La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu jeudi ses taux directeurs à leurs niveaux actuels tout en ouvrant la voie à un assouplissement de sa politique monétaire, ce alors que le positionnement de la Réserve fédérale risque de compliquer le processus d'assouplissement. Le taux de dépôt a été laissé à 4,0% pour la cinquième réunion consécutive. Si les prochaines données continuent de confirmer le ralentissement de la dynamique des prix, le conseil des gouverneurs a souligné dans le communiqué accompagnant sa décision qu'il "serait opportun de réduire le caractère restrictif actuel de la politique monétaire" Il s'agit de la première référence de la BCE à des baisses de taux depuis le début de son cycle de resserrement monétaire. "Quelques" membres du Conseil des gouverneurs ont estimé qu'il était déjà temps de baisser les taux au cours de la réunion précédant la décision de jeudi, a confirmé la présidente de l'institution, Christine Lagarde, au cours d'une conférence de presse. La responsable a ajouté que davantage de données et de nouvelles projections économiques seraient disponibles en juin. "Même si la décision de politique monétaire ne mentionne pas juin comme le mois pour une première baisse de taux, la réunion d'avril sera probablement la dernière avant l'assouplissement", écrivent les analystes d'ING. Dans son communiqué de presse, la banque centrale précise que le flux de données confirme dans l'ensemble ses précédentes prévisions d'inflation, tandis que les pressions salariales se modèrent et que les entreprises ne répercutent plus les hausses de coûts sur leurs marges. Les pressions domestiques sur les prix demeurent fortes et les prix des services demeurent élevés, a ajouté la BCE. RÉSERVE FÉDÉRALE Au cours de sa conférence de presse, Christine Lagarde a également souligné que les conditions économiques en zone euro et aux Etats-Unis n'étaient pas les mêmes. Le dernier indicateur d'inflation américain a surpris à la hausse et fait craindre que la Fed ne maintienne ses taux à leurs niveaux actuels, ce qui pèserait sur les actifs européens. "Nous sommes dépendants aux données, pas dépendants à la Fed", a déclaré Christine Lagarde. Les analystes estiment que le principal risque tient, pour la BCE, à un report des baisses de taux de la Fed. L'écartement entre les politiques monétaire des deux zones éroderait l'euro et pourrait créer de l'inflation importée. Pour autant, un tel décalage ralentirait l'assouplissement monétaire en zone euro mais ne l'empêcherait pas, tant est importante la différence de performance entre les économies des deux zones. "La BCE gardera un oeil sur la Fed. Si la Fed ne baisse pas ses taux cette année, la BCE ne pourra baisser les siens que deux fois, peut-être", estime Arne Petimezas, analyste chez AFS Group. (Rédigé par Corentin Chappron, édité par Sophie Louet)