Israël se prépare à attaquer Rafah
HISTOIRE – L’armée israélienne présente la ville comme le dernier bastion de la branche militaire du Hamas dans la bande de Gaza.
Tel Aviv
L’armée israélienne est prête à intervenir à Rafah. C’est le message adressé jeudi par l’état-major au Cabinet de Guerre présidé par Benjamin Netanyahu, qui doit décider de donner ou non son feu vert à une invasion de cette localité située à la frontière avec l’Egypte. Seule certitude : le Premier ministre a affirmé à plusieurs reprises que l’objectif d’une « victoire totale » sur le Hamas qu’il brandit aux yeux des Israéliens ne pourra être atteint qu’après avoir éradiqué le Hamas à Rafah. Pour prouver qu’il est prêt à agir, le chef du gouvernement a récemment affirmé qu’une date avait déjà été fixée pour une telle opération sans donner plus de détails.
Sur le terrain, les préparatifs vont bon train. Deux unités de réservistes ont été rappelées pour servir dans la bande de Gaza, l’armée ayant eu tendance à réduire ses effectifs ces dernières semaines. L’armée israélienne a également commandé quelque 40 000 tentes pour accueillir une partie des quelque 1,5 million de Palestiniens fuyant les combats et réfugiés à Rafah. Quelque 150 000 d’entre eux ont déjà quitté cette ville pour s’installer notamment à Khan Younes, selon les estimations israéliennes. Des photos satellites ont permis d’identifier dans cette zone une grande zone dégagée qui devrait servir à installer un grand camp de toile.
Des négociations au point mort
Pour tenter de calmer les Egyptiens, qui craignent qu’en cas d’attaque israélienne à Rafah, des foules de Palestiniens tentent de forcer la frontière pour fuir vers la péninsule du Sinaï, le chef d’état-major, le général Herzi Halevi, et le directeur du Shin Beth , le service de sécurité intérieure Ronen Bar s’est entretenu mercredi au Caire avec ses homologues égyptiens.
Pour l’armée israélienne et Benjamin Netanyahu, mais aussi pour le Hamas, Rafah a une valeur symbolique. Israël estime que 4 des 6 « brigades » de l’appareil militaire du Hamas encore intactes se trouvent dans cette ville où se cache également Yahya Sinwar, le leader islamiste et cerveau de l’incursion des commandos du Hamas qui ont perpétré le massacre du 7 octobre. dans le sud d’Israël.
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L’armée israélienne affirme avoir déjà complètement neutralisé 18 autres brigades du mouvement islamiste. Elle estime également que seuls des coups très durs portés au Hamas pourraient permettre d’être en position de force pour obtenir la libération des 133 otages détenus par les islamistes. Pour le moment, les négociations sur ce dossier hypersensible sont au point mort.
Étrange coïncidence de timing : c’est au moment où Israël semblait sur le point d’attaquer que le Hamas se livrait à un nouvel épisode de guerre psychologique en rendant publique sur les réseaux sociaux une vidéo de l’un des otages, Hersh Goldberg-Polin, kidnappé lors d’une rave party. le 7 octobre. Le témoignage de l’Israélo-Américain de 23 ans, amputé d’un bras lors de son enlèvement, même mis en scène et en partie censuré par les médias locaux, a profondément ému les Israéliens.
Pour l’armée israélienne et Benjamin Netanyahu, mais aussi pour le Hamas, Rafah a une valeur symbolique. Yahya Sinwar, le cerveau de l’incursion des commandos du Hamas qui ont perpétré le massacre du 7 octobre, s’y cacherait
Il a évoqué le « cauchemar » qu’il vit depuis plus de 200 jours tout en dénonçant Benjamin Netanyahu et le gouvernement «qui devrait avoir honte de nous avoir abandonnés« . Cette vidéo a spontanément poussé des centaines d’Israéliens à manifester leur colère dans les rues de Jérusalem et de Tel-Aviv contre le Premier ministre, accusé de ne pas tout faire pour obtenir la libération des otages, tandis que la police intervenait sans ménagement contre les manifestants.
Une autre raison de conflit
Mais à Rafah, Benjamin Netanyahu est contraint de prendre en compte l’impact international que pourraient avoir des milliers de victimes civiles palestiniennes si l’armée israélienne envahissait cette ville. Joe Biden, le président américain, n’a cessé de clamer son opposition à une telle opération alors que les États-Unis viennent de débloquer une énorme aide supplémentaire de 26 milliards de dollars à Israël tout en continuant de fournir sans restriction des armes et des munitions à Tsahal.
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Une autre raison potentielle de conflit est apparue avec les États-Unis. Le Département d’État américain et l’ONU ont demandé une enquête sur les accusations du Hamas selon lesquelles des charniers auraient été découverts près des hôpitaux Nasser de Khan Younes et d’al-Shifa dans la ville de Gaza.
Au total, plus de 600 cadavres ont été retrouvés, dont certains avaient les mains et les pieds liés, ce qui tendrait à prouver qu’ils ont été abattus lors d’opérations menées par l’armée israélienne contre ces deux établissements. Le porte-parole de l’armée a nié ces accusations et a indiqué que des tests avaient été effectués dans ces cimetières pour déterminer si certains des morts étaient des otages. Il a également diffusé une vidéo montrant des Palestiniens creusant une fosse commune dans ces cimetières il y a plusieurs semaines pour enterrer leurs morts.