destitué mais qui s’accroche à son titre comme un mollusque sur son rocher, et Laurent Wauquiez, le « chef » autoproclamé dont la seule obsession est l’Élysée. Des LR totalement Macron-compatibles mais qui refusent tout accord avec Emmanuel Macron, car gouverner est bien trop sale et bien trop dangereux. Des LR qui répètent les mêmes idées depuis Nicolas Sarkozy, c’est-à-dire une éternité, et qui pensent que les Français ne s’en sont pas rendu compte.
Déni de la défaite
Toute une classe politique qui vit dans le déni – de la défaite –, dans l’illusion – de la victoire, ou dans la croyance – de l’influence. Toute une classe politique qui donne une image désastreuse des Français, où les jeux personnels, les inimitiés, les calculs, la primauté des avantages, les ambitions stériles semblent servir de seule boussole. Toute une classe politique qui justifie les critiques les plus acerbes à son encontre, et ne peut que désespérer les citoyens.
Pendant ce temps, le RN, le parti qui a réellement gagné les élections européennes et législatives, ne fait rien, ne dit rien, se tient sagement à l’écart de cette sarabande malsaine. Il compte les points, distribue quelques tapes dans le dos ou des remontrances, et peut commenter à loisir, depuis son petit siège bien au chaud sur les plateaux des chaînes d’information. Il n’a plus qu’à attendre, il n’a plus qu’à contempler avec délectation le spectacle offert, qui confortera ses électeurs dans leurs convictions, convaincra les autres de voter pour lui, et dégoûtera ceux qui avaient voulu l’empêcher de repartir. Il attend son heure, grand vainqueur de la séquence ouverte par une dissolution incompréhensible et sa gestion chaotique par le président de la République.
Il attend, et Marine Le Pen doit rire en se demandant, et nous avec elle, comment les partis qui appellent systématiquement à la bloquer, ainsi que le RN, au second tour des élections en réactivant dans l’urgence un « front républicain » font tout, vraiment tout, pour hâter son accession au pouvoir entre deux élections. Incroyable paradoxe. Oui, elle doit rire, et nous pouvons pleurer.
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