Jeune homme tué à Cherbourg, la famille ne comprend pas le maintien en liberté de la policière
« Repose en paix mon frère, nous t’aimons ». C’est derrière une grande banderole blanche avec un coeur dessiné en rouge que près de 600 personnes ont défilé mercredi 12 juin à Cherbourg (Manche). Une marche pour rendre hommage à Sulivan, un jeune homme de 19 ans tué dimanche soir par une policière qui a été mis en examen pour homicide volontaire mais libéré sous contrôle judiciaire.
» C’est incompréhensible. Ce jeune homme a été abattu alors qu’il était à pied et non armé. On mesure, une fois de plus, le poids que portent les syndicats policiers en France. estime Me Yassine Bouzrou, l’avocat de la famille de Sulivan. « Le placement en détention provisoire reste vraiment l’exception dans ce type de dossiers »indique, de son côté, Christelle Sanier, déléguée du syndicat Alliance pour la Manche.
Dimanche soir, trois policiers ont tenté de contrôler une voiture qui roulait à une vitesse excessive à Cherbourg-en-Cotentin. Selon l’accusation, le conducteur n’a pas « n’a pas respecté la convocation » et a continué son chemin avant d’être contraint de s’arrêter devant le véhicule d’une deuxième équipe de police. Les trois occupants ont alors pris la fuite à pied : le premier a réussi à s’enfuir, le deuxième a été arrêté tandis que le troisième, Sulivan, a été retrouvé. « a fait face à deux policiers du deuxième équipage et a délibérément bousculé l’un d’entre eux alors qu’il s’enfuyait »selon les précisions fournies lundi par Pierre-Yves Marot, le procureur de Cherbourg. « Le fonctionnaire a ensuite utilisé un pistolet à impulsions électriques » tandis qu’un « Un autre agent a utilisé son arme à feu, le touchant mortellement à la poitrine »» a ajouté le magistrat qui s’est ensuite désisté au profit du centre d’enquête de Coutances.
« Un fonctionnaire expérimenté, pas du tout connu pour sa gâchette facile »
Ce mercredi, le conducteur du véhicule, qui s’est avéré volé, a été condamné à huit mois de prison ferme pour recel et défaut de permis. La veille, le policier à l’origine de la fusillade mortelle avait été mis en examen pour homicide volontaire. « C’est une fonctionnaire expérimentée et très appréciée, pas du tout connue pour sa gâchette facile. Dans ce genre de circonstances, tout se décide en une fraction de seconde. » souligne Christelle Sanier. « Elle n’a pas tiré dans le dos de ce jeune homme et si elle a utilisé son arme, c’est qu’elle se sentait confrontée à une situation menaçante », ajoute le syndicaliste.
Me Bouzrou insiste sur le fait que Sulivan était à pied et non armé. « La police ne pourra donc pas dire que ce jeune homme pourrait présenter un risque pour autrui en s’enfuyant en voiture », indique-t-il. Je constate également que le deuxième policier a utilisé son Taser. C’est la preuve qu’il était possible de l’arrêter sans utiliser d’arme mortelle. ». Le fait que ce deuxième policier ait utilisé son Taser est également constaté par Christelle Sanier mais, selon elle, comme « la preuve que l’individu, par son attitude, pouvait donner le sentiment d’être menaçant ».
Après sa mise en examen, la policière a été placée sous « contrôle judiciaire strict » selon l’accusation. Il lui est interdit de se rendre à Cherbourg, d’exercer une activité de police, de détenir ou de porter une arme. « La famille de Sulivan est très choquée. Toute personne en France qui en tue une autre de sang-froid est placée en détention provisoire… sauf lorsqu’elle travaille dans la police », estime Me Bouzrou, rappelant la forte mobilisation des syndicats lorsque, en août 2023, la justice a incarcéré un policier du Bac marseillais accusé d’avoir grièvement blessé Hédi, 22 ans, via notamment un lancer de balle défensive (LBD). « Savoir en prison m’empêche de dormir » Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale, l’avait alors déclaré au Parisien. » D’une manière générale, je considère qu’avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans l’exercice de son travail. il a ajouté, excluant « les questions qui concernent la probité ou l’honnêteté ».
Selon un rapport parlementaire rendu public en mai, les tirs de la police, dans le cadre d’un refus d’obtempérer, ont entraîné la mort d’une personne en 2020, de deux personnes en 2021, de treize personnes en 2022 et de trois personnes en 2023. En 2013, huit policiers ont été tués alors qu’ils intervenaient en cas de refus d’obtempérer.