Janja Garnbret, la superstar slovène venue « briser les rêves de médaille d’or de la France »

De notre correspondant spécial dans les problèmes,

En voyant la grimpeuse Oriane Bertone dominer la demi-finale de bloc mardi matin, le public du Bourget s’est presque mis à rêver d’une médaille d’or en escalade. Après tout, la Réunionnaise a connu une montée en puissance incroyable ces derniers mois, a visiblement l’étoffe et le mental des grandes championnes et n’a jamais caché ses ambitions. Alors pourquoi ne pas y croire ?

Le passage de la dernière participante de la compétition, Janja Garnbret, est venu apporter une réponse cinglante à la question. Car la Slovène existe, et tant qu’elle respire, il paraît difficile de l’imaginer perdre. Un peu comme devoir supporter Armand Duplantis à la perche ou Michael Phelps dans une piscine. Si la reine des grimpeuses a été accueillie par une ovation très chaleureuse du public, presque autant que si elle était française, sa performance aura refroidi plus d’un rêve français dans le public. Son run : 99,6 points sur 100. Et elle a une avance encore plus grande en « difficulté », l’autre épreuve qui déterminera la championne olympique.

Un problème nommé Janja

Sauf surprise, Janja Garnbret devrait briser le cœur de plus d’un Français lors de la finale. Qu’importe. Dans le public, certes chauvin mais pas rancunier, on sait aussi reconnaître un « GOAT (Greatest of all time) » quand on a la chance d’en voir un en live. Un tonnerre d’applaudissements pour chacun de ses passages et ses triomphes si faciles. Elle réussira les quatre blocs jusqu’au bout, la seule à le faire, dont deux flashés au premier essai. La Slovène ne traîne pas, et on passe plus de temps à commenter ses passages qu’à les regarder. Dans les tribunes du stade, on n’en finit plus de parler d’elle – « Janja », « la Queen », « la GOAT », « la Slovène », les surnoms ne manquent pas – à l’image du boss final qui n’en a jamais laissé aux autres.

« Elle va nous faire mal et semble inatteignable, mais je suis prêt à nous laisser finir deuxième si c’est contre elle », a reconnu Anthony, venu voir à la fois le Français et le Slovène. Il prend l’exemple de Félix Lebrun : « Il a perdu contre quelqu’un de meilleur que lui, mais sa médaille de bronze était déjà une émotion incroyable, plus que certaines médailles d’or. Parfois, il y a quelque chose de plus fort, c’est le sport. Et puis, sur un malentendu… »

« À moins qu’elle ne se casse le bras… »

Lilly avait aussi les yeux pleins de joie pour la championne : « Elle est dingue de facilité. Si je n’avais pas vu les autres grimpeuses avant, on aurait pu croire que ce sont des blocs vraiment faciles vu la façon dont elle les survole. » Les grimpeuses étant assez proches de leur communauté, Lilly continue : « Le pire, c’est qu’on ne peut même pas lui en vouloir. Elle a l’air adorable et si gentille. »

A seulement 25 ans, Janja Garnbret a déjà tout gagné : la première médaille d’or de l’histoire à Tokyo, 8 championnats du monde et 10 coupes du monde. Et elle ne compte pas s’arrêter là. Quand on lui explique que la France rêve d’or, et qu’elle va sûrement briser nos rêves, sa réponse est laconique : « Oui. » Un silence, puis une petite précision : « Je vais faire de mon mieux pour défendre mon titre de Tokyo et redevenir championne. Je vais me concentrer sur moi, même si je sais que les Françaises sont très fortes. »

« Si la fenêtre s’ouvre, il faudra être prêt à la saisir »

L’entraîneur slovène a été encore plus clair : « Elle est bien sûr la grande favorite. Je pense que tout le monde sait que Janja Garnbet est la meilleure grimpeuse et qu’elle est dans une forme extraordinaire. Je pense qu’elle mérite pleinement l’or. »

L’entraîneur français, Nicolas Januel, lui a appris à gérer la Slovène en compétition : « Bien sûr, Janja est un peu le moteur pour nous toutes, le but ultime. On lève les yeux et elle est là. Après, le plus important pour nous, c’est qu’Oriane soit dans la meilleure forme possible. Quoi qu’il en soit, l’escalade est une discipline un peu aléatoire, où il peut y avoir plus d’une surprise, et si la fenêtre s’ouvre, il faudra être là à 200%. »

Oriane Bertone, tout sourire après sa deuxième place et son excellente performance, a voulu passer à l’offensive : « Je n’ai jamais été aussi forte de ma vie, j’ai beaucoup confiance en moi, j’ai mis beaucoup de choses en place et je me suis beaucoup entraînée ». Allez, on y croit à cet or ? Nicolas Januel : « On y croit à 200%. Il n’y a pas que la Slovène, plein d’autres filles sont très fortes, dont Oriane ». Ah et puis merde, il a raison, malgré Janja Garnbret, on va rêver et espérer.