"J'ai la chance de vivre avec ces gars extraordinaires", savoure Ugo Mola
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« J’ai la chance de vivre avec ces gars extraordinaires », savoure Ugo Mola

« J’ai la chance de vivre avec ces gars extraordinaires », savoure Ugo Mola

Le manager du Stade Toulousain livre les ressorts qui animent son équipe avant de retrouver le Stade Rochelais, ce vendredi soir, en demi-finale du championnat.

Envoyé spécial à Bordeaux

Un mois après avoir remporté la Champions Cup, quel levier de motivation utilisez-vous pour vous relancer en quête d’un nouveau titre ?

Ugo Mola : La particularité de ce groupe, c’est que peu importe les rivalités, peu importe nos adversaires, ils sont en constant challenge, l’envie de toujours avancer, de repousser leurs limites. Ils sont très concentrés sur la production qu’ils souhaitent réaliser. Parfois, lorsque nous sommes satisfaits de ce que nous faisons, nous réduisons le niveau de vigilance et d’éveil. Mais nous nous donnons depuis quelques années – c’est notre 11e demi-finale – la possibilité d’y être. Cela ne garantit rien mais cela nous donne une forme de régularité. Ce groupe a la capacité d’accepter de payer en retard, en faisant des efforts différés. Ils acceptent de travailler dur pour obtenir les résultats longtemps après. J’ai 37 joueurs qui ont marqué au moins un essai cette saison en Top 14, et j’en ai utilisé 58. Nous avons pris un autre chemin pour nous retrouver ici, en demi-finale. Cela ne garantit rien. Mais c’est le luxe de travailler dur pendant les périodes fastidieuses et d’accepter de décaler le moment où l’on s’amuse.

Cette demi-finale est-elle particulière à cause de la rivalité, depuis cinq ans, avec le Stade Rochelais ?

C’est la force de ce groupe qui a un karma incroyable, toujours positif : ils ne cherchent pas à se venger. Nous essayons souvent de nous monter les uns contre les autres. Mais franchement, ils s’en moquent. Ils sont vraiment concentrés sur la production qu’ils veulent réaliser, comment ils vont la faire, comment se donner les moyens d’être encore meilleurs. J’ai la chance de vivre avec ces jeunes gens extraordinaires. Lors de nos trois derniers titres de champion, à chaque fois, nous avons été contraints de battre La Rochelle. C’est évidemment un acteur majeur du paysage européen et français. Mais honnêtement, nous ne nous concentrons pas sur eux. Il s’agit de nous, du rugby qu’on va essayer de produire vendredi soir, de la qualité de notre rugby, de notre envie de provoquer, d’oser, d’oser. Quand on a la chance d’avoir de tels joueurs… Ce groupe vit comme j’ai rarement eu l’occasion, en tant que joueur puis en tant qu’entraîneur, de le voir. Ils ont une confiance exagérée mais ce n’est pas de la suffisance et, surtout, pas de l’arrogance. Ils veulent juste jouer au rugby, peu importe qui ils sont. Au contraire, ils veulent se mesurer à de nombreuses équipes de jour, de styles différents. On le voit quand Antoine (Dupont) va jouer à 7 heures, c’est pour essayer autre chose. Les enfants se remettent en question et voient plus loin. Notre envie, notre envie, c’est de continuer à mettre le club dans des situations où on peut jouer des demi-finales, des titres…

« Il y a ce que vous pensez être et ce que vous devez montrer. Je veux montrer quelque chose vendredi soir. »

Quels enseignements tirez-vous du barrage victorieux au Stade Rochelais face à Toulon ?

Il y a eu un petit changement dans le personnel depuis quelques temps. L’arrivée dans le staff, souhaitée par je ne sais qui, de Rémi Talès (ancien ouvreur du XV de France, NDLR) ont apporté une envie d’aérer un peu plus leur rugby, de se donner des armes différentes. Cela montre quand on les regarde qu’ils essaient de déplacer le ballon un peu plus, de passer un peu plus. Après je ferais attention, avant qu’on me le reproche, de juger ici ou là. Mais force est de constater que l’arrivée de Rémi n’est pas étrangère à ce nouvel élan des dernières performances rochelaises.

