Si elle se confirme, ce qui ne semble pas soulever de grands doutes, cette annonce fera beaucoup de bruit. Le télescope spatial James-Webb (JWST) n’a en réalité quasiment aucune limite, une équipe internationale d’une trentaine de chercheurs vient de publier la possible découverte des plus anciennes galaxies jamais imagées. Ces cinq galaxies seraient nées dans l’Univers qui n’avait que 200 millions d’années, soit 70 fois plus jeune qu’aujourd’hui. Tout simplement incroyable.
Nous ne sommes jamais allés aussi loin dans le passé
Ce qui est encore plus fou, c’est que nous atteignons les seuils théoriques pour la formation des premières étoiles et galaxies post-Big Bang. Commencer à les observer est donc une prouesse incroyable, car selon nos modèles cosmologiques actuels, les toutes premières galaxies se sont formées au plus tôt 100 ou 200 millions d’années après le Big Bang. Étonnamment, nous ne savons toujours pas si les étoiles se sont formées en premier ou si les galaxies se sont formées en premier, les deux étant initialement d’énormes nuages d’hydrogène et d’hélium gazeux. De toute évidence, nous ne trouverons probablement pas beaucoup de galaxies plus anciennes que celles identifiées par James-Webb.
James-Webb brise les barrières du temps
Le JWST parvient donc à faire exactement ce pour quoi il a été conçu, à savoir briser les barrières techniques qui nous empêchaient jusqu’à présent de comparer nos théories aux observations. Produire en clair une belle science astrophysique et lever le voile sur les mystères de nos origines. Parlons un peu de ces cinq galaxies.
Il s’agit de l’enquête GLIMPSE dans la constellation méridionale de Grue. Ces galaxies primitives ont un redshift allant de z=15,9 à z=18,6, ce qui fait exploser le précédent record de JADES-GSz-14, dont le redshift (décalage vers le rouge en anglais) était z=14,2.
Le décalage vers le rouge est un effet dû à l’expansion de l’Univers : la lumière – sa longueur d’onde pour être plus précise – s’allonge, s’étend sur de grandes distances, car l’Univers lui-même grandit. et s’étire. La mesure de ce décalage donne donc la distance à l’objet qui a émis la lumière. Ce principe s’apparente au son d’une sirène de véhicule de police qui devient de plus en plus fort à mesure qu’il s’éloigne de vous…
L’identification de telles galaxies si lointaines a nécessité un coup de main de la nature cosmique : la présence de l’amas de galaxies Abell S1063 entre la Terre et les cinq galaxies si éloignées. Celle-ci agit alors comme une loupe, ce que l’on appelle l’effet de lentille gravitationnelle qui amplifie la lumière lointaine venant de derrière.
Voici une photo Hubble de l’amas de galaxies Abell S1063.
Quelles sont les implications pour notre compréhension de l’Univers ?
Comme l’explique un membre de l’équipe de recherche au journal Space.com, « il reste très difficile d’estimer l’âge exact de ces galaxies et de déterminer quand elles se sont formées, mais nous approchons certainement de la première génération de galaxies (…) En fin de compte, ces observations imposeront des contraintes strictes sur les processus physiques autorisés dans nos modèles de l’Univers.
La cosmologie vit ses plus belles heures. Nous nous rapprochons de plus en plus de la barrière du Big Bang. Et comme disaient les Latins : «Félix qui potuit rerum cognoscere causas.» Heureux celui qui peut toucher les profondeurs secrètes des choses…