Si vous ne souhaitez pas passer la journée à l’aéroport, évitez de prendre l’avion le 25 avril. Ce jeudi s’annonce comme une « journée noire » pour le transport aérien français. Tous les syndicats de contrôleurs aériens appellent à la grève ce jour-là, après l’échec des négociations sur le projet de réforme des services de navigation aérienne et des réunions de conciliation tenues ces derniers jours.
Même si le droit de grève des contrôleurs aériens est désormais soumis à une obligation de déclaration individuelle préalable, en plus du service minimum, les annulations et retards de vols risquent de se compter par centaines, pour les vols au départ de France, mais aussi pour ceux qui sont juste en passant par notre espace aérien. L’ensemble du trafic aérien européen sera impacté.
Jusqu’à 70% de vols annulés ?
Selon une première estimation fournie aux compagnies, jusqu’à 70 % des vols de la journée pourraient être annulés dans les grands aéroports. Le pourcentage précis de « réduction du programme » demandé par la Direction générale de l’aviation civile ne sera fixé que mardi prochain, les grévistes ayant jusqu’à cette date pour adresser leurs déclarations individuelles. Mais la mobilisation s’annonce déjà forte, même si les différents syndicats de la DGAC avancent en ordre dispersé.
Pour le principal syndicat des contrôleurs aériens, le SNCTA, à l’origine du mot d’ordre de grève, le problème ne réside pas tant dans le projet de réorganisation des services de la DSNA que dans les mesures sociales d’accompagnement, jugées très insuffisantes. . Le SNCTA et d’autres syndicats estiment que les efforts de productivité nécessaires pour faire face à l’augmentation du trafic aérien d’ici 2035 doivent s’accompagner d’une augmentation équivalente des rémunérations. Mais aussi des avantages supplémentaires en termes de primes, de congés et de classement indiciel.
Augmentation de salaire versus gain de productivité
Dans la lettre accompagnant son préavis de grève, le SNCTA détaille ses revendications. Elles vont de l’accès aux niveaux de l’indice de la haute fonction publique (HEB et HEA) pour tous les contrôleurs aériens en fin de carrière, à une augmentation salariale de 5,04% par an en 2025, 2026 et 2027, en passant par un doublement de la qualification spéciale. (ISQ), actuellement autour de 1 000 par mois, et la revalorisation d’autres primes. Au total, ils représentent plus de la moitié des revenus des contrôleurs aériens.
Le syndicat majoritaire réclame également 18 jours « de récupération » supplémentaires par an, pouvant être déposés sur un compte épargne temps non plafonné. Et ce, en compensation de la suppression des « autorisations ». Une pratique tolérée jusqu’à présent, par laquelle les contrôleurs aériens s’autorisent entre eux des absences incalculables, lorsque le trafic ne nécessite pas un effectif complet.
Le sujet des « autorisations » complique la donne
Ce sujet des « autorisations » n’apparaissait pas dans le projet de réforme. Mais après une collision évitée de justesse à l’aéroport de Bordeaux, le 31 décembre 2022, le Bureau d’enquête et d’analyse (BEA) a recommandé la suppression de cette pratique et un contrôle plus strict du temps de travail des contrôleurs routiers. ciel, pour des raisons de sécurité.
Suite à cela, la DGAC a annoncé, le 25 mars, l’installation sur tous les sites de navigation aérienne de machines à badges biométriques et de pointeuses, destinées à éradiquer la pratique des « autorisations ». Ce que certains syndicats ont aussitôt dénoncé comme une « mesure vexatoire ».
Divergences sur le coût des réévaluations
Indice, rémunération et blaireaux sont autant de points de friction sur lesquels les négociations ont jusqu’à présent échoué. Selon des chiffres non officiels, le coût global de ces revendications s’élèverait à environ 50 millions d’euros pour la DGAC. De bons experts en la matière avancent même le chiffre de 3 000 euros de plus par mois, par contrôleur, sur trois ans, en additionnant les diverses augmentations de salaire, de l’ordre de 1 500 euros par mois, et l’augmentation des primes.
Un chiffre qualifié de « désinformation » par un représentant syndical. Le montant réel de la revalorisation demandée serait nettement inférieur, affirme-t-il, sans vouloir avancer de chiffre. Par ailleurs, le contrôle aérien français étant entièrement financé par les redevances des compagnies aériennes, dont les recettes augmentent avec la croissance du trafic, les mesures en question ne coûteraient pas un centime au contribuable.
Un avis peut en cacher un autre
Or, en période de « disette » budgétaire, les revendications des contrôleurs, dont la rémunération annuelle brute (salaires + primes et indemnités) s’élève à 96 000 euros en moyenne, auraient été rejetées par Matignon. D’autant que le précédent gouvernement avait déjà accepté des augmentations de primes en décembre dernier, en échange d’un engagement du SNCTA et de l’Unsa-ICNA, de ne pas faire grève pendant les Jeux olympiques.
Un engagement qui tient toujours, assure-t-on de source syndicale, mais qui n’interdit pas de déposer un autre préavis de grève, dans la foulée de celui de jeudi, si aucun accord n’est trouvé d’ici là. Avec pour conséquence, une perte potentielle de revenus de plusieurs millions d’euros par jour de grève pour les compagnies aériennes.