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« Je n’ai pas peur »… La première athlète transgenre, Valentina Petrillo, veut inspirer les autres

Avant même sa première course à Paris, la sprinteuse italienne Valentina Petrillo s’apprête à devenir la première athlète transgenre à participer aux Jeux paralympiques (du 28 août au 8 septembre), avec l’espoir d’être « la première d’une longue série ».

En foulant la piste violette du Stade de France le 2 septembre pour le premier tour du 400 m catégorie T12 (déficient visuel), Valentina Petrillo va à 50 ans « vivre le moment le plus important de sa carrière sportive et réaliser son rêve d’enfant », a-t-elle expliqué à l’AFP lors d’un entretien téléphonique.

De retour à son premier amour

Depuis qu’elle a raté de peu la qualification pour les Jeux paralympiques de Tokyo 2021, l’athlète, atteinte depuis l’adolescence de la maladie de Stargardt, une dégénérescence maculaire génétique qui entraîne une perte progressive de la vision, « ne pense qu’à Paris ». Petrillo avait déjà échoué dans les années 1990 à se qualifier pour les Jeux paralympiques de 1996, mais cet échec avait été beaucoup moins douloureux.

« Quand j’étais un homme, je n’étais pas moi-même », insiste-t-elle, « je roulais toujours avec le frein à main serré, je n’étais pas une personne heureuse, pas aussi heureuse que je le suis maintenant, même si j’ai quelques années de plus. »

Née dans un corps d’homme, mariée, Petrillo a fait ce qu’elle appelle elle-même « son coming out » en 2017 et a commencé à vivre sa vie de femme, avant de commencer sa transition et de devenir une femme aux yeux de l’administration italienne en 2023.

Après s’être consacrée au cécifoot, un football à cinq pour les malvoyants, et avoir représenté l’Italie dans les tournois les plus importants, Petrillo a fini par revenir à ses premiers amours, le 200 m, « découvert grâce au mythe Pietro Mennea », ancien recordman du monde et champion olympique 1980, et le 400 m.

Traitement hormonal

Un traitement hormonal lui a permis de diviser son taux de testostérone par quatre et ainsi de se conformer, avec un taux de 5 nanomoles par litre de sang, au règlement de la Fédération internationale d’athlétisme pour pouvoir participer aux épreuves de para-athlétisme féminin. En 2023, elle ramène deux médailles de bronze (200 et 400 m) des Championnats du monde de para-athlétisme de Paris.

L’ingénieure informatique, qui s’entraîne une heure et demie à trois heures par jour, « sauf le dimanche », aborde les Jeux paralympiques avec des objectifs sportifs ambitieux. « Je veux améliorer mes records personnels, 25,77 secondes au 200 m et 58,01 secondes au 400 m. Si j’y parviens, une médaille ne sera peut-être pas loin », dit-elle.

Mais elle est consciente que, plus que ses chronos, c’est son parcours qui va marquer les esprits, mais aussi l’exposer aux critiques, aux menaces ou au cyberharcèlement. Car, trois ans après l’haltérophile néo-zélandaise Laurel Hubbard, devenue la première athlète transgenre à participer aux Jeux olympiques de Tokyo, les mœurs ont peu évolué. Les boxeuses algérienne et taïwanaise Imane Khelif et Lin Yu-ting, qui se sont retrouvées au cœur d’une polémique sur le genre lors des JO de Paris 2024, peuvent en témoigner.

« Je n’ai pas peur, je suis moi »

« Je sais que je vais être critiquée, que certaines personnes ne comprendront pas pourquoi je fais ça, mais je suis là, je me suis battue pendant des années pour en arriver là et je n’ai pas peur, je suis moi », insiste-t-elle.

Valentina Petrillo se considère comme un symbole, et pas seulement dans une Italie où le gouvernement ultra-conservateur de Giorgia Meloni dénonce « l’idéologie du genre » et le « lobby LGBT ». « Je dis souvent que si je l’ai fait, d’autres peuvent le faire. J’espère être la première parmi beaucoup d’autres, j’espère être une référence, une source d’inspiration (…) Mon histoire peut être utile à beaucoup d’autres, malvoyants ou non, trans ou non », assure-t-elle.

Si son père, qui, assure-t-elle, l’a « toujours soutenue et comprise », est trop âgé pour venir à Paris, Valentina Petrillo sera encouragée au Stade de France par son fils, sa fille, son ex-femme et son frère. « J’ai de la chance : je vais faire la plus belle chose que j’ai jamais rêvé de faire, courir dans un stade », conclut-elle.

Jeoffro René

I photograph general events and conferences and publish and report on these events at the European level.
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