Discours sombre, ton sérieux, regard sévère. Les adieux à la nation du président américain Joe Biden, mercredi 15 janvier, ont résonné comme un avertissement, cinq jours avant la passation du pouvoir à Donald Trump.
Lors d’un court discours de moins de vingt minutes, prononcé aux heures de grande écoute derrière le Bureau Ovale, le futur ancien locataire de la Maison Blanche a exprimé son inquiétude de voir l’Amérique tomber aux mains d’un « oligarchie »ciblant sans nommer son successeur et les multimilliardaires de la technologie se sont désormais alignés derrière le républicain.
« Je veux mettre en garde le pays contre certaines choses qui m’inquiètent beaucoup »a lancé le démocrate de 82 ans. « Il s’agit d’une dangereuse concentration du pouvoir entre les mains d’un très petit nombre de personnes ultra-riches » et « des conséquences dangereuses si leur pouvoir est laissé sans limites »il a développé.
« Une oligarchie se dessine en Amérique » et elle « menace concrètement toute notre démocratie, nos droits et libertés fondamentaux »a poursuivi Joe Biden, dans une allusion évidente à Donald Trump, milliardaire, ainsi qu’aux patrons de la tech extrêmement riches, au premier rang desquels Elon Musk.
« Une avalanche de désinformation »
Il a évoqué l’apparition d’un « complexe techno-industriel » avec un immense pouvoir, faisant écho au discours d’adieu de l’ancien président Dwight Eisenhower, qui avait mis en garde en 1961 contre la montée du « complexe militaro-industriel ».
Le patron de Tesla, SpaceX et de la télévision américaine NBC. Ces « Trois personnes possèdent aujourd’hui plus de richesses que la moitié la plus pauvre de la société américaine »Bernie Sanders, figure de la gauche aux Etats-Unis, a protesté mardi.
« Les Américains sont ensevelis sous une avalanche de désinformation qui favorise les abus de pouvoir »a encore déploré Joe Biden, appelant à « être responsable » aux réseaux sociaux et à mettre en place « garde-corps » sur l’intelligence artificielle. Là « La concentration des richesses et du pouvoir (…) mine le sentiment d’unité et de bien commun. Cela provoque la méfiance et la division. »dit encore le 46e président des États-Unis.
Abandonnant l’optimisme qui caractérise souvent ses discours, il s’alarme également « forces puissantes » qui voudrait « éliminer les mesures que nous avons prises pour lutter contre la crise climatique. »
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Ces avertissements très forts relèguent au second plan, dans son discours, la volonté de défendre son bilan, notamment le lancement de gigantesques plans d’investissement et le rétablissement des grandes alliances internationales des Etats-Unis.
Humiliation
En rendant lundi à son rival républicain les clés de la Maison Blanche, qu’il lui avait enlevées au prix d’un dur combat il y a quatre ans, Joe Biden connaîtra une forme d’humiliation. En 2019, le démocrate assurait que Donald Trump « resterait dans l’histoire comme une aberration passagère ». Mais c’est la présidence démocrate qui pourrait rester comme la dernière d’une époque révolue, dans un pays secoué par de violents changements politiques, culturels et économiques.
Joe Biden a prêté serment deux semaines après l’assaut du Capitole par les partisans de Donald Trump, qui refusaient de reconnaître la défaite de leur champion à l’élection présidentielle. Président impopulaire, il n’a jamais réussi à dissiper les inquiétudes concernant son âge ni à contrer l’attrait de la rhétorique populiste des républicains. Seuls 36 % des Américains ont une vision positive de sa présidence et 33 % ont une opinion favorable à son égard, selon un sondage publié mercredi par CNN.
Le président démocrate avait décidé au printemps 2023 de se présenter à nouveau face à Donald Trump mais s’est retiré de la course en juillet, laissant sa place à la vice-présidente Kamala Harris, nettement battue le 5 novembre. Si Joe Biden laisse à son successeur une croissance robuste et très faible taux de chômage, son mandat reste synonyme pour les ménages américains d’une très forte hausse du coût de la vie.
Après cinquante ans de vie politique, Joe Biden a conclu son discours sur une lourde note de responsabilité. « À votre tour de monter la garde »il a dit à ses compatriotes.