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S’il a acquis son statut de star en tenant fermement le micro dans Iron Maiden, Bruce Dickinson n’a aucune raison d’avoir honte de sa carrière solo. Après dix-neuf ans sans suite à Tyranny of Souls, le polyvalent britannique fait un retour spectaculaire avec Le projet Mandrake. Entretien.
3 septembre 1984 : Sortie de l’album Powerslave d’Iron Maiden
19 ans. C’est le temps qu’il aura fallu à Bruce Dickinson pour sortir un album solo. Après des années tumultueuses partagées entre les géants du heavy metal britannique Iron Maiden, pour qui il assure le chant, et les épreuves de la vie, il revient sous son propre nom avec l’énigmatique Le projet Mandrake. S’il martèle qu’il « Ce n’est pas un album conceptuel »il a néanmoins été travaillé sous toutes ses coutures et se permet même d’être transmédia, puisqu’il est lié à un roman graphique également écrit par le leader. « L’album peut exister indépendamment du roman graphique auquel il est lié. Certains passages du texte peuvent être déroutants pour ceux qui n’ont pas lu l’histoire, mais ce n’est pas grave. Le roman graphique permet d’obtenir plus d’informations. »
Ainsi, des morceaux comme « Afterglow of Ragnarok » et « Many Doors to Hell », le diptyque d’ouverture, peuvent être abordés indépendamment. Passionné de comics – comme en témoigne le T-shirt Watchmen qu’il arbore fièrement –, l’artiste britannique a souhaité inclure cette dimension dès les premières étapes de la conception de l’album. Bien que les deux œuvres diffèrent tant par leur nature que par leur contenu, elles ont été conçues en même temps et portent le même titre. « J’ai fait des recherches sur les effets hallucinogènes de la mandragore. J’ai donc eu l’idée de The Mandrake Project, un titre qui n’avait jamais été utilisé pour un album auparavant. C’était la dernière étape de sa conception. » Il s’agit donc du résultat d’un soin particulier apporté à une œuvre multiple.
Un détail qui peut s’expliquer simplement : « Je ne veux pas sortir un album solo mécaniquement. Dans ce milieu, il est très facile de se retrouver coincé dans une case et de marcher comme un somnambule. » Une vision qu’il rejette avec ironie : « 19 ans, ce n’est pas une camisole de force ! » (Rires) Ce soin apporté à l’œuvre est le résultat d’une longue gestation. « Roy Z (guitariste et producteur, ndlr) et moi-même avons décidé de faire une suite à Tyranny of Souls en 2014. Nous avons rassemblé quelques démos et attendu une opportunité de finaliser ce disque, mais elle n’est jamais venue. » Bien que l’idée soit venue il y a dix ans, certains morceaux de l’album sont encore plus anciens.La dernière, « Sonata (Immortal Beloved) », est née il y a plus de vingt ans. J’avais oublié que je l’avais écrite. Roy Z me l’a envoyée, je l’ai écoutée avec ma femme. Elle m’a convaincu de l’inclure sur le disque.
Cette période de temps peut également s’expliquer par diverses circonstances. « Roy Z et moi avons été séparés en partie à cause de mon emploi du temps avec Iron Maiden. » Mais le sextuor britannique n’est pas la seule raison du retard dans la conception de cet album.« J’ai eu un cancer de la gorge (en 2015) dont j’ai mis un an à me remettre. Ensuite, nous avons fait une tournée d’un an avec Iron Maiden pour rattraper le temps perdu. Puis le monde s’est confiné, et c’était fini ! » Une longue gestation qu’il résume philosophiquement : « L’attente a été frustrante, mais elle a été fructueuse. Elle m’a permis d’enrichir mon écriture. »
L’écriture de Bruce Dickinson s’enrichit également de ses nombreuses expériences. Il porte de multiples casquettes, que ce soit celle de pilote de ligne ou d’animateur radio, mais manie aussi le faire-valoir « depuis l’enfance »Après une pause prise vers l’âge de 20 ans, il reprend l’escrime après la tournée de Le nombre de la bêteson premier album enregistré avec Iron Maiden – « Si je ne faisais rien d’autre que de la musique, je perdrais la tête »il se souvient – avant d’atteindre un niveau compétitif. Cette discipline l’accompagne dans Iron Maiden, notamment dans « Flash of the Blade » qu’il signe dans Powerslave (1984), où il évoque le « techniques d’escrime anciennes ». Il s’inspire également du célèbre escrimeur japonais Miyamoto Musashi dans « Sun and Steel » (1983). Au-delà des compositions elles-mêmes, il « Il incorpore des pas d’escrime sur scène. Dans « La Mort des Celtes », j’inclus quelques exercices, que mon maître a tout de suite remarqués ! »
Mathieu David
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