Israël et l’Iran jouent la désescalade
Apparemment, Israël et l’Iran semblent vouloir se contenter d’un match nul après avoir frôlé la guerre ce week-end. L’heure est à la désescalade. Toujours aussi discrets, les dirigeants israéliens se sont abstenus de chanter victoire après l’attaque de drone vendredi contre une station radar près d’Ispahan en Iran. Cette opération attribuée à Israël était destinée à répondre à la salve de 350 missiles et drones tirés par l’Iran le week-end dernier, dont 99 % ont été interceptés.
Aucun ministre ou membre de l’état-major israélien n’a officiellement revendiqué la responsabilité de cette opération en Iran. Ces consignes de discrétion données par Benyamin Netanyahu, le chef du gouvernement, visaient à protéger les sensibilités iraniennes et à ne pas humilier publiquement la République islamique, qui aurait pu la contraindre à réagir.
« Jeux d’enfant »
La manœuvre est pour le moment réussie. Hossein Amir Abdollahian, le chef de la diplomatie iranienne, a minimisé l’impact de l’attaque d’Ispahan, affirmant qu’elle avait été menée « par deux à trois drones quadrimoteurs, comme ceux avec lesquels jouent les enfants en Iran ». Il n’a même pas désigné Israël comme suspect dans une quelconque agression. D’autres responsables iraniens sont allés jusqu’à nier qu’une attaque ait eu lieu. Autrement dit : « déplacez-vous, il n’y a rien à voir ».
Du côté israélien, en l’absence de réaction officielle, les commentateurs estiment également que les deux pays ont décidé de jouer la carte de l’apaisement pour éviter une guerre au Moyen-Orient alors que l’armée israélienne est déjà très occupée avec une guerre lancée à Gaza. Déshabillage le 7 octobre suite aux massacres commis par le Hamas ; guerre qui est encore loin d’être terminée. Les affrontements quotidiens se poursuivent avec le Hezbollah, allié de l’Iran, à la frontière libanaise et de fortes tensions menacent de dégénérer en Cisjordanie.
« Message très clair »
Malgré tout, les médias israéliens, citant les médias américains, ont tous souligné que l’attaque d’Ispahan était certes limitée, mais qu’elle obéissait en réalité à un autre impératif. Les drones ont été tirés depuis des avions éloignés de l’espace aérien iranien vers une base militaire sans être interceptés par la défense aérienne iranienne équipée de batteries russes S-300 jugées très efficaces.
En d’autres termes : les Israéliens possèdent des machines avec une signature radar quasiment nulle. La cible n’a pas été choisie par hasard. La base ciblée abritait des radars, qui font partie des systèmes de protection des installations nucléaires de Natanz situées à 120 kilomètres d’Ispahan, principal centre d’enrichissement de l’uranium qui pourrait un jour être utilisé pour la production d’armes nucléaires.
« L’attaque d’Ispahan n’avait pas pour but de causer des dégâts importants, mais d’envoyer un message très clair selon lequel Israël dispose d’une avance technologique et des capacités pour frapper les sites les plus sensibles d’Iran », explique Israel Ziv, ancien chef des opérations de l’armée israélienne. Pour Ronen Bergman du quotidien « Yediot Aharonot », « l’essentiel était de montrer aux Iraniens qu’ils ont échoué avec leurs 350 drones et missiles, alors que nous avons réussi à infiltrer un ou deux appareils sans problème. A eux d’imaginer ce qui se passerait. serait arrivé si nous avions produit 350 exemplaires.
Modération
Sur le plan diplomatique, cette modération s’est avérée payante. Les Etats-Unis et les Européens, qui craignaient qu’une offensive israélienne à grande échelle ne provoque un embrasement général au Moyen-Orient, sont rassurés. Israël est sorti de l’isolement quasi total dans lequel se trouvait l’État juif en raison de la poursuite de la guerre dans la bande de Gaza et de la crise humanitaire qui frappe cette enclave.
Cette situation devrait avoir pour conséquence la poursuite de la guerre fantôme dans laquelle Israël et l’Iran se livrent depuis des décennies avec des cyberattaques, des raids aériens israéliens contre les alliés de Téhéran au Liban, en Syrie et en Irak, contre des convois d’armes iraniens en Syrie destinés au Hezbollah ou à des membres de l’armée iranienne. Les Gardiens de la révolution, colonne vertébrale du régime iranien, stationnés en Syrie.