Le journaliste et essayiste américain Nathan Thrall, ancien responsable du programme arabo-israélien de l’International Crisis Group, vit à Jérusalem. Il vient de publier Une journée dans la vie d’Abed Salama (Gallimard, 336 pages, 25 euros), une immersion dans un fait divers de 2012, emblématique du système d’apartheid israélien en Cisjordanie. L’ouvrage vient de recevoir le prix Pulitzer de la non-fiction. Le monde, L’auteur revient sur l’impasse tragique dans laquelle s’enfonce le conflit israélo-palestinien.
Le 7 octobre au soir, il était clair que nous allions assister dans la bande de Gaza à un niveau de destruction jamais vu auparavant. Ce qui n’était pas prévu, en revanche, c’était l’endurance du Hamas. Le groupe armé, coincé dans ce minuscule territoire, soumis à un siège complet, privé d’eau et d’électricité, et aussi, très probablement, privé du moindre approvisionnement en armes, continue de se battre. Chaque fois qu’Israël proclame « mission accomplie » et annonce le démantèlement d’un bataillon du Hamas dans un secteur donné, quelques jours ou semaines plus tard, des soldats israéliens sont tués dans ce même secteur. Pour tous les analystes militaires, c’est là le véritable choc. Loin d’avoir été éliminé, le mouvement islamiste redeviendra la force dominante à Gaza, le jour où l’armée israélienne quittera ce territoire.
Le Hamas a connu des gains de popularité importants en Cisjordanie, dans la diaspora et même dans la bande de Gaza. Les populations occupées ont naturellement tendance à soutenir ceux qui luttent contre leurs occupants. Bien sûr, il existe ici et là des anecdotes qui font état de critiques à l’encontre du Hamas, mais il ne faut pas leur accorder trop d’importance. D’abord parce qu’il ne s’agit que d’anecdotes, mais aussi parce qu’avant le 7 octobre, une partie des Gazaouis détestait déjà le Hamas. En l’état actuel des choses, en plus d’avoir infligé un coup très dur à Israël, ce mouvement peut se targuer d’avoir remis la question de la Palestine à l’ordre du jour international. Si les hostilités se terminent par un échange de prisonniers, alors le Hamas n’aura plus de rival sérieux pour le leadership, au moins symbolique, des Palestiniens.
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