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La Chine décrète une mobilisation générale pour relancer sa natalité

Longtemps pays le plus peuplé du monde, la Chine a perdu ce titre en 2023 face à l’Inde. Et si le pays compte encore 1,4 milliard d’habitants, la tendance à la baisse devrait se poursuivre au cours des prochaines décennies. Un phénomène que le gouvernement chinois espère contrer. C’est pourquoi le Conseil d’État a présenté ce lundi des mesures pour relancer la natalité dans le pays. Objectif : construire « une nouvelle culture du mariage et de la procréation ». Pour ce faire, il veut encourager « le respect de la procréation, le mariage à l’âge approprié et le partage des responsabilités entre parents en matière de garde des enfants ».

Les mesures proposées comprennent l’amélioration de l’assurance maternité, du congé de maternité, des subventions et des ressources médicales pour les enfants. Le cabinet a également appelé les gouvernements locaux à budgétiser les services de garde d’enfants et à prélever des taxes et des frais préférentiels pour ces services.

Outre la maternité, les mesures touchent également d’autres domaines, comme l’éducation. Les autorités locales sont invitées à renforcer le soutien financier aux étudiants issus de familles défavorisées, en mentionnant « élargissement progressif du champ de l’enseignement gratuit ». L’accent est également mis sur l’emploi et le logement, ce deuxième secteur traversant une crise profonde en Chine. Il est demandé aux autorités locales d’aider davantage les familles avec plusieurs enfants à acquérir un logement, mais aussi de renforcer la protection des femmes enceintes et des nouvelles mamans parmi les travailleurs.

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Les jeunes évitent le mariage et les enfants

Ces mesures adoptées font suite à une enquête menée en octobre par les autorités sanitaires chinoises. Bien que ses résultats ne soient pas encore connus, son objectif est de comprendre les facteurs qui gouvernent les attitudes à l’égard de la procréation. Car près de 10 ans après avoir mis fin à sa politique de « l’enfant unique », la Chine peine à augmenter sa natalité.

Pour rappel, le pays a introduit cette limitation au début des années 1980 pour endiguer sa croissance démographique alors exponentielle. Le nombre moyen d’enfants par femme en Chine était en effet de 7 dans les années 1960. En 2022, ce taux s’élevait à 1,05, selon les chiffres fournis à l’AFP en début d’année par le démographe indépendant He Yafu, affirmant se baser sur des chiffres officiels. Ce taux doit être d’au moins 2,1 pour qu’une population se renouvelle et maintienne ses effectifs.

« La tendance au déclin de la population chinoise est fondamentalement impossible à inverser » parce que les jeunes générations « ne sont généralement plus disposés à avoir beaucoup d’enfants », Yafu, croit-il.

Parmi les principales raisons : le coût élevé d’élever un enfant. En 2019, ce coût, de la naissance à 18 ans, s’élevait à 485 000 yuans (62 000 euros), selon le cabinet pékinois YuWa Population Research. Soit près de sept fois le produit intérieur brut (PIB) du pays par habitant cette année-là. Un niveau bien supérieur par rapport aux Etats-Unis (4,11) ou à l’Australie (2,08) par exemple.

Autres explications : la méfiance croissante des jeunes générations envers l’institution du mariage, étape nécessaire en Chine avant d’avoir un bébé. Le nombre croissant de femmes poursuivant des études supérieures repousse également l’âge de la première grossesse. À tel point que le slogan « pas de mariage, pas d’enfants » est devenu populaire sur Internet chinois.

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L’économie chinoise souffre

Cette crise démographique entraîne un vieillissement de la population chinoise. L’année dernière, la Chine a connu une augmentation significative de sa population âgée. Près de 17 millions de personnes supplémentaires ont plus de 60 ans, selon les statistiques officielles. Cette tranche d’âge représente déjà plus de 20% de la population. Et cette proportion devrait atteindre près d’un tiers d’ici 2035, selon le groupe de recherche Economist Intelligence Unit.

Ce qui n’est pas sans conséquences. Notamment sur le plan économique : la Chine s’est longtemps appuyée sur sa vaste main-d’œuvre pour stimuler sa croissance. Cette tendance déséquilibre également le système de retraite. A tel point que le gouvernement chinois a décidé en septembre de relever progressivement l’âge de la retraite à partir de 2025. Autre problème de cette crise démographique : l’aspect social. Car la tradition impose en Chine de prendre soin des parents âgés, dans une plus grande mesure que dans les sociétés occidentales. Cependant, la plupart des couples sont aujourd’hui composés de deux adultes qui ne sont que des enfants. Ces derniers ont donc fort à faire, devant s’occuper de leurs quatre parents âgés.

Dans ce contexte, le gouvernement chinois a présenté en début d’année un grand plan seniors pour faire face aux besoins croissants de services du secteur (maisons de retraite, divertissement, soins à domicile ou encore livraison de repas). En septembre, il s’est également engagé à améliorer les soins aux personnes âgées. Reste à savoir si toutes ces mesures, en faveur des jeunes et des vieux, seront suffisantes pour briser ce cercle vicieux.

(avec les agences)