Nouvelles locales

Isabelle Resplendino, la confidente des Français exilés en Belgique

Isabelle Resplendino est une vigie, le regard fixé de part et d’autre de la frontière franco-belge. Cette responsable associative de 58 ans alerte inlassablement sur le sort des Français en situation de handicap, contraints de s’exiler en Belgique, faute de structures suffisantes en France. « Nous sommes les oubliés des politiques publiques »elle insiste.

Le phénomène est profond. Depuis les années 1950, la France a en partie renvoyé la balle à son voisin belge en lui confiant la prise en charge des personnes handicapées, principalement autistes.. Une politique qui a touché des milliers de familles, dont celle d’Isabelle Resplendino.

Une vie dédiée à l’autisme

Elle connaît le sujet comme sa poche. En 2001, sa vie a changé avec la naissance de son fils Wolfgang. « Dès les premiers mois, j’ai vite compris qu’il était autiste.elle se souvient.Je connaissais ce handicap puisque je gardais des enfants autistes quand j’étais jeune. Mais les premiers tests ont contredit son intuition, jusqu’à ce que son fils soit finalement diagnostiqué autiste en 2005.

« On nous a conseillé d’envoyer Wolfgang en Belgique, dans une école spécialisée de la partie francophone du pays. »Elle explique. Avec son mari belge, ils ont décidé de s’installer dans la commune de Stambruges, dans la province du Hainaut, pour être plus proches de leur enfant. Isabelle Resplendino sourit largement : «Dès qu’il a commencé l’école, Wolfgang a fait des progrès incroyables.»

En l’espace de quelques mois, il a rattrapé tout son retard grâce à la méthode belge. « Une approche plus pédagogique qu’en France »se vante Mireille Battut, présidente de l’association La Main à l’oreille, qui a scolarisé son enfant autiste dans le même établissement belge.

« Une confidente et une militante communautaire »

« Quand j’ai vu les progrès de mon fils, j’ai eu envie d’aider les autres »raconte Isabelle Resplendino. Les premières années se partagent entre l’éducation de son fils et son investissement dans Autisme France. En 2017, alors que l’exil des Français en Wallonie bat son plein, elle crée sa propre association pour les Français en situation de handicap en Belgique (Afresheb). « Mon rôle est d’expliquer le système belge aux Français qui souhaitent y placer leurs proches car ils n’ont pas de solutions dans leur pays, et de les orienter vers les bonnes structures »elle résume.

La militante s’est également imposée comme un lien entre les familles et les décideurs politiques, en s’impliquant dans des comités de suivi locaux et nationaux. « Elle devient la coordinatrice des efforts des Français exilés en Belgique »se souvient Philippe Cordery, député de la quatrième circonscription des Français établis hors de France, qui correspond au Benelux, entre 2012 et 2017.

L’ancien député en avait fait un thème central de son mandat et s’entretenait souvent avec le leader de l’association. « Elle écoutait les familles pendant des heures lorsqu’elle les recevait chez elle. Pour moi, c’était une militante mais aussi une confidente. »

En 2021, soucieuse de mettre un terme à ce qu’elle appelle« exil forcé »Sophie Cluzel, alors secrétaire d’Etat aux Personnes handicapées, avait annoncé qu’elle suspendait la création de places dans les établissements médico-sociaux belges, espérant endiguer les vagues de départs. « Ils ont décidé du moratoire avant de créer des places en FranceIsabelle Resplendino gronde. S’il était possible de faire pire qu’avant, ils ont réussi. »

La quinquagénaire défend la possibilité que les familles puissent encore se tourner vers la Belgique, ce qui ne l’empêche pas de plaider pour que la France engage enfin les moyens nécessaires pour accompagner toutes les personnes handicapées en France. Isabelle Resplendino formule ainsi un souhait : « J’espère que mon association disparaîtra un jour. Cela voudra dire que nous aurons progressé dans la prise en charge des personnes autistes en France. »

——-

En Belgique, une longue tradition d’hospitalité

L’accueil des Français en Wallonie débute au début du XXe siècle, après le départ vers la Belgique, provoqué par la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905, de certaines congrégations religieuses du nord de la France gérant des hospices.

Le premier financement par l’assurance maladie des soins aux Français en Belgique remonte aux années 1950.

En 2024, près de 7.000 adultes et 1.250 enfants étaient hébergés dans des structures spécialisées en Wallonie. La France a tenté de mettre un terme à ce phénomène. En 2015 et 2021, deux moratoires ont gelé les financements afin d’inciter les Français à ne plus s’exiler.

New Grb1

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
Bouton retour en haut de la page