Arrivé l’an dernier à Toulouse après la faillite des Wasps, le troisième ligne anglais a été colossal lors du tour de force défensif réalisé par son équipe face au Leinster : 30 plaquages délivrés, monstrueux.
Le visage marqué, mais radieux. Après le tour de force réalisé en finale de Champions Cup face au Leinster, Jack Willis s’est présenté devant les journalistes, dans les allées du Tottenham Hotspur Stadium de Londres, un grand sourire aux lèvres. Et il dit en préambule et en anglais : « Je vais essayer de ne pas dire de gros mots pour que vous puissiez comprendre ce que je vais dire… » Hilarité générale. Toulouse vient de renverser sa bête noire et l’inépuisable troisième ligne anglais a été l’un des grands hommes de ce tour de force. « Je suis tellement heureux, ma famille est heureuse aussi. J’ai de très bons amis ici. Je suis très reconnaissant de pouvoir faire partie d’une équipe comme celle-ci.
Arrivé en novembre 2022 à Toulouse, dans l’anonymat le plus complet, alors que Wasps venait de faire faillite, Jack Willis n’a pas mis longtemps à être adopté. Son engagement est total. Dans les tacles, dans les rucks, il fait un travail formidable aux côtés d’autres « ratiers » comme François Cros, Julien Marchand ou Anthony Jelonch (actuellement blessé). « Aujourd’hui, je suis juste très reconnaissant d’être ici, confie celui qui a subi deux blessures graves au genou dans sa carrière. Qui m’aurait dit qu’un jour je gagnerais la Coupe des Champions ? C’était un rêve d’enfant. Merci à ce club.
« L’attaque est quelque chose de naturel pour ce groupe. Pas nécessairement pour moi »
Le Stade Toulousain peut aussi vous dire merci. Dans l’étouffante guerre de tranchées qui se déroule dans la banlieue nord de Londres, le sujet de Sa Majesté, sur scène, se livre sans compter. Les chiffres sont fous : certains annoncent 30 plaquages, d’autres mettent même le curseur jusqu’à 40. Qui croire ? La prestation de Jack Willis est en tout cas colossale, il a réalisé 12% des plaquages pour son équipe qui a su mettre le Leinster sous l’extincteur grâce à sa défense de fer. Trente opposants se sont découpés, on croirait que c’est un fait divers…
« On ne gagne pas de trophées sans une bonne défense. Nous le savions. Attaquer est quelque chose de naturel pour ce groupe. Pas nécessairement pour moi, beaucoup d’autres gars sont bien plus talentueux que moi dans ce domaine. » sourit le flanqueur-élagueur de 1,90 m et 110 kg.
Et pour revenir sur cette option – risquée mais finalement rentable – de défier de front le Leinster et de résister aux assauts irlandais : « Contre une équipe aussi organisée et structurée que le Leinster, qui allait insister encore et encore, nous savions que nous devions rester ensemble, leur mettre la pression dès que nous le pouvions et attendre la bonne opportunité. Nous avons été à plusieurs reprises au bord de la rupture mais nous sommes restés unis. Nous savions que nous devions jouer un très gros match en défense. Les Rouge et Noir ont dû puiser au plus profond d’eux-mêmes pour ne pas céder et arracher cette victoire.
« Quand la prolongation est arrivée, on s’est dit : « Oh! C’est reparti pour encore 20 minutes… » On était vraiment à la fin, confie Jack Willis. Mais ensuite, c’était surréaliste lorsque l’arbitre a sifflé la fin du match. Lors de ce match, on a aussi (et surtout) vu Antoine Dupont capable de tout faire, y compris gratter les ballons adverses. Willis lui a-t-il donné quelques conseils ? Cela l’amuse. « C’est un grand joueur et une personne très humble, il n’a besoin des conseils de personne.» Nouvel éclat de rire, en français s’il vous plaît : « Il n’est pas méchant ! »
« C’est là qu’on voit l’ambition de cette équipe, ils veulent toujours gagner plus »
A la fin de ce match titanesque, les mêmes commentaires, les mêmes questions sont revenus sur la table. Comment l’Angleterre de Steve Borthwick peut-elle se passer d’un tel joueur ? Certes la concurrence est rude en troisième ligne, mais de nombreux observateurs et supporters anglais réclament un assouplissement de cette règle d’éligibilité qui fait qu’un rugbyman évoluant hors d’Angleterre ne peut être sélectionné. Une aberration dans le cas de Jack Willis, qui compte 13 sélections et n’a que 27 ans, et d’Henry Arundell (Racing 92, 21 ans). Sur les Britanniques et les Irlandais en Australie (20 juin-2 août 2025).
Mais l’intéressé reste concentré sur sa fin de saison avec Toulouse. Jamais satisfait. « Nous allons célébrer ce titre et nous remettre au travail. Un grand match nous attend contre La Rochelle, même si nous l’avons déjà fait. notre ticket pour les demi-finales . Mais on veut désormais remporter le Top 14 et faire le « doublé » (en français) comme ils disent. C’est là que l’on voit l’ambition de cette équipe, ils veulent toujours gagner plus. Aujourd’hui, on voit mal qui pourra arrêter cette armada lancée vers une nouvelle et historique passe à deux.