Mais les Rochelais restent très forts, notamment en défense…

La défense, c’est l’affaire de La Rochelle. Comme au Stade Français. Ce sont des équipes qui s’exposent peu et sont très fortes sur les bases. Ils ont cette capacité à mettre en faute leur adversaire. Mais les Rochelais ont ajouté et développé l’aspect offensif. J’ai compris qu’au sein même de l’équipe, ils n’étaient pas forcément d’accord et qu’ils voulaient se concentrer sur ce secteur. Après, il y a ce que vous pensez être et ce que vous devez montrer. Je veux montrer quelque chose vendredi soir. Quand je dis je, c’est l’équipe qui doit montrer quelque chose. Et elle veut montrer ce dont elle est capable, être compétitive dans certains secteurs, dominante dans d’autres. Être capable de s’adapter. Car ce qui fait la force de notre équipe, de notre groupe, c’est de continuer à explorer des chemins moins connus.

Quel était le but du stage que vous venez de réaliser à Faro, au Portugal ?

Contrairement à l’année dernière, où nous étions davantage axés sur la régénération, cette fois, comme nous avons pu faire tourner le groupe, nous nous sommes concentrés sur le rythme, sur notre capacité à prendre de la vitesse, à utiliser les espaces. Tout ce que nous essayons de vous montrer et qui parfois ne fonctionne pas très bien, et parfois très bien. Ce que nous espérons, c’est être en phase avec nos qualités quand cela compte. Ce fut le cas lors de la finale de la Champions Cup. Pour arriver au bout du Top 14, il faut être capable de prendre son destin en main, capable de provoquer les choses, d’être audacieux, mais aussi d’assurer les bases essentielles de ce jeu.

« Cette génération, n’en déplaise à certains, gagnera quand même des titres »

Vous avez beaucoup fait tourner vos effectifs depuis plus de deux mois. Comment maintenir l’équilibre entre beaucoup de fraîcheur et manque de rythme ?

Je ne suis pas fan des statistiques et des données, mais évidemment, nous mesurons et nous contrôlons. Et les feux sont au vert. Nous avons tout fait pour y arriver. Mais, il y a deux ans, les gens me demandaient si nous n’étions pas trop frais et, aujourd’hui, ils me demandent si nous n’étions pas trop frais (rire). En fait, franchement, je ne sais pas. J’ai une petite idée, que je garderai pour moi. Mais je suis convaincu que l’envie et l’intérêt sont là. Banaliser le fait d’être devant soi chaque année quand ça compte, c’est accorder peu d’importance à tout le travail fait en amont, à tout l’abnégation, à tous les dégâts… Les Anthony Jelonch, Manny Meafou, Nepo Laulala See More Dimitri Delibes…, les garçons qui ont été grièvement blessés et qui ne peuvent être là ont payé un prix très élevé sur le plan individuel, mais ils ont sûrement permis à l’équipe d’être un peu plus fraîche aussi sur la fin. Ce n’est pas une coïncidence.

Aborder cette demi-finale avec le statut de grand favori, est-ce une arme à double tranchant ?

Ce n’est pas quelque chose sur lequel nous prenons position. L’étiquette de favoris, évidemment, on a cinq titres en cinq ans donc, le dénigrer ce serait vous prendre un peu pour… Vous avez la parole…. Et je ne veux pas vous prendre pour… Ce qui m’intéresse, c’est qu’on ne baisse pas le niveau de vigilance. L’invulnérabilité dont peut parfois jouir ce groupe n’a de sens que si l’on continue à travailler. Si nous pensons que nous sommes invulnérables, c’est le début de la fin et cela nous mènera à l’échec. Avoir gagné nos cinq dernières confrontations contre La Rochelle en phase finale ne nous garantit pas de remporter les 6e. Chaque fois d’ailleurs, on se rapproche un peu plus de la défaite. Mais la seule chose qui motive les garçons, le staff, le club, ce n’est pas une rivalité particulière, ni la recherche d’un ennemi suprême mais continuer à avancer, gagner des titres. Parce que cette génération, peu importe à quel point certains pensent mal, elle gagnera quand même des titres…

Propos recueillis en conférence de presse

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