Un ancien talent du cinéma d’animation aujourd’hui jugé pour actes monstrueux. Une peine de 25 ans de réclusion criminelle avec période de sûreté aux deux tiers a été requise jeudi contre un ancien graphiste « star » de Disney et Pixar, jugé à Paris pour complicité de viols et d’agressions sexuelles sur plusieurs centaines de jeunes filles philippines.
« Côté jardin, vous avez le graphiste qui épate les enfants (…) puis côté tribunal, Bouhalem Bouchiba est un réalisateur pédophile qui écrit ses propres films d’horreur », a déclaré l’avocat général Philippe Courroye, en introduction de son réquisitoire.
Le ministère public a également requis un suivi socio-judiciaire de 10 ans à l’encontre du prévenu prévoyant une obligation de soins, ainsi qu’une interdiction d’exercer une profession impliquant des mineurs. Le verdict est attendu ce jeudi.
Actes de torture et de barbarie
L’ancien graphiste de 59 ans est jugé depuis mardi devant la cour d’assises de Paris pour complicité de viols et agressions sexuelles répétées sur mineures. Il est également poursuivi pour complicité de traite aggravée de mineurs en tant que récidiviste, détention d’images pédopornographiques en tant que récidiviste et visionnage habituel de contenus pédopornographiques en ligne.
Bouhalem Bouchiba est accusé d’avoir, entre 2012 et 2021, payé des femmes philippines pour violer et agresser sexuellement des jeunes filles, pour la plupart âgées de cinq à 10 ans, en direct devant une webcam via la pratique du « live-streaming ». De l’autre côté de l’écran, à plusieurs milliers de kilomètres de là, l’accusé donnait des ordres et se masturbait.
« Si ces petites victimes sont absentes, je suis sûr que vous avez entendu, lors de cette audience, leurs cris, leurs souffrances et leurs sanglots », a déclaré le procureur général. L’ajout de la circonstance aggravante des actes de torture et de barbarie aux faits de complicité de viols, d’agressions sexuelles et de traite des êtres humains était également requis.
Reconnaissances de faits
Plus tôt jeudi, les parties civiles ont demandé que « la voix des grands oubliés » de ce procès, les enfants victimes « qui n’ont ni âge ni visage », soit entendue, selon Me Inès Davau, avocate de l’association La Voix de l’Enfant. . « Nous sommes là pour rappeler que ces enfants sont de vrais enfants, pas des personnages animés », a déclaré Me Céline Astolfe de la Fondation de l’enfance, plaidant en faveur d’une vertu « punitive, dissuasive » et « réparatrice ».
Lors de son interrogatoire mercredi, Bouchiba, qualifié par les experts de « pédophile » à caractère majoritairement « sadique », a reconnu « tous les faits » allégués, y compris les exigences qu’il avait formulées, allant jusqu’à la « torture ». .
«Je cherchais quelque chose de différent, de nouveau, mais sans savoir ce que c’était», se souvient l’accusé, interrogé sur la première fois qu’il a visionné une image pédopornographique. Une petite fille nue, qu’il avait trouvée « par hasard », sur un site pornographique légal. «Cette première photo m’a interpellé et m’a donné envie d’en regarder une deuxième», dit-il d’un ton monotone.
Utilisation du terme « porcs »
Mardi, il a été évoqué son enfance « complexe », marquée par la pauvreté, une quête d’identité, un père alcoolique, alors absent, et un beau-père violent. Toutefois, Bouhalem Bouchiba affirme : ce qui s’est passé dans son enfance « n’est pas une excuse pour les crimes » qu’il a commis. « Je n’ai pas été humain », a-t-il admis.
Petites filles nues ou mises en scène dans des positions sexuelles… Le tribunal avait montré mardi certaines photos trouvées en sa possession. L’accusé, dont les yeux n’avaient pas quitté l’écran, a indiqué avoir ressenti du « dégoût » en revoyant ces images. A l’audience, il a également affirmé avoir eu conscience de la peur des petites filles lors des spectacles, affirmant que leurs larmes « le sortaient de ce délire malsain ». Il dit avoir systématiquement coupé la caméra, ne pouvant plus regarder.
Pour parler de ces enfants, Bouhalem Bouchiba, qualifié par les experts de « pédophile » et de « sadique », a également reconnu avoir utilisé le terme « cochons » et ordonné à leur encontre des actes violents et « scénarisés ». « Vous étiez le directeur », a contesté le directeur juridique Philippe Courroye.
« Couper la tête » d’une petite fille
L’accusé avait par exemple ordonné de mettre « un tee-shirt dans la gueule du cochon » ou de trouver « un cochon pour le couper entièrement ». D’autres demandes, comme celle de porter un couteau sur les parties génitales d’un enfant ou de « couper la tête » d’une petite fille, étaient, selon l’accusé, destinées « à se faire peur », reconnaissant toutefois qu’elles s’apparentaient à « torture ».
Une fois le spectacle terminé et ses fantasmes réalisés, il enverrait l’argent. Entre 50 et 100 euros. Une manière, selon lui, de se dédouaner. « Chaque fois que j’envoyais de l’argent, cela me procurait une libération psychologique », a-t-il expliqué.
Sur l’apparition de ses premiers élans, Bouhalem Bouchiba a affirmé tout au long de l’interrogatoire « n’avoir connu aucun signe » avant 2009, et le fait sur sa belle-fille pour lequel il avait été condamné le 8 avril 2014 à deux ans de prison. et trois ans de probation.
Une peine qu’il juge insuffisante pour stopper sa déviance. « Si j’avais fait au moins un an de prison, la prise de conscience aurait été différente », a-t-il assuré. Selon lui, c’est grâce à sa détention depuis son incarcération en 2021 à la prison de Fleury-Mérogis qu’il connaît « une transformation ».
Loin de sa famille et loin du « tourbillon malsain » dans lequel il s’était enfermé, Bouhalem Bouchiba a déclaré qu’il ne pouvait plus redevenir « l’homme qu’il était avant d’être incarcéré ». « Pendant trois ans, je ne me suis pas masturbé en pensant à un enfant », a-t-il assuré.