Divertissement

James Ellroy repeint Marilyn et JFK

L'écrivain américain James Ellroy à Turin en mai 2024.

« Les Enchanteurs » de James Ellroy, traduit de l’anglais (États-Unis) par Sophie Aslanides et Séverine Weiss, Rivages, « Noir », 672 p., 26 €, numérique 20 €.

On l’imagine aisément troquer ses éternelles chemises à fleurs contre un tablier de coroner ; et sa plume – il écrit toujours à la main – contre un scalpel. Depuis quarante ans, le docteur James Ellroy poursuit inlassablement sa tâche : disséquer encore et encore le grand cadavre du rêve américain.

Il avait déjà autopsié les années Kennedy en Tabloïd américain (Rivages, comme tous ses livres, 1995), a sondé les entrailles d’une force policière brutale et corrompue dans les années 1940 et 1950 avec son Quatuor de Los Angeles (1988-1991). Et même décortiqué le mythe du tueur en série, moins un génie criminel qu’un perdant sanguinaire (Un tueur sur la route1986). Avec Les enchanteursle troisième d’une série de cinq livres prévus sur le Los Angeles d’après-guerre (après Perfidie2015, et La tempête qui approche2019), Ellroy aiguise son scalpel et creve les abcès d’un Hollywood en plein âge d’or tardif, capitale du vice en décomposition avancée, où Orson Welles photographie les frasques des stars de cinéma pour en faire des jeux de cartes pornographiques vendus sous le manteau.

En greffier compulsif de ces turpitudes, voici Freddy Otash, flic défroqué et voyeur invétéré, junkie notoire devenu le personnage préféré d’Ellroy après avoir été l’antihéros de sa nouvelle. Extorsion (2014) puis de Panique générale (2022). Au cœur de l’été 1962, alors que le cadavre de Marilyn Monroe est encore chaud, après une overdose de barbituriques, Otash est chargé par Robert Kennedy, procureur général des États-Unis, d’une mission délicate : discréditer l’actrice jusque dans la tombe pour effacer toute trace de l’histoire. « sommeil suicidaire » de son frère le président John Fitzgerald Kennedy, dont elle était la maîtresse. L’enquête sur « Freddy O » est consignée dans un journal hallucinatoire où son regard, tel un « caméra humaine »promenades de villas opulentes à « salles de baise clandestines » des enfers.

Flux staccato ponctué d’allitérations

« J’ai une mémoire photographique. Je vois et j’imprime des choses que personne d’autre ne voit. »professe cet expert en espionnage et en commérages funestes, double d’un auteur également travaillé par le souci du détail. Miniaturiste des passions humaines et des rédemptions contrariées, Ellroy ne se réinvente pas, et tant mieux. Quand la soupe est bonne, pourquoi changer la recette au profit d’un bouillon « revisité » ? On retrouve dans Les enchanteurs son débit saccadé ponctué d’allitérations. Ou encore ses figures de style qui, loin d’être une quelconque affectation, parodient les feuilles de chou semi-clandestines des années 1950 et 1960 pour mieux plonger son lecteur dans les excès de l’époque. De cette licence assumée, l’auteur dresse le portrait d’une Marilyn en « conteur maladroit »proie de « fantasmes criminels bizarres »ou corrige celui de « JFK », président priapique qui « se fait baiser en deux minutes » Et « prévoit une heure pour ses rendez-vous, comprenant des martinis, des sandwichs club et des bavardages ».

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Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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