Elle avait acheté son petit voilier « pour le prix d’un vélo » alors qu’elle n’avait que 23 ans. Quatre ans plus tard, Tamara Klink a réussi l’exploit d’immobiliser son bateau « Sardinha » pendant dix mois dans un fjord perdu du Groenland. Une période que la navigatrice brésilienne a passée complètement seule, au milieu de la nature et du froid. La jeune femme vient d’achever son périple en délivrant un message poignant. « C’est la fin d’un voyage sans voyager. Car j’ai traversé l’océan pour arriver ici. Mais en arrivant, j’ai traversé le temps. La fin », a-t-elle témoigné sur ses réseaux sociaux.
Connue pour être la plus jeune Brésilienne à avoir traversé l’Atlantique à la voile, Tamara Klink a imité l’aventurier français Guirec Soudée, parti se faire piéger par la glace avec sa poule Monique, ce qui l’a rendu célèbre. Celle qui a « sa famille au Brésil et ses amis en France » a quitté sa baie mais elle n’y retournera pas tout de suite. « Je veux faire les quatre saisons au Groenland. Je suis arrivée à la fin de l’été et je veux suivre l’été. Je vais probablement laisser le bateau ici et continuer à naviguer, peut-être plus au nord », a-t-elle expliqué à nos confrères de Voiles et voiliers où elle tenait une chronique régulière. Une douche tous les quinze jours, voire tous les mois, et une vie de sobriété à bord de Sardinha 2. « Quand je suis revenue en ville, tout me semblait encombrant. Surtout les objets qui ne servent à rien dans les maisons. Aujourd’hui, tout me paraît anormal », confiait-elle à son retour.
« J’ai vécu à une époque très élastique »
Habile avec les mots, la jeune femme de 27 ans a souvent partagé ses émotions et son regard sur cette expérience hors du commun. Au moment de dire adieu à son lieu de retraite, elle a livré ces mots pleins de poésie. « Un soleil plus grand que le monde fait fondre mon sol et me redonne la mer. La banquise devient transparente, se brise, s’effrite. Ce n’est pas un miracle, ce n’est pas de la magie, c’est l’arrivée de l’été. »
À bord de Sardinha, la jeune aventurière vivait seule. Et visiblement, elle aimait beaucoup ça. « La vie en pleine nature n’était pas une surprise, mais je ne pensais pas que je serais heureuse seule. Beaucoup de gens m’avaient dit que ce serait difficile, mais j’ai adoré l’expérience de vivre sans être vue et de découvrir la solitude comme compagnie. J’oubliais parfois que j’étais seule », confiait-elle à Voiles et voiliers.
Un voyage qui a profondément modifié sa perception du temps, alors que le nôtre semble passer si vite. « J’ai vécu dans un temps très élastique, cyclique, avec l’impression de remonter le temps à la fin. Le temps s’étirait beaucoup. J’avais l’impression de revivre les mêmes journées, surtout avec le retour du soleil. » De quoi réfléchir.