"J'y suis allée deux fois de trop" : au procès pour viol de Mazan, la défense hasardeuse de Dominique D., jugé pour six viols
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« J’y suis allée deux fois de trop » : au procès pour viol de Mazan, la défense hasardeuse de Dominique D., jugé pour six viols

« J’y suis allée deux fois de trop » : au procès pour viol de Mazan, la défense hasardeuse de Dominique D., jugé pour six viols

On ne savait pas trop à quoi s’attendre de la part de Dominique D., l’un des coaccusés et « le plus grand complice » de Dominique Pelicot, selon le principal accusé. Mardi, ce petit homme au regard perçant et aux paroles claires a posé un regard lucide sur son passé d’enfant de la Ddass, son rôle de père, ses faits d’armes en Afghanistan avant sa reconversion de camionneur, une « passion » .

En garde à vue, Dominique D. est aussi l’un des rares à avoir posé cartes sur table avec les enquêteurs. Tout en ayant décidé à l’audience de nier le terme de viol, estimant comme tant d’autres n’avoir jamais eu cette « intention ». Interrogé ce mercredi, l’homme de 45 ans a tenté en vain de concilier ces deux positions inconciliables, en changeant sa version des faits.

« Je ne me suis pas réveillé un matin en me disant Hé, aujourd’hui je vais aller chez un couple pour commettre un acte criminel », dit-il en ouvrant le ban. « Oui, finalement, ce n’est pas un fait, mais six », corrige Roger Arata, le président du tribunal correctionnel du Vaucluse. Dominique D. a aussi la particularité d’avoir avoué plus que ce qui lui était reproché : cinq épisodes ont été retrouvés sur le disque dur de Dominique Pelicot. Il a toujours affirmé être venu au domicile du couple à Mazan en 2015, six fois au total.

« Novice » en libertinage

La date de cette première, il est vrai, n’est pas anodine. En contact depuis quelques jours sur Coco.fr, via le salon baptisé « À son insu », Dominique D. et Pelicot, alias « Dorian84 » ou « Balou », conversent. « Il cherchait un homme à offrir à sa femme pour la Saint-Valentin », explique l’ancien camionneur, « pas enthousiaste » au début car « novice » en matière de libertinage. « J’ai demandé des garanties pour savoir où j’allais. » Il demande à voir « madame », et la voit le lendemain, alors qu’elle sort de la douche, filmée à son insu par son mari qui lui passe de la lotion sur le dos.

Il souhaite également jauger « l’environnement » et, le 13 février, surveillant les faits, il est invité à Mazan où Pélicot le présente comme un confrère électricien venu chercher un outil. « Il était une heure, Madame était assise sur le canapé en train de lire un livre. » Le principal accusé parle plutôt d’un rendez-vous au centre commercial Auchan, mais cela n’a pas d’importance. C’est également ce jour-là qu’on lui aurait montré des photos de Gisèle Pelicot se faisant maltraiter par d’autres hommes. « Il me dit qu’il y aura de l’alcool et des tranquillisants. J’ai dit Si c’est vraiment ce que tu veux faire, OK. »

Le lendemain, Dominique D. s’est présentée avec des préservatifs. « Tu n’en auras pas besoin », dit Pélicot, qui l’emmène dans la chambre, viole sa femme puis lui dit de prendre sa place. Plutôt que de plaider qu’il pensait qu’elle allait se réveiller ou qu’il faisait semblant de dormir, l’accusé a donc tenté une nouvelle ligne de défense : Gisèle était bel et bien inconsciente, mais, selon lui, cela était conforme à ce qui lui avait été dit. vendu « .

« Il m’a donné une totale confiance »

Anticipant les questions du tribunal, il s’empresse de préciser : « J’ai pris toutes les garanties, mais j’ai omis la plus grande, le consentement de la dame. Je voulais donc vous présenter mes excuses», dit-il, avant d’atténuer sa propre responsabilité en affirmant qu’il ne comprenait pas «à qui il avait affaire». « Il m’a donné toute confiance, c’est une personne âgée, un père de famille, on ne peut pas imaginer le pire », explique-t-il, moins novateur que ses coaccusés sur ce point.

Soucieux de donner du crédit à sa version, Dominique D. explique néanmoins qu’il a fini par comprendre ce qui se passait. « Au début c’était un couple libertin puis petit à petit c’était plutôt son propre délire », regrette-t-il, affirmant n’avoir bronché qu’au quatrième rendez-vous. « Il ne parlait plus de tranquillisants mais de somnifères. Là, j’ai réalisé que ce que j’avais fait était grave.

Il reviendra cependant à nouveau en 2019 et 2020, quelques jours avant l’arrestation du principal accusé après avoir filmé sous les jupes de femmes dans un supermarché de Carpentras, point de départ de cette affaire aussi épouvantable que tentaculaire. « En garde à vue, vous avez reconnu les faits, et maintenant vous nous plaidez que l’accident s’est répété six fois ? », s’étrangle l’avocat de Gisèle Pelicot. « J’y suis allé deux fois de trop », concède-t-il maladroitement.

VidéoLa vidéo de l’interpellation de Dominique Pelicot à l’origine de l’enquête pour viol

L’accusé se justifie par les rappels, voire le « harcèlement » de Pélicot. Ses relevés téléphoniques révèlent qu’il a bombardé tout son carnet d’adresses aux mêmes dates, à la recherche d’un homme-instrument pour assouvir ses ignobles fantasmes. L’un de ces SMS frise le slogan publicitaire : « Après vous j’arrête de le proposer, alors profitez-en ». Une formulation qui ne laisse guère de doute sur ce que savait son invité.

Roger Arata, qui connaît sa version de la garde à vue, où il n’a jamais été question que Gisèle soit requérante, se tire les oreilles. « Sérieusement, Monsieur D., pouvons-nous imaginer que Mme Pelicot puisse participer au stratagème dès la première fois ? Honnêtement ? » « Honnêtement, non. » Sans doute lassé de tant de lâchetés et de revirements brouillons à l’audience, l’avocat général se lève à son tour.

« À son insu, savez-vous ce que cela signifie ? »

« Monsieur, dès votre première audition, vous dites que vous savez que cela se fait à son insu », déplore Laure Chabaud. À son insu, savez-vous ce que cela signifie ? » « Contre lui… » confirme l’accusé. « Alors elle sait ou elle ne sait pas ?  »  » Non « .  » Elle ne sait pas ?  »  »  » Non « . L’accusé est aussi l’un des rares à avoir détaillé l’ensemble des consignes de précaution émises par Pelicot : ne pas fumer ni se parfumer, se garer loin… « A votre avis, pourquoi vous déshabillez-vous dans le salon ? » « Aucune idée. » « Aucune idée, vraiment? » »

« Je suis assez surpris par votre ligne de défense », se permet à son tour de juger Pélicot, en plein ravi. Me Béatrice Zavarro, son avocate, s’emploie également à lui faire regretter les termes « menteur » et « manipulateur » utilisés par Dominique D. pour définir son client. « Parce qu’est-ce que tu es ? », lui demande-t-elle. « Un coaccusé ». « Vous venez six fois ? Vous sentez-vous vraiment différent de M. Pelicot ? » « Évidemment », s’offusque le coaccusé. « Tout le monde l’appréciera », conclut la robe noire.

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