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Jeux Paralympiques : Cyril Jonard, aveugle et sourd, décroche le bronze à 48 ans

Dans la catégorie des déficients visuels de moins de 90 kilos, le Français Cyril Jonard a décroché la médaille de bronze, vingt ans après son titre à Athènes. Une récompense partagée avec un public attaché à ce grand champion, qui n’a entendu sa ferveur qu’après le combat, une fois appareillé.

Publié le 7 septembre 2024




Florent LE DU

A peine récompensé de son bronze, Cyril Jonard ne pense qu’à la fête qui va suivre. « Je veux beaucoup de bière et des drapeaux bleu-blanc-rouge », il s’est amusé, samedi après-midi. « Très content » Pour remonter sur le podium à 48 ans, vingt ans après son sacre à Athènes, seize ans après l’argent à Pékin en 2008, le judoka (catégorie J1, moins de 90 kg) a même digéré sa déception de la demi-finale, perdue contre le Britannique Daniel Powell. Et qu’il pensait avoir remportée : un ippon lui a été accordé sur le gong, avant que celui-ci ne soit annulé. « L’arbitre n’était pas bon, brouillon », a regretté le Français à l’issue de sa compétition.

La langue des signes tactile pour communiquer

Une confusion due aussi au double handicap de Cyril Jonard, sourd en plus d’être aveugle. L’arbitre doit donc lui indiquer, en lui prenant la main, ses décisions et ses consignes, ce qui n’est pas toujours clair pour lui, a-t-il admis. Mais lors du match pour le bronze, le Limoges n’a laissé aucune chance au hasard. Après un sweep pour faire tomber son adversaire Turgun Abdiev (Ouzbékistan), Cyril Jonard l’a immobilisé pendant vingt secondes : ippon, et médaille de bronze. Heureux, le Français a ensuite posé un pied à terre, et lui a fait un pied de nez de la main droite. « Je voulais être comme Kylian Mbappé, a-t-il expliqué en riant après la réunion. Quand j’ai gagné à Athènes, j’ai fait un grand saut. Mais cette fois, ce n’est pas une victoire, alors j’ai fait quelque chose entre les deux. J’ai aussi signé un grand sourire. »

En zone mixte, les questions des journalistes lui sont transmises par son entraîneur et ami Jason Guillot. Pour communiquer avec son athlète, il signe directement dans la main de ce dernier, ce qui lui permet de comprendre le langage des signes lorsqu’il le touche.

Tours d’honneur et macarena

Cyril Jonard porte toujours un appareil auditif, qui ne lui permet pas de bien entendre mais de distinguer les vibrations. Après son combat pour le bronze, il a remis son appareil, qui a presque saturé l’Arena Champs-de-Mars tant elle hurlait de joie en voyant l’attachant Français rafler une médaille à 48 ans. « C’était incroyable tout ce bruit pour moi, quelle sensation ! » il sourit. Conscient de l’ambiance exceptionnelle qui l’entourait après sa victoire, le judoka se lança donc dans une longue série de célébrations. Grands signes des bras pour haranguer la foule, macarena improvisée, sauts sur le dos de son coach… Son bonheur n’est pas feint. Même après la remise des médailles, il fit une nouvelle fois un tour d’honneur, cette fois avec son fils Naoki sur les épaules – le petit frère d’Athena, prénommé en souvenir de la victoire de 2004.

Cette récompense s’ajoute à une liste de faits d’armes qui ferait rougir Teddy Riner. Champion du monde en 2022, triple champion d’Europe, Cyril Jonard a également remporté quatre médailles aux Deaflympics, les Jeux réservés aux personnes atteintes de surdité. Un exploit compte tenu de sa cécité.

Cette série de compétitions ne lui permet pas de vivre décemment du sport. Il a donc trouvé un emploi au service des sports de la mairie de Limoges. Après sa victoire dans la lutte pour le bronze, il avait aussi un message à transmettre à ses  » chef « Le maire Eric Roger Lomberti (LR) : « Je veux des drapeaux bleu-blanc-rouge sur les bus urbains tous les jours ! »

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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